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Emploi - Les maisons de l'emploi face à leurs nouvelles missions

Les maisons de l'emploi sont en pleines négociations avec les collectivités pour leur conventionnement à partir d'un nouveau cahier des charges. Une tâche difficile, puisque leurs missions ont évolué dans une reconfiguration du service public de l'emploi.

"On ne peut pas décider de liquider une structure comme une maison de l'emploi du jour au lendemain." Les responsables de la maison de l'emploi de Paris sont encore sous le choc de l'annonce de l'arrêt et de la liquidation de leur structure, envisagés par la ville de Paris. La maison de l'emploi devait renouveler son conventionnement pour les quatre années à venir, mais "pour le moment, la ville ne souhaite pas se réengager", explique Stéphanie Gobert, responsable ressources et communication de la maison de l'emploi de Paris. Principal argument de la ville : elle ne se retrouve pas dans le nouveau cahier des charges. Pour les responsables de la structure, ce n'est pas une grande surprise. La ville n'a pas tenu ses engagements financiers pour les années passées. Mais le refus de réinvestir dans la maison de l'emploi pose le problème du budget de la structure pour les années à venir, d'autant plus que l'Etat a souhaité récupérer la mise investie en remplacement de la ville de Paris, le rapport étant 80% du budget apporté par l'Etat et 20% par la ville. Résultat, "pour 2010, nous n'avons pas de moyens", détaille la maison de l'emploi de Paris. Côté Alliance Villes Emploi (AVE), on temporise. "Il n'y a aucune remise en question des maisons de l'emploi, assure ainsi Marie-Pierre Establie, directrice d'AVE. Il s'agit d'une phase de négociations tout à fait normale pour le reconventionnement des maisons de l'emploi." Vingt-six d'entre elles doivent dès à présent aboutir dans ces négociations avec les collectivités locales puisque leur conventionnement arrivait en fin de course en 2009. Pour les autres, les négociations sont en cours, pour élaborer de nouvelles conventions dès 2011. "Le problème de la maison de l'emploi de Paris est un peu particulier, explique pour sa part Serge Papp, secrétaire du Synami (Syndicat national des métiers de l'insertion)-CFDT. Il y a un bras de fer entre l'Etat et la ville de Paris sur à peu près tous les sujets et là c'est tombé sur la maison de l'emploi." Reste que vingt-deux salariés sont concernés, "qui ont développé des services et des compétences intéressants", souligne le syndicaliste, qui se veut toutefois optimiste. "La ville est prête à reprendre quatre salariés et huit autres emplois, qui concernent l'activité des Plie (plans locaux pour l'insertion et l'emploi), seraient conservés et portés par une autre structure, détaille Serge Papp. Par contre dix autres iront droit vers le licenciement sec !" L'assemblée générale qui était prévue le 13 avril pour prononcer l'arrêt et la liquidation du groupement d'intérêt public maison de l'emploi de Paris a déjà été repoussée d'un mois. Et depuis l'annonce de cette éventuelle liquidation, les réunions se multiplient. Pour AVE, qui a récemment rencontré Christian Sautter, adjoint au maire de Paris, l'affaire serait même déjà "réglée".

 

"Le nouveau cahier des charges va poser des problèmes"

L'association soutient les autres maisons de l'emploi qui rencontrent des difficultés dans les négociations avec les collectivités locales pour leur nouveau conventionnement. "Il faut se conformer au nouveau cahier des charges, souligne la responsable d'AVE, et cela demande un travail de négociations." Après une phase d'incertitude pour les maisons de l'emploi, qui avait commencé en septembre 2007 avec l'annonce, par Christine Lagarde, ministre de l'Economie, d'un gel de ces structures, l'avenir des maisons de l'emploi s'était éclairci. Un budget de 85 millions d'euros leur a été consacré dans le projet de loi de finances 2010. La publication de leur nouveau cahier des charges, même si elle n'a eu lieu qu'en décembre 2009, a permis au gouvernement de clarifier ses intentions quant au devenir de ces structures et surtout de préciser leurs missions pour éviter qu'elles ne fassent concurrence à Pôle emploi. Un cahier des charges qui précise notamment que les maisons de l'emploi "n'ont pas vocation à devenir des opérateurs de placement mais à inscrire leurs interventions en complémentarité des actions menées par les autres acteurs locaux de l'emploi sur le territoire et à développer une fonction de coordination" (voir ci-contre notre article du 5 janvier 2010). Elles ne devront pas développer une "offre de services déjà existante", en clair empiéter sur les services d'autres opérateurs comme Pôle emploi, et auront pour principale tâche d'élaborer un diagnostic territorial du marché du travail de façon à mieux anticiper les besoins. Elles pourront continuer à faire de l'accompagnement mais à des conditions très strictes et sans l'appui financier de l'Etat. Reste à voir la déclinaison de ces décisions sur le terrain. "85 millions d'euros ont été votés à l'Assemblée nationale, il faut qu'ils arrivent dans les caisses des maisons de l'emploi, il n'y a pas de raison qu'ils se perdent entre le niveau national et le niveau régional", insiste Marie-Pierre Establie. Autre problème que le syndicat Synami-CFDT identifie : les conséquences du nouveau cahier des charges. "Il va poser des problèmes à toutes les maisons de l'emploi qui font de l'accompagnement au public, explique Serge Papp, l'Etat ne souhaitant plus financer cette mission." Selon lui, la maison de l'emploi de Dijon, qui comporte une trentaine de salariés et qui a développé des services en matière d'accueil au public, serait dans ce cas, tout comme d'autres grandes maisons de l'emploi à l'instar de celle de Nantes. "Le problème, c'est que les maisons de l'emploi n'ont pas encore trouvé leur place dans le service public de l'emploi, détaille Serge Papp. Elles ont été mises en place au départ parce que la fusion entre l'ANPE et les Assedic avait du mal à se faire ; maintenant que la fusion a eu lieu, l'Etat ne voit pas pourquoi il continuerait à mettre de l'argent dans ces structures."

 

Emilie Zapalski