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Transition énergétique - Les sénateurs votent la généralisation des consignes de tri pour les emballages plastiques et fixent de nouvelles règles pour les éoliennes

Au cours de l'examen en séance du projet de loi relatif à la transition énergétique les 16 et 17 février, les sénateurs ont adopté plusieurs modifications notables en matière d'économie circulaire et d'énergies renouvelables. Ils ont notamment adopté un amendement défendu par Gérard Miquel et le groupe socialiste qui ancre dans la loi le principe de la généralisation à terme de l'extension des consignes de tri à l'ensemble des emballages en plastiques, en donnant une échéance à 2022 pour le déploiement à l'ensemble du territoire. Cette date, qui correspond à la fin du prochain agrément des éco-organismes de la filière des emballages est aussi "celle qui a été identifiée dans le cadre des réflexions en cours suite à l'expérimentation de l'extension comme présentant le bon compromis entre ambition et applicabilité technique, notamment pour l'évolution nécessaire des centres de tri et le développement de débouchés pour les plastiques recyclés issus des nouveaux types d'emballages triés", précise l'exposé des motifs de l'amendement. Selon un amendement d'Evelyne Didier (PC, Meurthe-et-Moselle), la généralisation d'ici 2025 du tri à la source des biodéchets par les collectivités, prévue à l'article 19 du projet de loi, devra être précédée par une étude d'impact, et non plus mesurée après coup. Le Sénat a en outre étendu l'interdiction des plastiques oxofragmentables, qui sont dégradables mais non assimilables par les micro-organismes et non compostables, à l'ensemble des emballages et des sacs. Ils ont aussi adopté un nouvel article, qui avait été inséré en commission, destiné à garantir le principe du "pollueur-payeur" dans la gouvernance des éco-organismes. Il prévoit ainsi que la majorité du capital social des éco-organismes constitués sous forme de sociétés doit être composée des producteurs, importateurs et distributeurs soumis à la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) concernée. Ils ont également inséré un article additionnel afin que l'inscription de la date limite d'utilisation optimale - DLUO - figurant sur les produits alimentaires non périssables soit supprimée. Le Sénat a par ailleurs inscrit l'obsolescence programmée dans le Code de la consommation, suivant ainsi l'exemple de l'Assemblée nationale.

Des éoliennes à 1.000 mètres au moins des habitations

A l'article 23 du projet de loi, qui met en place un dispositif de soutien aux énergies renouvelables, les sénateurs ont adopté un amendement proposé par le gouvernement qui permet aux producteurs dont les installations bénéficient d'un contrat d'achat d'être également rémunérés pour la part de leur production consommée directement sur le site de production, autrement dit pour l'autoconsommation. Ils ont également inséré un article additionnel relatif aux règles d'implantation d'éoliennes par rapport aux habitations. Pour protéger les riverains, ils ont ainsi porté à 1.000 mètres – contre 500 mètres actuellement – la distance à respecter entre une éolienne et des habitations. "Allez donc vous promener près d'une éolienne géante : le bruit est infernal", a dit l'auteur de l'amendement Jean Germain (PS). "De loin, un citadin qui passe, trouvera cela beau et majestueux. Pour les ruraux, ça l'est moins", a-t-il ajouté. "Pour des raisons médicales, la Grande-Bretagne et l'Allemagne ont fixé une distance minimale de 1,5 kilomètre ; les Etats-Unis qui ne sont guère connus pour appliquer le principe de précaution, 2 km", a poursuivi l'élu. "Avec mon amendement, on concentrera les éoliennes dans des zones inhabitées et les parcs atteindront une taille critique. Le monde rural ne veut pas passer par pertes et profits." "Ce qui compte, ce sont les résultats : comment obtenir des éoliennes assez bien acceptées pour éviter l'accumulation des recours", a dit le rapporteur Louis Nègre (UMP).
Pour la Fédération énergie éolienne (FEE), qui regroupe la quasi-totalité des acteurs du secteur en France, cette disposition, si elle était maintenue, "serait catastrophique" et "neutraliserait" toutes les autres mesures favorables à l'éolien adoptées par le Sénat sur ce texte. "Dans des zones d'habitats dispersés, cela peut grever fortement le développement éolien et cette distance de 1.000 mètres n'est basée sur aucune analyse", selon Frédéric Lanoë, président de la FEE, cité dans un communiqué. La FEE, comme le Syndicat des énergies renouvelables (SER), autre organisation professionnelle, demandent donc le retrait de cette mesure. Les professionnels insistent sur le fait que cette disposition "obérerait" l'atteinte de l'objectif, adopté par le Sénat, de 40% d'énergies renouvelables dans le mix électrique à l'horizon 2030.
Les sénateurs ont également supprimé l'article du projet de loi concernant le barème d'indemnisation des propriétaires lésés par l'implantation d'une éolienne. "La systématisation du principe d'indemnisation est inquiétante, qui pourrait être étendue par exemple aux antennes-relais", a estimé Louis Nègre. "En attendant de trouver la bonne rédaction, tenons-nous en au régime de responsabilité de droit commun prévu par le Code civil" qui prévoit qu'"en l'absence d'un accord avec l'exploitant, l'indemnisation est déterminée au cas par cas par le juge civil", a ajouté l'élu des Alpes-Maritimes.

Appels d'offres à venir pour des petits projets d'hydroélectricité

Par ailleurs, Ségolène Royal a annoncé au cours de la séance du 17 février que des mesures seraient prises en faveur de l'hydroélectricité. "J'ai demandé à mes services de préparer des appels d'offres pour des petits projets hydroélectriques ; ils seront bientôt publiés", a déclaré la ministre de l'Ecologie. "Il faut trouver un juste équilibre entre les différents impératifs écologiques, y compris celui de la biodiversité", a-t-elle ajouté, estimant que "les règles du jeu doivent être revues, pour encourager la petite hydroélectricité et la remise en état des moulins [à eau]". Ségolène Royal répondait à Michel Le Scouarnec (CRC, Communiste républicain et citoyen) qui estimait qu'"on n'exploite pas assez le potentiel des moulins : 42 MW à moyen terme en Bretagne, contre 10 MW pour les éoliennes". "Il est dommage qu'ils ne soient pas couverts par les schémas régionaux climat air énergie, à cause des contractants liés à la continuité", a ajouté le sénateur du Morbihan. Il a souligné que dans son département, une société s'était spécialisée dans les turbines hydroélectriques adaptées aux moulins. "Certaines dispositions réglementaires doivent être revues pour permettre l'essor de l'hydrologie de faible chute", a-t-il dit, estimant son potentiel à 260 MW sur tout le territoire national.
"Partout en France, il y avait des moulins, qui embellissaient le paysage tout en produisant de l'énergie", a regretté de son côté Charles Revet (UMP). "Aujourd'hui, on renonce trop souvent à ce genre de projet, parce que les contraintes sont trop lourdes." Selon l'élu de Seine-Maritime, "les moulins n'ont jamais empêché les poissons de remonter à la source" alors qu'"aujourd'hui, on impose des passes à poisson qui renchérissent les projets". "L'Office national de l'eau et des milieux aquatiques bloque tout", a-t-il dit, demandant à la ministre de "rappeler ses responsables à l'ordre".
L'examen du projet de loi au Sénat va se poursuivre jusqu'au 19 février. Il fera l'objet d'un vote solennel le 3 mars.
 

 

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