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Sport - Un label pour les stades des clubs professionnels de rugby

Le comité directeur de la Ligue nationale de rugby (LNR), réuni le jeudi 7 juin, a adopté le dispositif "Label stades LNR". Ce label se veut à la fois un centre de ressources sur les stades de rugby mis à disposition des porteurs de projets (clubs, collectivités locales, sociétés privées…), et un guide d'évaluation aux niveaux progressifs. Il est donc conçu comme "un guide de recommandations, susceptible d'être intégré au cahier des charges d'un projet, mais également comme un guide de performance, à partir duquel les stades accueillant des matchs de rugby professionnel seront évalués". Pour la LNR, ce label "adopte une vision à long terme destinée notamment à rationaliser les investissements, et anticipe les besoins liés aux évolutions du rugby professionnel".
Tout stade utilisé par un club professionnel (en Top 14 ou Pro D2, soit trente clubs au total) et pour lequel celui-ci dispose d'un droit de propriété ou d'une convention de mise à disposition prioritaire est éligible au label. Le label visé pourra être le label "Elite" ou le label "Pro". Tous deux comprennent 159 critères relevant des caractéristiques générales du stade, de la zone compétition, de la zone grand public, de la zone médias, de la zone VIP et d'autres critères (valorisation des démarches entreprises par le club et/ou sa collectivité locale dans le cadre de l'augmentation de la performance globale de l'enceinte). Le label pourra être demandé à compter de la saison 2012/2013 par les clubs de Top 14 et à partir de la saison 2013/2014 ceux de Pro D2. Il sera attribué jusqu'au 30 juin 2017.

"Soutien des pouvoirs publics"

Cette décision de la LNR fait suite à la tenue de son premier colloque consacré aux stades, en novembre 2010. Le document de synthèse expliquait alors que "le rugby professionnel français est à un tournant dans son développement, plus de dix ans après son passage au professionnalisme, et les stades sont au coeur de celui-ci". La LNR pointait du doigt une capacité d'accueil des stades "devenue insuffisante", des conditions d'accueil qui "ne sont pas, dans de nombreux stades, adaptées aux besoins des acteurs du jeu, des médias et du grand public", et des infrastructures qui "ne répondent pas aux besoins de développement des ressources". La LNR s'était alors fixé l'objectif de disposer d'enceintes d'une capacité d'au moins 20.000 places assises en Top 14 (seul un stade sur quatorze répond aujourd'hui à cette norme) avant de conclure : "Enfin, le rugby, compte tenu de sa place et de son impact, est également en droit d'attendre un soutien des pouvoirs publics dans l'effort de modernisation de ses enceintes."

Conséquences financières

Si l'obtention du label n'a pas de caractère obligatoire, elle aura à terme des répercussions financières pour les clubs. Le dispositif prévoit en effet, à partir de la saison 2014/2015 en Top 14 et 2015/2016 en Pro D2, la création d'un "Fonds Label stades LNR" dont les ressources seront issues de la commercialisation des droits télé et des droits marketing et dont le montant augmentera de façon progressive. Les clubs qui n'obtiendraient pas le label seraient donc écartés de la répartition d'une partie des recettes de la ligue allant jusqu'à 15% du total. Par ailleurs, la LNR précise qu'"outre l'obtention de ce label, les clubs de Top 14 devront également, pour bénéficier de leur part du fonds, disposer au sein de leur stade d'un éclairement horizontal moyen de 1.400 lux et de 10.000 places assises". Or ces critères posent problème en termes juridiques. En 2003, le Conseil d'Etat avait précisé que "les exigences dictées exclusivement par des impératifs d'ordre commercial comme celles qui touchent à la contenance minimale des espaces affectés à l'accueil du public pour chaque type de compétition ou la détermination de dispositifs électriques et d'installations ayant pour seul objet de favoriser la retransmission télévisée ou radiophonique des compétitions, excédent le champ des compétences des fédérations titulaires d'une délégation […]. En ces domaines, elles ne peuvent intervenir que par voie de recommandations dépourvues de caractère obligatoire". Et ce qui vaut pour les fédérations vaut a fortiori pour les ligues professionnelles qui en sont issues.
Au-delà du problème récurrent des normes sportives, l'instauration du label devrait avoir des répercussions notables sur les collectivités locales. Seuls les stades du Stade toulousain et de Clermont appartenant aux clubs qui les utilisent, les autres clubs se tourneront inévitablement vers la collectivité propriétaire du stade pour financer les mises aux normes nécessaires à l'obtention du label. Sans cela, leurs recettes seraient revues à la baisse et leur compétitivité - donc leur survie en tant que club professionnel - remise en question à moyen terme. Toutes ces questions seront évoquées le 27 juin prochain lors d'une rencontre entre l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes) et la LNR.