PLF 2009 - Pas de régime de faveur pour les collectivités

Les collectivités retiendront-elles surtout du projet de loi de finances pour 2009 l'absence de réforme fiscale, l'intégration du FCTVA dans l'enveloppe normée, le recentrage de la DSU, le fait que la DGF n'augmentera pas plus que l'inflation pendant au moins trois ans... ou bien la baisse des crédits de missions telles que le logement ou l'emploi ?

Le déficit de l'Etat va continuer à se creuser en 2009, à 52,1 milliards d'euros, après s'être déjà alourdi à 49,4 milliards en 2008, soit nettement plus que les prévisions initiales du gouvernement, selon le projet de loi de finances (PLF) présenté ce vendredi 26 septembre - le premier PLF à s'inscrire dans une perspective pluriannuelle (2009-2011). Le gouvernement ne prévoit également qu'une stabilisation du déficit public (Etat, collectivités locales, comptes sociaux) à 2,7% en 2009. Il ne pense pouvoir commencer à le réduire qu'à partir de 2010 (2%), sans pour autant revenir à l'équilibre en 2012 (0,5%). Il est par ailleurs prévu que la dette de la France grimpe l'an prochain à 66% du produit intérieur brut (PIB), après avoir déjà atteint 65,3% en 2008.
Le gouvernement mise sur un net ralentissement de l'inflation en 2009, à 2%, contre 2,9% en 2008. En termes de croissance du PIB, le chiffre de 1% reste affiché pour 2009. Pour les années suivantes en revanche, Bercy parie sur des conditions économiques nettement plus favorables : une croissance soutenue de 2,5% par an entre 2010 et 2012 qui permettrait une réduction du déficit public de 0,7 point de PIB chaque année.
"La crise est venue d'une manière extrêmement violente mais la reprise peut être extraordinairement forte", a justifié vendredi Eric Woerth, tout en précisant que cette trajectoire ne sera évidemment possible qu'au prix d'une stricte maîtrise des dépenses de l'Etat, qui n'évolueront pas plus vite que l'inflation. Et le ministre des Comptes publics de souligner "que les charges de la dette, les pensions et les prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne et des collectivités territoriales absorbent la totalité de cette marge de manoeuvre".
Le besoin de financement des collectivités locales devrait encore se creuser en 2008 : de 0,4 point de PIB en 2007, il pourrait passer cette année à 0,7 point de PIB. "La dépense locale progresse plus rapidement que le PIB. Il faut arriver à la freiner", a résumé à ce titre Gilles Carrez lors du Comité des finances locales du 25 septembre.

 

DGF indexée sur l'inflation

Pour 2009, l'Etat annonce une enveloppe globale des dotations en faveur des collectivités territoriales de près de 56,3 milliards soit une augmentation de 2 % par rapport à 2008. Les prélèvements sur recettes qui constituent la plus grande part de cette enveloppe (DGF, FCTVA, compensations d'exonérations de fiscalité locale, DCTP...) s'élèveront  à 52,258 milliards d'euros à périmètre constant. La DGF 2009, d'un montant de 40,855 milliards, d'euros ne progressera plus qu'au rythme du niveau d'inflation retenu, soit 2%. Et il en sera de même pour les deux années suivantes.
Pour compenser l'augmentation du FCTVA intégré dans l'enveloppe normée, un certain nombre de compensations d'exonérations sont réduites (la DCTP est diminuée d'un tiers). Le fonds de compensation des baisses de DCTP est clos. Au nombre des bonnes nouvelles, la reconduction du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (500 millions d'euros) et un transfert de TIPP supplémentaire de 322 millions d'euros pour le RSA.
Sous l'intitulé "Relations avec les collectivités territoriales" ou RCT, le budget  (2,33 milliards d'euros) regroupe le reste des dotations de l'Etat qui ont vocation à soutenir  l'investissement local ou à compenser les transferts de charge. Pour les nouveautés, une indemnisation (6,3 millions d'euros) en 2009 des communes pour la délivrance des passeports, la création d'un fonds d'accompagnement au titre de la restructuration des armées (5 millions d'euros)  et  la nouvelle dotation de développement urbain (50 millions d'euros). 

