Manuel Valls présente son projet de loi pour lutter contre la vie chère en outre-mer

Annoncé au mois de mars, le projet de loi visant à lutter contre la vie chère en outre-mer a été présenté en conseil des ministres, le 30 juillet. Il repose sur quatre titres : agir sur le pouvoir d’achat et compenser les effets de l’éloignement ; renforcer la transparence ; renforcer la concurrence ; soutenir le tissu économique ultra-marin. Il sera débattu en séance au Sénat les 29 et 30 septembre.

Après une année marquée par de nombreuses secousses en outre-mer, Manuel Valls a présenté en conseil des ministres, mercredi 30 juillet, son projet de loi visant à lutter contre la vie chère. Annoncé par le ministre lors d’un déplacement aux Antilles au mois de mars (voir notre article du 19 mars), le texte s’inscrit dans un "plan de bataille complet et structurel" avait-il dit alors. Ce plan global, au cœur du comité interministériel qui s’est tenu le 10 juillet (voir notre article du 11 juillet), s’est déjà traduit par une circulaire envoyée aux préfets pour enclencher une "transformation économique" de ces territoires (voir notre article du 21 juillet). Un décret sur le "passeport retour" sera publié dans les "prochaines semaines", annonce le cabinet du ministre. Le problème de la vie chère constitue une "priorité" pour le ministre et le gouvernement, assure la même source, car "les différentiels de prix se sont creusés". Dans l’alimentation, les écarts avec la métropole sont de 30 à 40%.

Le texte vise à s’attaquer à l’ensemble des éléments qui expliquent ces écarts. Il reprend nombre de propositions formulées par les parlementaires ces derniers mois, que ce soit la députée Béatrice Bellay (Martinique), la sénatrice Audrey Bélim (La Réunion) ou le sénateur Victorin Lurel (Guadeloupe). Ou encore les travaux que la sénatrice Micheline Jacques (Saint-Barthélémy) s’apprête à présenter.

Quatre titres

Il s’articule autour de quatre titres : agir sur le pouvoir d’achat et compenser les effets de l’éloignement ; renforcer la transparence ; renforcer la concurrence ; soutenir le tissu économique ultra-marin.

Pour faire baisser les prix, l’article 1 vise à exclure le prix du transport sur le seuil de revente à perte. L’article 2 vient renforcer le "bouclier qualité prix" (BQP). Créé par la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, le BQP fait l’objet chaque année d’une négociation entre l’Etat et les acteurs économiques locaux pour garantir des prix modérés sur une liste de produits. Le projet de loi fixe un objectif de réduction des prix et non plus seulement de modération, et l’élargit aux services tels que les abonnements téléphoniques, les frais bancaires, l’entretient automobile…  Il introduit également un principe de "Name and Shame" : les entreprises qui ne respecteraient pas l’accord se verraient appliquer une astreinte journalière avec publicité négative.

L’article 3 renforce les observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). L’article 4 propose d’expérimenter en Martinique un "e-hub", sorte de service de gestion logistique pour le e-commerce. Enfin, l’aricle 5 habilite le gouvernement à légiférer par ordonnance pour compenser les frais d’approche. Le Conseil général de l'économie a été missionné en ce sens. Il rendra ses conclusions en août.

"Big bang" de la transparence

Alors que les travaux parlementaires ont mis en lumière la formation d’oligopoles de la grande distribution (voir notre article du 15 novembre 2024), le texte entend s’attaquer aux manques de transparence et de concurrence. Le cabinet du ministre évoque même un "big bang" de la transparence : renforcement des moyens de la DGCCRF (répression des fraudes), redistribution des marges indues (article 6), transparence sur le montant des marges arrières (article 7) et sur les conditions générales de vente (article 8). Les sanctions contre les entreprises qui ne respecteraient pas ces règles seront renforcées avec des astreintes pouvant aller jusqu’à 5% du chiffre d’affaires moyen journalier (article 9).

Le texte propose d’abaisser de 50 à 25% le seuil de part de marché à partir duquel les commissions d’aménagement commercial pourront saisir l’autorité de la concurrence (article 12). Autorité de la concurrence qui sera par ailleurs "outremérisée" avec deux membres supplémentaires choisis pour leur compétence des territoires ultramarins (article 10).

Enfin, le texte vise à encourager la production locale (article 14) et à faciliter l’accès des PME ultramarines à la commande publique (article 15). 

Le projet de loi sera débattu en commission au Sénat à partir de la mi-septembre, puis en séance les 29 et 30 septembre. Aucune date n’est pour le moment prévue à l’Assemblée.

L’octroi de mer, souvent pointé du doigt comme élément de renchérissement des prix, n’est pas abordé dans ce texte mais il n’en est pas moins dans le viseur du gouvernement. "Nous ne le toucherons pas sans concertation" dans la mesure où il constitue une ressource importante pour les collectivités, indique-t-on au ministère. Des mesures pourraient figurer dans le projet de loi de finances. 

 

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