Budget 2026 : le sénateur Bernard Delcros alerte sur les risques qui pèsent sur le fonds d'aménagement du territoire (FNADT)

À quelques jours de la présentation des orientations budgétaires pour 2026, le sénateur Bernard Delcros, rapporteur spécial, s'inquiète pour l'avenir du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) qui pourrait être fusionné dans un fonds plus vaste, voire disparaître. Le FNADT avait déjà été mis en mal dans les arbitrages pour 2025.

"Il y a un risque, une tentative pour réduire, fusionner voire abandonner le FNADT (fonds national d'aménagement et de développement du territoire, ndlr)." À quelques jours de la présentation des grandes orientations budgétaires pour 2026, le sénateur Bernard Delcros, rapport spécial des crédits consacrés à la politique des territoires ("programme 112"), exprime ses plus vives inquiétudes quant à l’avenir de ce fonds instauré en 1995 pour mettre de l’ordre dans le financement des politiques d’aménagement du territoire. Or c’est l’existence même de ce fonds qui se trouve remise en cause à Bercy, estime le sénateur après avoir participé à toutes les conférences financières des territoires. "Affaiblir le FNADT serait contreproductif sur le plan économique, social et politique", a-t-il alerté, mardi 8 juillet, en présentant à la presse les conclusions de son rapport d’information intitulé "Sauver le FNADT : la politique d’aménagement du territoire à la croisée des chemins". 

Des "dégâts territoriaux" qui pourraient être importants 

Le sénateur vante tout particulièrement la "souplesse" de ce fonds "plébiscité" par les élus et qui, jusqu’ici, oscillait autour des 200 millions d’euros chaque année. Ce n’est donc pas, selon lui, un enjeu financier pour les caisses de l’État. En revanche les "dégâts sur les territoires" seraient importants. Le FNADT comporte "des enjeux de première importance, particulièrement pour les territoires ruraux, les territoires de montagne et, pour partie, les quartiers politique de la ville", souligne-t-il. Et celui qui est aussi président de la délégation sénatoriale aux collectivités de rappeler que le FNADT comporte une section générale et une section locale. La première finance de l’ingénierie locale, via l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), elle couvre notamment toutes les mesures du plan France ruralités dont le Premier ministre vient d’assurer à Mirecourt, qu’elles continueraient à être financées "à moyens constants" (voir notre article du 20 juin). Le FNADT permet de financer des postes de fonctionnement pour les maisons France services, les tiers-lieux, les programmes Territoires d’industrie, Action coeur de ville, Petites Villes de demain (PVD), Villages d’avenir, le Volontariat territorial en administration… Si François Bayrou a également annoncé la poursuite du programme PVD lors des assises des petites villes à Saint-Rémy-de-Provence (voir notre article du 17 juin), son absence remarquée lors du congrès de Villes de France à Libourne, le 4 juillet, ne permet pas de connaître ses intentions. Dans leur résolution adoptée à cette occasion, les maires de villes moyenne appellent justement à un acte III du programme ACV, après avoir alerté depuis de longs mois sur les difficultés du commerce de centre-ville.

L’une des craintes du sénateur serait que le FNADT soit fondu dans un fonds plus vaste, qui ne permettrait plus d’isoler les subventions de fonctionnement : "Si demain, le FNADT est noyé dans un fonds rigide, toutes ces actions appréciées des élus locaux ne pourront plus être maintenues."

"Effet de levier considérable"

Quant à la section locale, c’est elle qui permet de financer la politique contractuelle de l’État, notamment le volet territorial des contrats de plan État-région, les contrats de fleuves et de massifs, les contrats de convergence en outre-mer, la dizaine de pactes de développement territorial ou les contrats de redynamisation de site de défense. Pour le Massif central, c’est "95% des aides de l’État qui relèvent du FNADT à travers ces contrats de massifs", indique l’élu du Cantal. Or ces financements ont un "effet de levier considérable", souligne-t-il : 5 millions d’euros de crédits mobilisés dans les Alpes en 2024 ont engendré 32 millions d’euros de financements régionaux, locaux et aussi en provenance des fonds européens qui sont souvent sous-consommés.

Déjà en 2025, le FNADT a senti le vent du boulet passer tout près. Le projet de budget mis sur la table par l’ancien Premier ministre Michel Barnier ne prévoyait initialement que 25 millions d’euros pour les contrats de l'État sur les 150 millions d’euros accordés un an plus tôt. Ce qui avait entraîné une levée de bouclier des associations de défense de la montagne et les associations environnementales déplorant ces coupes au moment où les territoires de montagne cherchent à diversifier leur modèle économique pour s’adapter aux enjeux climatiques. Finalement, 40 millions d’euros ont été préservés pour permettre un "glissement" des opérations sur un an. "On l’a accepté en 2025, mais pérenniser cette baisse de crédits, c’est la fin des politiques contractuelles", affirme Bernard Delcros, mettant en garde contre "la perte de confiance dans la parole de l’État". "Je ne suis pas opposé à une contribution des collectivités au redressement des comptes publics, mais le fil directeur ce doit être la justice territoriale", clame-t-il. Le sénateur estime qu'il faut épargner "les petites communes de moins de 2.000 habitants qui ne pèsent rien du tout dans la dette publique" et avoir "une vigilance particulière" pour la cinquantaine de départements en difficulté. Surtout, toute décision doit être prise "en concertation" avec les élus, martèle-t-il.

Huit propositions

Dans sa série de huit propositions, Bernard Delcros demande de "maintenir impérativement le FNADT à l’écart de toute fusion des diverses subventions d’investissement local" (DETR, Dsil, fonds vert…), à "inscrire au budget les crédits nécessaires au respect des engagements pris par l’État" dans le cadre des contrats de plan, de même que les crédits nécessaires aux engagements pris lors de comité interministériel aux ruralités de Mirecourt, le 20 juin. Il demande à assurer le financement des 200 nouvelles maisons France services annoncées par le gouvernement. Enfin, alors que l’ancienne ministre Dominique Faure planche actuellement sur une nouvelle politique d’aménagement du territoire (voir notre article du 3 juin), le rapporteur spécial préconise de faire du FNADT l’outil de financement de cette politique. Quelques jours après la publication d'un rapport sénatorial appelant à faire le ménage dans les agences de l'État (voir notre article du 4 juillet), Bernard Delcros en profite pour apporter son soutien à l'ANCT. "Tout le monde s'accorde à dire que [les actions de la section générale] sont une réussite complète (...). Tant qu'on n'a pas trouvé de solution moins coûteuse, il ne faut pas supprimer l'ANCT", plaide-t-il. "L'erreur serait de prendre des décisions aveugles. (...) Attention aux solutions simplistes."

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis