Rentrée scolaire : le ministère et les régions annoncent leurs priorités
Deux conférences de presse successives, l'une de la ministre de l'Éducation, Élisabeth Borne, l'autre de la commission de l'éducation de Régions de France, ont permis de pointer les sujets chauds de la rentrée scolaire 2025 pour les collectivités.

© @education_gouv et Régions de France/En haut : conférence de rentrée d'Élisabeth Borne. En bas : François Bonneau et Valérie Debord lors de la conférence de presse de rentrée de Régions de France
Si aucune rentrée scolaire ne ressemble à une autre, celle de ce 1er septembre 2025 a connu ses particularités. Quelque douze millions d'élèves sont bien rentrés en classe. Certains cependant, dans plusieurs départements du sud-est, ont vu leur école rester fermées en raison des fortes intempéries attendues. Quant à la crise des recrutements d'enseignants à l'œuvre depuis plusieurs années, elle a peu perturbé cette rentrée. "99,9% des postes sont bien pourvus dans le premier degré", a assuré Élisabeth Borne sur RTL, et il n'y a "quasiment pas de postes non pourvus dans le second degré". La ministre l'Éducation nationale a toutefois reconnu qu'"il y a comme chaque année des heures d'enseignement qui ne sont pas totalement couvertes". Des heures qui représenteraient selon elle 0,7% du total et "l'équivalent de 2.500 enseignants".
Cette rentrée scolaire 2025 est encore marquée par de fortes incertitudes. Incertitudes politiques avant tout, car à une semaine d'un vote de confiance à l'Assemblée nationale qui peut renverser le gouvernement, de nombreuses réformes et expérimentations en cours dans le champ de l'éducation pourraient purement et simplement disparaître dans les prochains mois. Incertitudes budgétaires également, car si l'avenir du gouvernement est plus qu'incertain, celui du budget suit naturellement la même tendance.
Bâti scolaire : l'investissement en question
Lors d'une conférence de presse tenue le 28 août, les membres de la commission de l'éducation de Régions de France n'ont pas manqué de souligner leur inquiétude. Certes, avec près de 8 milliards d'euros consacrés à l'enseignement secondaire et supérieur, les budgets des régions consacrés à l'éducation "ont globalement été maintenus pour cette rentrée 2025 malgré les restrictions budgétaires imposées par le gouvernement". Mais, ont-ils alerté, "si elles ne sont pas remises en cause, les décisions du Premier ministre pour le budget 2026 conduiront immanquablement à moins d'investissement [... ]." Dans leur ligne de mire : les difficultés de financement des bâtiments. "Continuer la rénovation énergétique, financer les nouvelles formations, végétaliser les cours… tout cela nécessite des moyens en investissement et en fonctionnement. Ces moyens ne peuvent être retirés aux régions. Nous refusons d'être la variable d'ajustement des erreurs de gestion de l'État", a rappelé François Bonneau, président de la commission de l'éducation de Régions de France.
De son côté, Élisabeth Borne n'a pas manqué de pointer, à l'occasion de sa conférence de presse de rentrée le 27 août, que "les épisodes de canicule nous rappellent l'urgence d'agir pour préparer nos écoles". Elle a alors précisé que "pour anticiper et ne pas revivre les difficultés que nous avons connues au mois de juin (lire notre article du 30 juin 2025), nous finalisons actuellement un plan Canicule et j'ai demandé aux recteurs que ce plan puisse être adapté aux réalités locales en lien avec les préfets et les collectivités en charge du bâti scolaire". Sur la question des moyens financiers, la ministre a renvoyé vers le fonds vert, dont "les enveloppes dédiées à la rénovation des écoles ont bien été préservées", et vers les contrats de performance énergétique de la Banque des Territoires. "Les collectivités avec lesquelles j'ai pu évoquer ce dispositif confirment qu'il marche", a confié Élisabeth Borne.
