Verdissement de la commande publique : un bilan d'application de la loi Agec et des pistes d’évolutions

Faire des achats publics un levier de transformation vers un modèle d’économie circulaire, c’est tout l’objectif porté à travers l’application de l’article 58 de la loi Agec, dont un premier bilan vient d’être dévoilé. Suite à ce retour d’expérience, trois textes réglementaires (un décret et deux arrêtés) ont été élaborés pour ajuster le dispositif et font l’objet d’une consultation publique jusqu’au 15 septembre prochain.

Dans un projet de décret, soumis à consultation publique jusqu’au 15 septembre prochain, le ministère de la Transition écologique envisage d’incorporer de nouvelles catégories de produits ainsi que les objectifs afférents dans le dispositif mis en oeuvre depuis mars 2021 en application de l’article 58 de la loi Agec pour verdir la commande publique. État et collectivités territoriales doivent en effet montrer l’exemple en privilégiant dans leurs achats les biens issus des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage, dans des proportions qui varient, selon le type de produit.

C’est actuellement le décret n°2021-254 du 9 mars 2021 qui prévoit que l’obligation s’applique à 17 familles de produits avec des seuils minimaux d’acquisition dans une fourchette comprise entre 20 et 40%. Il fixe en outre un rendez-vous pour en réaliser un premier bilan, deux ans après l’adoption du dispositif, afin d’en évaluer l’impact sur les pratiques des acheteurs, sur l’accroissement de l’offre des fournisseurs, et sur le plan environnemental. Cette évaluation pilotée par le Commissariat général au développement durable a fait l’objet d’un rapport, présenté le 4 juillet dernier, qui propose une série de recommandations "pour en améliorer l’application et la portée". Plusieurs textes réglementaires (un décret et deux arrêtés) soumis à consultation font écho à certaines de ces propositions. 

Des résultats encore timides 

L’objectif est clair : "Le poids économique que représentent les achats effectués par l’État et les collectivités territoriales doit contribuer à accélérer le changement des modèles de production afin de réduire les déchets et mieux préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat, en envoyant un signal fort à tous les acteurs économiques et en créant des débouchés pour une offre plus durable, créant par ailleurs un effet d’entraînement vis-à-vis des achats privés", rappelle le ministère. L’article 58 de la loi Agec constitue donc "un premier pas" vers la mise en œuvre de pratiques structurantes, à mettre en perspective avec la généralisation des considérations environnementales en 2026, prévue par la loi Climat et Résilience, et son appropriation devrait en outre être facilitée par l’appui du Plan national pour des achats durables (PNAD) 2022-2025.

Malgré des résultats "parfois timides" sur certaines catégories de produits, "le dispositif tend de plus en plus à se faire connaître et à produire des effets tant sur le développement de la demande que sur l’offre de produits issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées", note le rapport d’évaluation. Et "certains acheteurs sont d’ores et déjà bien engagés dans l’application des dispositions sur certains segments d’achat (fournitures de bureau, papier d’impression, véhicules)", relève-t-il. Pour certaines famille de produits (sacs d’emballage, papier d’impression, véhicules, mobilier urbain, bâtiments préfabriqués), la part de dépenses déclarée dépasse ainsi le seuil imposé par le dispositif. À l’exception de la famille 17 (bâtiments préfabriqués), la part de dépenses déclarée en réemploi et réutilisation "est globalement très faible". En revanche, s’agissant des produits pour lesquels est imposé un pourcentage d’intégration de matières recyclées, les résultats sont "sensiblement plus élevés". 

Nouveaux entrants 

Pour accroître la part des acquisitions de biens issus de l'économie circulaire par les acheteurs publics de l’État et des collectivités territoriales, le projet de texte abroge le précédent décret n°2021-254 et ajuste - à compter de 2024 - la liste des produits visés ainsi que, pour chacun d'eux, la part minimale des acquisitions qui doit être issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage. Le dispositif devrait en outre gagner en lisibilité. La présentation en deux colonnes au sein du tableau en annexe affiche désormais les proportions minimales de montant annuel d’acquisition de biens issus du réemploi ou de la réutilisation (première colonne) ou comportant des matières recyclées (seconde colonne). L’utilisation des codes CPV (Common Procurement Vocabulary ou vocabulaire commun pour les marchés publics), identifiée comme un frein à la bonne appropriation du dispositif, paraît aussi en passe d'être abandonnée au profit d’une dénomination générique. 

La liste détaillée des produits relevant de chaque catégorie de produits est fixée par un projet d’arrêté lui aussi en consultation. On y relève de nouveaux entrants : tablettes et vidéoprojecteurs, pièces détachées des bicyclettes ou trottinettes, lampes de bureau, équipements de collecte des déchets (poubelles, conteneurs, bacs à déchets...), matériel sportif (raquettes, filets, tapis de sol, ballons, cages, paniers, tremplins, etc.), ou encore matériel d’entretien des espaces verts et de la voirie (tondeuses, débroussailleuses, broyeurs de végétaux, outillages). 

Le décret fixe également une progression pluriannuelle de ces pourcentages jusqu’en 2030 (avec une étape intermédiaire en 2027). Ces acquisitions pourront être réalisées via un achat public à titre principal ou accessoire. 

Autre nouveauté, le texte donne la possibilité de comptabiliser les biens acquis via un don. Un projet d’arrêté associé détermine la grille de valeur forfaitaire permettant cette comptabilisation des acquisitions de dons dans l’atteinte des objectifs. 

Notons que le texte rajoute par ailleurs les sacs poubelles en plastique à usage unique aux produits pouvant faire l’objet d’une exemption à l'interdiction d'acquisition par l'État de produits en plastique à usage unique.

Un nouveau bilan du dispositif est prévu d’ici le 31 décembre 2026, et pourrait donner lieu, le cas échéant, à de nouveaux ajustements. 

 

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