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Finances - Prêts aux collectivités : le gouvernement précise le dispositif

Intervenant samedi devant les maires de Haute-Savoie, François Fillon a précisé le dispositif - opérationnel dès aujourd'hui - de mobilisation de 3 milliards d'euros de prêts issus des fonds d'épargne de la Caisse des Dépôts. Il est aussi revenu sur la création d'un pôle public dédié au financement des collectivités. Sur la réforme des collectivités, rien de nouveau : un peu de souplesse sur les délais, mais pas de moratoire.

Alors même que le gouvernement se préparait à un week-end studieux pour arbitrer les nouvelles mesures devant permettre à la France de maintenir ses objectifs de réduction du déficit public (voir notre article de ce jour consacré à ce plan de rigueur), c'est devant des maires, ceux de Haute-Savoie, que François Fillon s'est exprimé samedi 5 novembre. Le Premier ministre a profité de cette allocution pour prévenir que "le budget 2012 sera l'un des budgets les plus rigoureux que la France ait connu depuis 1945". Et pour dresser à ces maires réunis en assemblée générale à Morzine un vaste panorama économique de la France et de l'Europe en crise. Il s'en est d'ailleurs expliqué : "En vous parlant de la crise, en vous parlant de l'Europe et du G20, je vous parle comme je parle aux élus de la nation. Parce que pour moi, il n'y a pas d'un côté l'Etat et de l'autre les collectivités locales qui s'affronteraient dans une sorte de remake de l'époque féodale." Une entrée en matière permettant au chef du gouvernement d'insister ensuite sur le fait qu'"un effort collectif s'impose" en matière de dette publique et que "l'Etat s'endette en partie pour financer les dotations de fonctionnement qu'il verse" aux collectivités…
C'est il y a un mois presque jour pour jour que François Fillon avait annoncé, à Richelieu devant les maires d'Indre-et-Loire, la mise en place d'une enveloppe de 3 milliards d'euros de prêts aux collectivités (voir ci-contre notre article du 7 octobre). Cette fois encore, à Morzine, l'accès des collectivités aux financements bancaires a été le principal objet de son intervention. Tout d'abord pour rappeler l'existence de la charte de bonne conduite signée entre les établissements bancaires et les collectivités en décembre 2010, ainsi que la fonction de médiateur confiée à Eric Gissler en novembre 2009. Tout en relevant au passage que "cette médiation est beaucoup trop peu sollicitée" par les collectivités à y recourir davantage. On notera toutefois qu'Eric Gissler devait également préparer un rapport sur les emprunts toxiques souscrits par les collectivités, rapport dont on est pour l'heure sans nouvelles. "Ce rapport nous permettrait d'identifier la masse de ces emprunts. Nous avons écrit en mai dernier à Christine Lagarde pour demander ce rapport, avons récemment renouvelé la chose auprès de François Baroin… Visiblement, ce rapport n'existe pas", relevait il y a quelques jours Jacques Pélissard, le président de l'Association des maires de France (AMF).

"Disposer d'un diagnostic fiable"

S'agissant de la mobilisation de 3 milliards d'euros issus des fonds d'épargne de la Caisse des Dépôts, François Fillon a précisé le dispositif prévu, lequel est désormais opérationnel. Vendredi soir, un communiqué commun des ministres François Baroin, Xavier Bertrand et Philippe Richert en avait fait de même, alors que venait de se dérouler l'adjudication aux banques. Les prêts seront en effet distribués pour moitié directement par la Caisse des Dépôts et pour moitié par les banques commerciales, Bercy précisant que tous les établissements ayant répondu à l'adjudication ont été servis.
Ces prêts d'une durée de 2 à 15 ans et d'un montant maximum de 75 millions d'euros, destinés à financer des opérations d'investissement inscrites au budget 2011, pourront aussi éventuellement concerner des opérations relevant des budgets 2012 – mais à condition que le prêt soit engagé avant le 31 mars 2012 et dans la limite de 20% de l'enveloppe globale de 3 milliards. "Quatre types de prêts à taux fixe et à taux variable seront offerts, afin de donner un maximum de flexibilité aux collectivités locales dans la gestion de leur emprunt", a expliqué François Fillon. Le communiqué des ministres précise de son côté qu'il s'agira d'emprunts à taux variables indexés soit sur le taux du livret épargne populaire, soit sur l'euribor, soit sur l'inflation, et d'emprunts à taux fixe. En sachant que "le taux fixe pour des prêts à 15 ans sera d'environ 4,5%", selon le chef du gouvernement (pour en savoir plus, voir ci-contre notre fiche d'information à télécharger).
François Fillon a par ailleurs indiqué avoir "souhaité que la Caisse des Dépôts et les établissements partenaires dressent un état précis de la situation du financement des collectivités locales au 30 novembre, afin que nous puissions disposer d'un diagnostic fiable permettant, le cas échéant, de majorer l'enveloppe initialement prévue, si cela s'avère nécessaire."

"Pas de moratoire"

Soulignant que cette enveloppe ne constitue qu'une réponse "conjoncturelle", le Premier ministre a par ailleurs évoqué la réponse cette fois "structurelle" que représente la création d'un "pôle public de financement des territoires autour de la Banque postale et de la Caisse des Dépôts". Le futur "établissement public spécifiquement dédié au financement des collectivités" donnera accès à "une offre de financement qui soit à la fois simple et transparente", a déclaré François Fillon, avant d'ajouter : "Nous voulons que cette offre constitue une référence de bonnes pratiques sur le marché, pour les banques commerciales qui pourraient continuer à prêter aux collectivités locales."
Comme il l'avait fait dans l'Indre-et-Loire, François Fillon a conclu son intervention de samedi en revenant assez longuement sur la réforme territoriale, avec à peu près les mêmes éléments d'information. Sur l'intercommunalité, il a ainsi confirmé avoir accepté de "donner de la souplesse" dans l'élaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale. Alors même que la proposition de loi Sueur venait d'être adoptée au Sénat (voir notre article de ce jour), le propos gouvernemental n'a pas varié : "Les commissions départementales de coopération intercommunales seront à nouveau consultées par le préfet sur les évolutions du projet de schéma qui interviendraient au-delà du 31 décembre prochain" et, "à ce stade il n'est pas nécessaire de modifier la loi pour prendre le temps de discussions approfondies". De même, s'agissant du conseiller territorial, le Premier ministre a redit que le redécoupage des cantons aura lieu "au deuxième semestre 2012". Et a, surtout, jugé bon de réaffirmer : "Il n'y a pas de moratoire sur la réforme des collectivités territoriales."