Orientation : pour une nouvelle étape de décentralisation
Autre priorité pour les régions : la sécurité des établissements, pour laquelle des investissements sont "indispensables", et qui doit se faire en partenariat avec l'Éducation nationale et en lien avec les forces de l'ordre, a rappelé Kamel Chibli, président délégué de la commission. La sécurité était précisément au cœur d'un récent déplacement Élisabeth Borne à Angers, au cours duquel la ministre a précisé que les fouilles aux abords des établissements pour détecter d'éventuelles armes blanches allaient "se poursuivre" et qu'une "nouvelle instruction" serait envoyée "pour s'assurer que cette mobilisation continue".
Autre sujet : l'orientation et la formation, piliers des politiques des régions en matière d'éducation. En réponse à Élisabeth Borne, qui a reconnu qu'il fallait "aux côtés des régions", accélérer la transformation de la carte des formations professionnelles en renforçant les partenariats avec les acteurs économiques, mais aussi permettre à chaque jeune d'accéder aux évènements organisés par les régions via la plateforme Avenir(s) de l'Onisep, les représentants de Régions de France n'ont pas manqué, lors de leur rendez-vous de rentrée, de constater que subsistaient quelques "irritants", tel le "doublon manifeste" que constitue justement à leurs yeux la plateforme "Avenir(s)" de l'Onisep, ou celui des bureaux des entreprises dont l'action, une nouvelle fois, "doublonne avec celle des régions". Sur ces sujets, François Bonneau déplore que "le partage des compétences reste imparfait entre l'État et les collectivités" et demande "de nouvelles étapes de décentralisation".
Portables : une pause numérique sans moyens
Au-delà des préoccupations partagées avec les régions, Élisabeth Borne s'est exprimée durant sa conférence de presse sur le "fléau de la surexposition aux écrans" et a confirmé que dès cette rentrée, le dispositif "portables en pause" entrerait pleinement en vigueur au collège. Sur RTL, elle a précisé qu'"il appartient à chaque chef d'établissement de trouver la bonne solution en lien avec le conseil départemental", mais sans préciser si l'État compenserait les dépenses qui pourraient en découler. De son côté, Départements de France, qui a chiffré à 130 millions d'euros le coût d'installation de casiers sécurisés dans les collèges (lire notre article du 2 septembre 2024), a confié à Localtis que les collèges ne faisaient pas actuellement de demandes spécifiques en ce sens aux conseils départementaux et que les portables continueraient de demeurer, en théorie, dans les sacs des élèves.
Carte scolaire : le préfet entre en scène
La rentrée scolaire 2025 est encore marquée par la mise en place de cinq cents pôles d'appui à la scolarité (PAS), censés répondre, selon Élisabeth Borne, "plus vite et mieux aux besoins des élèves" en situation de handicap (notre article du 20 juin 2025). La ministre a également confirmé la généralisation des PAS sur tout le territoire à la rentrée 2027, et ce malgré l'absence d'une évolution législative pourtant indispensable comme l'a rappelé un rapport de l'IGESR (inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche) (lire notre article du 5 mars 2025). Interrogée sur ce point, Élisabeth Borne a déclaré qu'"on peut avancer sans avoir immédiatement une base légale. C'est ce qu'on a fait en lançant ces pôles à la rentrée 2024." Toujours à propos de l'école inclusive, la ministre a annoncé le lancement, dès cette rentrée, d'une expérimentation conduite dans trois départements visant à renforcer l'intégration des AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap) dans les équipes pédagogiques et à assurer une plus grande continuité de leurs missions grâce à leur rattachement à un établissement unique.
Enfin, l'année scolaire 2025-2026 sera marquée par deux autres évènements. Fin novembre, la convention citoyenne sur les temps de l'enfant soumettra ses propositions, et début 2026 verra une nouveauté : l'intervention du préfet dans l'établissement de la carte scolaire. Aux termes d'un décret publié le 31 juillet 2025, le préfet de département, saisi de la proposition de carte scolaire du directeur académique des services de l'Éducation nationale (Dasen), devra en effet émettre un avis au plus tard huit jours après la réunion du conseil départemental de l'Éducation nationale. Cette participation obligatoire des préfets à l'élaboration de la carte scolaire intervient dans un contexte de baisse démographique. Près de 100.000 élèves en moins étaient répertoriés en cette rentrée par rapport à 2024, tandis que le syndicat FSU-Snuipp fait état de la disparition de 2.000 classes dans le primaire.