 

Une DSU resserrée

Le projet de loi de finances prévoit que la dotation de solidarité urbaine (DSU), qui dépasse le milliard d'euros en 2008, augmentera de 120 millions d'euros l'année prochaine, conformément au plan Borloo pour 2005-2009. Mais cette dotation, qui bénéficie actuellement à 715 villes sera recentrée sur les communes les plus pauvres. La DSU proprement dite ne progressera que de 70 millions d'euros. Les 50 millions d'euros restants seront affectés à une dotation de développement urbain (DDU) que se partageraient une centaine de villes particulièrement défavorisées. Sensible à la colère des élus locaux des grandes villes et des banlieues, le groupe de travail du CFL consacré à la réforme de la DSU se réunira  fin octobre pour aménager le mécanisme de sortie de la DSU.  Contrairement à ce que l'on attendait, la réforme des valeurs locatives n'est pas dans le projet de loi de finances pour 2009.
En termes de fiscalité locale en revanche, rien de nouveau, mises à part quelques dispositions du côté des mesures fiscales "vertes". Ainsi, la taxe professionnelle n'est pas touchée en 2009, les propos tenus jeudi soir à Toulon par le chef de l'Etat laissant en revanche présager du changement dès l'année suivante. D'ailleurs, sur proposition du gouvernement, un nouveau groupe de travail du CFL se penchera sur la réforme de la taxe professionnelle inscrite au projet de budget pour 2010. Pour le député Charles de Courson, "le gouvernement n'a pas de position sur le fond de la réforme".
De même, alors que certains comptaient trouver une révision des valeurs locatives dans ce PLF 2009, là encore, ce n'est pas pour tout de suite, même si le chantier devrait être abordé avant celui de la TP. En fait, le flou domine encore sur cette question, le gouvernement n'ayant pas encore arrêté sa position : la valeur des biens serait-elle réévaluée à chaque changement de propriétaire ? La valeur vénale serait-elle retenue ? Les élus locaux présents au CFL n'ont pas obtenu d'éclaircissements. "Il n'est même pas sûr que la question soit abordée dans la loi de finances rectificative", indique Gilles Carrez, qui ajoute : "Nous n'avons pas de simulations à l'exception d'une étude portant sur l'Hérault."

 

Le RSA sans l'emploi ?

Globalement, les crédits des ministères resteront en 2009 à leur niveau de cette année. Avec toutefois, comme toujours, des ministères plus mal lotis que d'autres... le tout sur fond de RGPP et de non remplacement de près d'un fonctionnaire d'Etat partant à la retraite sur deux (soit plus de 30.000 postes).
La "réorientation" des dépenses, explique Bercy, témoigne de trois priorités : mise en oeuvre du Grenelle de l'environnemen, enseignement supérieur et recherche, création du revenu de solidarité active. Ainsi, la participation de l'Etat au RSA sera de 582,4 millions d'euros en 2009 (année incomplète, la généralisation étant prévue pour juin), 1,2 milliard d'euros en 2010 et 1,7 milliard en 2011.
En revanche, au moment même où le chômage repart à la hausse, avec "30.000 à 40.000 chômeurs de plus" venus s'inscrire à l'ANPE en août, le budget des actions de l'Etat en faveur de l'emploi et de la lutte contre le chômage sera en baisse de 5,2% en 2009 et encore davantage l'année suivante (-9,1%). Après 12,480 milliards d'euros en 2008, il sera ramené à 11,821 milliards en 2008. L'entourage de la Christine Lagarde a précisé que l'enveloppe allouée au service public de l'emploi, issu de la fusion ANPE-Assedic, augmentera néanmoins de 50 millions d'euros. Selon le gouvernement, "la réduction des moyens traduit les réformes engagées (...) pour l'adaptation à un contexte de chômage plus bas mais parfois plus persistant", avec des contrats aidés reconduits au cas par cas et "recentrés sur les personnes les plus éloignées de l'emploi".
Les crédits de la mission "ville et logement", comme on le craignait, sont eux aussi en baisse : 7,64 milliards d'euros, soit une baisse de 6,9%, suivie d'autres reculs en 2010 et 2011.
Le budget 2009 est un budget "de vigilance", a estimé Eric Woerth vendredi juste avant son audition par la commission des finances de l'Assemblée nationale, tandis que Christine Lagarde évoquait un budget "véridique".

 

C.M. / C.V. / T.B.