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Logement - Paris relance prudemment la construction de tours

Disposant désormais d'une majorité absolue sans l'appoint des Verts, le maire de Paris a décidé, après une tentative infructueuse en 2003, de relancer le dossier de la construction de tours. En pratique, il s'agit de remettre en cause la disposition figurant depuis 1977 dans le plan local d'urbanisme (PLU) et qui interdit les constructions d'une hauteur supérieure à 37 mètres, soit environ 10 étages.
Après une longue période d'hésitation, la mairie a finalement choisi une méthode très prudente. Les sondages montrent en effet que les deux tiers des Parisiens, toujours "traumatisés" par la tour Montparnasse et l'urbanisme des années soixante-dix (le Front de Seine), sont hostiles à la construction de tours. La délibération adoptée le 8 juillet ne prévoit donc pas directement la construction de tours, mais concerne le "lancement d'un processus d'études, de débat et de concertation portant sur l'évolution du paysage urbain parisien sur sa couronne". L'exposé des motifs prend d'ailleurs bien soin de resituer le débat dans le cadre plus vaste de l'aménagement urbain. De ce point de vue, la délibération du 8 juillet 2008 ne fait que reprendre, cinq ans plus tard, le vœu émis en novembre 2003 - lors de la première tentative de remise en cause de la règle des 37 mètres - "que la question des hauteurs et de ses liens avec l'architecture contemporaine fasse l'objet d'un débat démocratique associant les élus, les habitants, les associations, les milieux économiques et les communes riveraines concernées".
Mais le débat qui va s'engager aujourd'hui est beaucoup plus directif. La délibération identifie d'ores et déjà plusieurs sites susceptibles d'accueillir des tours. Ils se situent tous à proximité du périphérique (portes de Versailles, de la Chapelle et de Montreuil, quartiers Bercy-Charenton, Masséna-Bruneseau et les Batignolles). D'autres sites pourraient bientôt s'ajouter à cette liste. Au total, les zones susceptibles d'accueillir des tours pourraient représenter environ 10% du territoire parisien.
Cette nouvelle position de la ville ne tient pas seulement au contexte politique issu des dernières municipales. Bertrand Delanoë a en effet indiqué que l'assouplissement des règles de hauteur était indispensable pour atteindre l'objectif de construction de 27.000 logements neufs sur la mandature, soit 4.500 par an au lieu des 3.000 actuels (+50%). Il entend par ailleurs répondre aux reproches - venant notamment de l'Etat - sur le manque de dynamisme de Paris en matière d'aménagement urbain et de développement.
L'assouplissement devrait d'ailleurs être à deux vitesses. Pour le logement social, les nouveaux bâtiments ne dépasseront sans doute pas les 50 mètres (environ 15 étages). Au-delà, la réglementation propre aux immeubles de grande hauteur (IGH) devient en effet applicable, ce qui engendrerait des coûts difficilement supportables par les copropriétaires ou les locataires. En revanche, plusieurs projets mixtes de logements et de bureaux pourraient dépasser les 100 mètres à condition, comme le demande le maire de Paris, qu'il s'agisse "de véritables œuvres architecturales".

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Conseil de Paris, délibération DU-2008-0142 relative au lancement d'un processus d'études, de débat et de concertation portant sur l'évolution du paysage urbain parisien sur sa couronne, adoptée le 8 juillet 2008.