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Habitat - Politiques du logement : les Français veulent tout... et son contraire

Si le ministère avait commandé au Crédoc une étude sur "Les Français et les attentes en matière de politique du logement" pour conforter sa politique ou la réorienter, cela n'aura pas servi à grand-chose. Il s'avère que les "Français", comme les "territoires", se caractérisent par leur diversité. Les étudiants voudraient plus de logements abordables pour les jeunes actifs, les classes moyennes supérieures plus d'aides à l'accession à la propriété... pas de quoi dégager une "priorité nationale", sinon favoriser une offre de logements... diversifiée.

Le ministère du Logement, de l'Egalité des territoires et de la Ruralité a rendu public, le 9 décembre, un rapport commandé au Crédoc sur "Les Français et leurs attentes en matière de politique du logement". Réalisée en juin 2014 sur un échantillon de 2.000 personnes de 18 ans et plus, l'étude met en évidence des attentes à la fois nombreuses et contradictoires.

Une priorité pour la cohésion sociale

Pour commencer, un point de repère bien établi : le logement constitue, avec l'emploi, la priorité des Français pour garantir la cohésion sociale. Au-delà de ce constat partagé, les choses deviennent plus floues. Ainsi, aucune politique prioritaire ne se détache nettement dans les choix des Français. Favoriser l'accession à la propriété arrive toutefois en tête avec 21% de citations. Viennent ensuite - en rangs serrés - le développement du logement social (18%), l'aide au logement des jeunes actifs (15%), la mobilisation des logements vacants (15%), l'aide à la rénovation des logements anciens (14%) et l'augmentation des aides à la personne (10%).
Les choix exprimés par les Français ne sont évidemment pas sans lien avec la situation personnelle de chacun d'eux. Ainsi, le choix de l'aide à l'accession à la propriété s'observe avant tout dans les classes moyennes supérieures et parmi les personnes en couple et celles ayant entre 25 et 39 ans. Une situation logique lorsque l'on sait que le souhait de devenir propriétaire est souvent lié à la construction d'un projet de couple ou à l'arrivée d'un enfant. Le paradoxe - relevé par le Crédoc - est que les aides à l'accession sont réclamées par les ménages les plus proches de passer à l'acte.
Interrogés sur ce que pourraient être les leviers incitatifs à l'acquisition d'un logement, les ménages plus modestes disent attendre - plutôt que des aides de l'Etat (seulement 6% de citations chez les locataires du parc social et 8% chez ceux du parc privé) - une baisse du prix d'achat des logements (respectivement 17% et 23%) et une attitude plus ouverte des banques (21% et 17%). Sans oublier, bien sûr, une augmentation de leur revenu disponible (25% et 22%).

A chacun sa priorité selon ses besoins

Pour sa part, le soutien au logement social - classé au second rang en moyenne générale - constitue le premier choix des plus de 60 ans, des personnes seules, des retraités, des bas revenus, des habitants de l'agglomération parisienne, de ceux des banlieues et des locataires (du parc public comme du parc privé). Un résultat qui peut sembler paradoxal dans la mesure où certaines de ces catégories ne sont pas les plus concernées par le logement social (personnes isolées, retraitées...).
Sans surprise, l'aide au logement des jeunes actifs arrive en tête... chez les jeunes et plus particulièrement chez les étudiants (28% de citations), tandis que l'aide à la rénovation des logements anciens est jugée prioritaire chez les habitants des zones rurales (18% de citations).
Les aides à la personne arrivent en tête des attentes des personnes à bas revenus. L'étude du Crédoc montre d'ailleurs que les différentes APL (aides personnelles au logement) "sont de fait très bien connues par le grand public (plus de huit personnes sur dix les connaissent très bien ou assez bien), alors que les autres aides sont moins largement identifiées (par exemple 53% des interviewés connaissent le prêt à taux zéro, qui est bien connu par les accédants mais moins bien par les catégories modestes auquel il est destiné, et seuls 14% des Français connaissent l'éco-prêt à taux zéro)".
Enfin, en termes géographiques, les Français attendent que l'action des pouvoirs publics en matière de logement couvre l'ensemble du territoire. Dans un "quatre quarts" presque parfait, les répondants estiment que les pouvoirs publics devraient concentrer leurs efforts en matière de logement plutôt en zone rurale (27%), plutôt dans les banlieues des villes (26%), plutôt dans les centres-ville (22%) et plutôt dans les quartiers sensibles (23%). Une dispersion des réponses finalement très proche de la répartition effective de la population française, établie par l'Insee : 22% en zone rurale, 38% et dans les banlieues et 40% dans les centres urbains...