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Social - Les CAF seront-elles prêtes pour le RSA ?

A partir du mois d'avril, le gouvernement devrait lancer les premiers éléments de la campagne d'information nationale sur le revenu de solidarité active (accroche générale : "Le RSA, ça sert à ça"). Celle-ci devrait engendrer un flux important de demandes, dans la perspective de la mise en place effective de cette nouvelle prestation, le 1er juin 2009. Plusieurs autres éléments devraient contribuer à cette brusque montée en charge des demandes : le versement de la prime de solidarité active (PSA) - sorte d'"avance" sur le RSA qui devrait être normalement versée à 3,8 millions de foyers au mois d'avril -, la mise en ligne d'un test d'éligibilité sur les sites des CAF et des départements qui voudront le reprendre (en principe le 25 mars) et la mise en service d'une plateforme téléphonique : le 39-39 (le 2 avril). Sans oublier que le versement de la PSA s'accompagnera d'un courrier des CAF aux intéressés leur indiquant, pour bon nombre d'entre eux, qu'ils sont éligibles au RSA.
Or, cette conjonction d'événements intervient au plus mauvais moment pour les caisses d'allocations familiales. Celles-ci sont en effet confrontées à une crise sans précédent, qui combine elle aussi plusieurs facteurs. Tout d'abord, la branche famille connaît une série de bugs informatiques, liés au traitement automatisé de ressources. Dans un souci de simplification (et d'amélioration des contrôles), celui-ci se fait désormais directement à partir des données fournies par le fisc, la traditionnelle déclaration de ressources à la CAF ayant été supprimée. Mais le basculement sur le nouveau système engendre une série de dysfonctionnements, qui touchent tout particulièrement l'aide personnalisée au logement (APL). A ces difficultés informatiques s'ajoute - comme cela était prévisible (voir nos articles ci-contre des 16 et 22 décembre 2008) - la complexité de la mise en paiement de la PSA. Conséquence : la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) reconnaît que le délai moyen de traitement des dossiers a doublé. Elle plaide la brusque montée de l'inquiétude sociale avec, depuis de début de l'année, une augmentation de 70% des appels téléphoniques et de 20% pour les courriers et les visites au guichet. Au niveau national, le stock de dossiers en retard représente 7 à 8 jours de traitement, contre 4 jours l'an dernier à la même époque. En Ile-de-France, le stock de dossiers en souffrance est estimé à 500.000, avec des pointes à 15 jours de travail pour les résorber en Seine-Saint-Denis, dans le Val-d'Oise et le Val-de-Marne. La situation est particulièrement tendue dans plusieurs grands départements. Dans les Bouches-du-Rhône, par exemple, la CAF a choisi de fermer 8 de ses 14 centres d'accueil, ce qui lui a permis de dégager des moyens pour résorber l'essentiel des retards accumulés. Mais une partie des agents s'est alors mise en grève pour réclamer des moyens supplémentaires. En Seine-Saint-Denis, la CAF a également choisi une solution radicale face aux tensions qui commençaient à monter dans les centres d'accueil entre les agents et des assurés exaspérés par les retards de paiement. Le 12 mars, elle a fermé plusieurs de ses agences (dont Bobigny et Saint-Denis) jusqu'au 31 mars, tandis que plusieurs permanences temporaires resteront fermées jusqu'à la mi-avril. Dans un courrier adressé au Premier ministre le 12 mars, Claude Bartolone, le président du conseil général, juge cette situation "absolument inacceptable" et s'inquiète du traitement des 60.000 demandes de RSA à venir. Il dénonce toutefois l'insuffisance des postes accordés par l'Etat à la CAF (24 postes supplémentaires) pour faire face à cette nouvelle mission.
Dans un tel contexte, le risque d'une brusque montée en charge des demandes de RSA ne manque effectivement pas d'inquiéter. Celle-ci devrait en effet aboutir à un nombre de bénéficiaires potentiels au moins 4 à 5 fois supérieur à celui des actuels allocataires du RMI. Alors que les différentes actions de communication nationales vont débuter, les CAF n'ont pas encore recruté les 1.000 postes supplémentaires accordés par l'Etat (au lieu des 2.000 demandés) et le rôle des CAF reste encore imprécis (sur l'orientation et l'accompagnement des bénéficiaires notamment). Même si les relations sont aujourd'hui assez tendues, les départements auraient toutefois tort de se gausser des difficultés actuelles des CAF. Nombre d'entre eux n'ont pas encore défini leurs propres modalités d'accueil et d'accompagnement des bénéficiaires, ni arrêté l'organisation du dispositif d'ensemble du RSA, piloté par le président du conseil général...

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

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