Plans sociaux en cascade : les maires de petites villes s'alarment
Face à la multiplication des plans sociaux qui touchent de nombreuses petites villes, l'APVF appelle "à un puissant sursaut collectif" et à "une véritable mobilisation en faveur de la réindustrialisation".
Derrière le coup de massue de la liquidation de Brandt la semaine dernière (lire notre article), de nombreuses villes sont touchées par la cascade de plans sociaux : Billy-Berclau (Pas-de-Calais), Château Thierry (Aisne), Millau (Aveyron), Montbard (Côte-d’Or), Privas (Ardèche), Vendôme (Loir-et-Cher)… Liste non exhaustive qui pousse l’Association des petites villes de France (APVF) à appeler "à un puissant sursaut collectif" et à "une véritable mobilisation en faveur de la réindustrialisation". "Il y a urgence à changer de pratiques", martèle l’association présidée par le maire de Barentin (Seine-Maritime) Christophe Bouillon, dans un communiqué du 15 décembre. Elle plaide pour une gouvernance territoriale "s’appuyant sur la coopération entre collectivités, acteurs économiques et représentants de l’Etat local", souligne l’importance des enjeux de formation et "le problème de la mobilité entre domicile et lieu de travail". Elle demande aussi un "effort massif en matière de simplification des règles de la commande publique", rappelant que 70% de l’investissement public dépend des collectivités. "C’est dans les petites villes que se jouera dans les prochaines années l’avenir industriel du pays", insiste l’APVF, car "ce sont elles qui disposeront du foncier susceptible d’accueillir de nombreuses PME et ETI".
483 plans sociaux en cours
La semaine dernière, la CGT a produit une carte des quelque 483 plans sociaux en cours partout en France avec, à la clé, 107.562 emplois menacés ou supprimés, dont plus de 46.000 pour la seule l’industrie. Depuis un an et demi, la confédération alerte sur la situation. Lors des états généraux de l’industrie de mai 2024, elle avait comptabilisé 130 plans de sauvegarde. Puis 180 en septembre 2024, 250 en janvier 2025 et 400 en septembre. Un nombre qui, selon la confédération, "est certainement bien inférieur à la réalité", alors que la Dares (le service statistique du ministère du Travail comptait "600 plans de suppressions d’emplois pour l’année 2024". "Pourtant alerté à de multiples reprises, le gouvernement n’a pris aucune mesure pour contrer cette hécatombe – au contraire, il poursuit sa politique de l’offre, principale cause de la désindustrialisation du pays", fustige le syndicat.
De son côté, le cabinet Trendeo a comptabilisé 165 sites menacés depuis le mois de septembre contre 120 sur la même période l’an dernier, pour un total de 10.000 emplois concernés. A la différence de l’an dernier, ce ne sont plus les grands groupes qui sont touchés mais leurs sous-traitants, expliquait le directeur du cabinet David Cousquer, dans Les Echos, le 9 décembre, parlant de "détricotage" du tissu des PME-ETI.
"Dans la plupart des plans sociaux ou restructurations d’entreprises, annoncés ces derniers mois, les collectivités territoriales, celles du bloc communal, comme les régions, se sont fortement engagées en faisant jouer plusieurs leviers (rachats de bâtiments ou de terrains, participation et soutien aux coopératives)", souligne l’association.
Un nouveau "choc chinois"
Le gouvernement a dénoncé pour sa part, lundi, la "lenteur" des prises de décision au niveau européen et appelé à un "sursaut face à la concurrence déloyale", sachant que le déficit commercial entre l’Europe et la Chine dépasse à présent les 300 milliards d’euros. Après un premier "choc chinois" suite à l’entrée de la Chine dans l’OMC au début des années 2000, l’Europe vit un "nouveau choc", analyse le dernier baromètre "L’industrie en mouvement", de la Société d’encouragement pour l’industrie nationale. Le durcissement des relations sino-américaines pousse Pékin à "rediriger ses surcapacités vers l’Europe", analyse cette dernière, sur le réseau Linkedin. Le dumping devient "systémique" (subventions massives, crédits bonifiés, injonctions de fonds publics). Enfin, l’Europe fait face à un "choc de compétitivité inédit depuis le Covid", notamment en raison de l'écart des coûts énergétiques… Dans ce contexte, les ministres de l’Economie et de l’Industrie Roland Lescure et Sébastien Martin ont demandé, lundi, "la mise en œuvre rapide d’une préférence européenne ambitieuse dans les secteurs stratégiques, notamment l’automobile" et un renforcement du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MAEC) qui entrera en vigueur au 1er janvier 2026. La France propose ainsi une extension du mécanisme "aux produits à l’aval, un soutien aux exportations européennes, et une taxation à l’échelle des pays producteurs afin d’éviter que des productions dites 'vertes' ne contournent le dispositif alors que l’essentiel de leur production demeure fortement carboné", a indiqué Bercy, lundi, à l’issue de la réunion du Comité exécutif du Conseil national de l’industrie.
Début de réponse mardi sur l'automobile : en assouplissant l'interdiction de la vente des véhicules thermiques après 2035, la Commission a aussi introduit une dose de "préférence européenne" sur l'acier bas carbone.