Archives

Patrimoine - Où vont les cloches après leur vol ?

Environ 6.000 cloches d'églises sont protégées au titre des monuments historiques. Et relèvent de la responsabilité des communes. Face aux nouveaux risques liés à la hausse des prix du métal, le ministère de la Culture envisage de nouvelles mesures de protection.

Dans une question écrite, Marie-Jo Zimmermann, députée de la Moselle, s'inquiète que les cloches des églises, qui datent souvent d'avant la Révolution, fassent de plus en plus fréquemment l'objet de tentatives de rachat, compte tenu de la hausse du prix du bronze. Or, "certaines communes ne mesurent malheureusement pas toujours l'intérêt de cet héritage historique". La députée souhaite donc savoir si le gouvernement envisage "de mettre sur pied, au niveau national, une politique tendant à préserver systématiquement les cloches qui datent d'avant la Révolution".

6.000 cloches protégées au titre des monuments historiques

Dans sa réponse, le ministre de la Culture et de la Communication indique qu'environ 6.000 cloches sont protégées au titre des monuments historiques (classées ou inscrites). Plus de 98% d'entre elles remontent à l'Ancien Régime. Elles ont d'autant plus de valeur qu'à la Révolution, les cloches de France ont été saisies, pour la fonte de la monnaie ou de canons, à l'exception d'une seule par paroisse, conservée pour les sonneries civiles. Les deux conflits mondiaux se sont également révélés particulièrement destructeurs pour les cloches (bombardements, confiscation du métal par l'occupant...). Le ministre estime que "compte tenu du nombre des destructions ainsi intervenues depuis deux siècles, on peut considérer que les quelque 6.000 cloches protégées au titre des monuments historiques représentent une part très significative des cloches d'Ancien Régime conservées, d'autant que le transfert, en 1987, de la compétence sur le patrimoine campanaire à la section de la Commission nationale des monuments historiques compétente en matière d'orgues, a permis de reprendre une campagne de protection de ces instruments".
Le ministre envisage néanmoins de demander aux conservateurs départementaux des antiquités et objets d'art, en liaison avec les directions régionales des affaires culturelles (Drac), d'effectuer un recensement des cloches d'Ancien Régime. Les cloches recensées et non encore protégées pourront être présentées à la commission départementale des objets mobiliers en vue de leur inscription au titre des monuments historiques, tandis que les plus remarquables ou les plus représentatives de l'art campanaire seront présentées à la Commission nationale des monuments historiques en vue d'un éventuel classement.

Nouveaux risques

La réponse du ministre confirme que la hausse des prix du métal expose les cloches à de nouveaux risques. Les tentatives de rachat ne sont toutefois pas le principal danger. En effet, les cloches installées dans les églises avant la Séparation sont des objets affectés au culte et elles appartiennent, à ce titre et en tant que biens culturels, au domaine public des collectivités propriétaires. Elles sont donc inaliénables et imprescriptibles, sauf désaffectation cultuelle et déclassement du domaine public préalables. Le vol est en revanche un "risque dont le classement ou l'inscription ne saurait préserver totalement les cloches". Le fait qu'il s'agisse "heureusement d'objets lourds, encombrants et souvent difficiles d'accès" ne suffit pas forcément à les protéger. La réponse ministérielle cite notamment le cas du vol de deux cloches classées dans les Deux-Sèvres, pesant respectivement 260 et 180 kilos et datant de 1542. Une autre cloche - non classée - est également signalée volée en Ariège. Pour éviter d'en arriver à de telles situations, la réponse ministérielle rappelle que ce patrimoine local "relève de la responsabilité des communes et des desservants, avec l'aide et sous le contrôle, lorsque ces cloches sont protégées au titre des monuments historiques, des services du ministère de la Culture et de la Communication".

Référence : Assemblée nationale, question écrite n°94972 de Marie-Jo Zimmermann, députée de la Moselle, et réponse du ministre de la Culture et de la Communication (JOAN du 8 mars 2011).