Aide à domicile : la baisse du financement conduirait "mécaniquement" à un surcoût pour la puissance publique, selon une étude
Publiée par Adédom et l'Ocirp, une étude alerte sur l'impact économique et social qu'aurait une diminution des investissements dans l'aide à domicile. Les territoires ruraux pourraient être en particulier durement atteints, tant sur la diminution de l'emploi dans le secteur que sur la dégradation de l'accès à des solutions adaptées pour les personnes fragiles et leurs proches.
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Une baisse du financement de l'aide à domicile pourrait coûter cher aux territoires et aux familles, soutiennent Adédom et l'Ocirp, dans un contexte d'inquiétude sur les finances publiques et alors que le secteur est déjà fragilisé. La fédération de structures non lucratives de l'aide à domicile et l'union d'organismes de prévoyance viennent de publier les résultats d'une étude destinée à objectiver l'impact économique et social du secteur.
Quelque 226 millions d'heures d'aide à domicile seraient actuellement dispensées chaque année par des organismes prestataires – publics et privés, à but lucratif ou non – auprès de 1,8 million de personnes en situation de fragilité (handicap ou perte d'autonomie), selon cette étude qui a été réalisée par les cabinets Eurogroup Consulting et Koreis Conseil. Cela représente en moyenne, pour chacun des 1.254 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en France, 303.000 heures, 189 emplois en ETP et 4,95 millions d'euros de retombées économiques pour les acteurs publics et privés.
Une perte de 2,5% à 7,5% des emplois du secteur selon les territoires
Mais ni ces heures d'aide, ni les fragilités (poids des personnes en perte d'autonomie notamment) ne sont distribuées de façon uniforme sur les territoires. Les auteurs de l'étude distinguent ainsi trois profils de territoire "selon leur niveau d’exposition au risque de contraction de l’offre d’aide à domicile". Un territoire de type "résilient", bénéficiant de plusieurs facteurs favorables (politique locale engagée, vieillissement de la population moins rapide, niveau de vie élevé des habitants, territoire urbain ou périurbain favorisant des "alternatives pour les bénéficiaires") pourrait ne souffrir que d'une baisse de 2,5% de son nombre d'emplois par an, en cas de contraction de l'offre. Un territoire "exposé" au regard de certains facteurs (caractéristiques socio-économiques et démographiques ou politique locale) pourrait perdre 5% de ses emplois par an. Enfin, un territoire "très exposé" (rural "la plupart du temps", cumulant caractéristiques défavorables et "politique locale défavorable") pourrait subir une baisse annuelle de 7,5% de l'emploi dans le secteur et souffrirait d'un accès dégradé à l'offre.
Les auteurs de l'étude projettent ces scénarios sur les deux territoires que sont la métropole d'Orléans, territoire "exposé" pour lequel une contraction du secteur pourrait entraîner la perte de 99 emplois (hypothèse de 5%), et la Communauté de communes de Caux-Austreberthe (Seine-Maritime), territoire "très exposé" où 10,6 emplois pourraient disparaître (hypothèse de 7,5%).
Un surcoût net pour la puissance publique, en cas de désinvestissement
Au-delà des conséquences sur l'emploi, l'étude documente l'impact d'un recul de l'aide à domicile pour les personnes âgées et handicapées et leurs aidants. "En scénario dégradé, la réduction de l'accès à l'aide à domicile entraîne une intensification du recours au système de santé, une entrée en institution plus précoce pour la personne âgée et une hausse des absences professionnelles pour l'aidante", indiquent les auteurs, qui estiment que le surcoût serait de 87.000 euros (dont 41.000 euros pour la puissance publique) par rapport au scénario nominal, sur douze ans d'un parcours de vie type d'une personne âgée en perte d'autonomie.
En prenant en compte 25.000 euros d'économies réalisées sur l'aide à domicile, "1 euro désinvesti en matière d’aide à domicile se traduit par 3,50 euros de dépenses supplémentaires", dont 1,75 euro pour la personne âgée et ses proches et 1,55 euro pour la puissance publique, concluent les auteurs. Concernant les personnes handicapées, 1 euro désinvesti entraînerait 2,30 euros de coûts supplémentaires, dont 1,91 euro pour la puissance publique.
Autrement dit, "la baisse des financements conduit mécaniquement à un transfert massif des dépenses vers des solutions plus coûteuses", affirment Adedom et l'Ocirp, qui appellent les pouvoirs publics à préserver voire renforcer l'aide à domicile tant pour les personnes et leurs proches, que pour l'équilibre des territoires et les finances publiques.