Nucléaire : la justice administrative freine l'extension de la centrale du Bugey

Le tribunal administratif de Lyon a annulé ce 9 décembre des modifications de documents d'urbanisme permettant l'implantation de deux nouveaux réacteurs nucléaires sur le site EDF du Bugey, dans l'Ain, estimant notamment que les impacts écologiques n'avaient pas été suffisamment pris en compte. A la suite d'une audience le 18 novembre, le tribunal a ainsi donné raison dans sa décision à l'association Sortir du nucléaire Bugey et à plusieurs habitants.

Le site de 150 hectares situé sur la commune de Loyettes, en bordure du Rhône, a été ouvert à l'urbanisation par le biais de ces deux procédures afin de permettre l'implantation, d’ici 2040, des deux nouveaux réacteurs nucléaires à eau pressurisée EPR2, d'une puissance de 1.670 MW chacun, dans le prolongement des quatre réacteurs de 900 MW chacun existant déjà.

Le syndicat mixte Bugey-Côtière-Plaine de l'Ain avait d'abord modifié son schéma de cohérence territoriale (SCoT), lors d'une assemblée délibérante en février 2023. Puis en septembre 2024 la commune de Loyettes a validé une révision de son plan local d'urbanisme (PLU). Mais les juges ont estimé que les retouches apportées au SCoT qui emportent, en particulier, une nouvelle répartition géographique des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l’espace fixée antérieurement ainsi qu’une redéfinition des espaces agricoles inconstructibles, y compris à long terme, auraient dû relever d’une procédure de révision impliquant notamment une phase de concertation en amont de l’enquête publique et non d’une simple procédure de modification.

Concernant le PLU de la commune de Loyettes, le tribunal a jugé que l'analyse des incidences du plan sur l'environnement "présente des insuffisances". Selon l'évaluation environnementale, le territoire communal abrite de nombreuses espèces protégées, parmi lesquelles 104 d'oiseaux et quatre de reptiles, dont la couleuvre verte et jaune. Les terrains concernés se situent de plus au bord des berges du Rhône et à moins de cent mètres de la zone Natura 2000 l'Isle Crémieux, une zone de protection spéciale (ZPS) constituée d'un réseau de petits plans d'eau et de zones humides, qui se distingue par une grande richesse écologique et une forte vulnérabilité, et "n'a pas été prise en compte dans l'évaluation environnementale". Jugeant que ces vices étaient de nature à compromettre l'ensemble de la procédure, le tribunal a prononcé l'annulation des deux documents d'urbanisme.

Le président du syndicat mixte Bugey-Côtière de l'Ain, Alexandre Nanchi, a indiqué à l'AFP qu'il comptait faire appel et demander un sursis d'exécution. Evoquant "une décision regrettable", qui "n'a pas d'impact" et "ne change rien", il a ajouté qu'une procédure de révision était déjà en cours.

La commune de Loyettes a indiqué être en train d'étudier les possibilités de recours. De son côté, EDF assure dans un communiqué que le jugement du tribunal lyonnais "ne remet pas en cause le projet de construction des EPR2 à Bugey (...), ni son planning". "Les différentes procédures requises pour mener à bien le projet et celles conduisant à la mise en compatibilité des documents d'urbanisme reposeront sur une étude d'impact environnemental et feront la démonstration de la bonne application par EDF de la démarche ERC (Eviter/Réduire/Compenser)" relative aux atteintes à l'environnement, est-il ajouté. "Ces différentes procédures donneront également lieu à plusieurs consultations du public et des collectivités et permettront par conséquent d'intégrer les différentes attentes des acteurs du territoire", assure EDF.

 

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