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Classe à la maison : la continuité pédagogique à l’épreuve

Le ministère de l’Éducation a fait le point sur les moyens techniques permettant d’assurer la continuité pédagogique durant la période de confinement liée à l’épidémie de Covid-19, mardi 17 mars 2020. Les ENT "sont soumis à fortes pressions" mais "Ma classe à la maison" fonctionne bien, assure-t-il. Il n'empêche, les inégalités entre les élèves risquent de se creuser.  

"Ma classe à la maison" a enregistré 600.000 connexions pour les dernières 24 heures, pour un total, désormais, d’1,3 million de comptes créés dont 188.711 par des professeurs. Ces données ont été transmises dans un communiqué du ministère de l’Éducation nationale (MEN) du 17 mars 2020. Le service du Centre national d'enseignement à distance (Cned) destiné à assurer la continuité pédagogique dans un contexte de confinement général "n’a pas rencontré de difficultés de fonctionnement depuis son ouverture", indique le MEN. En revanche, c’est le site cned.fr qui a connu des "difficultés d’accès" en raison d’un trafic "multiplié par 20" alors qu’il "n’est pas la porte d’accès" au service gratuit ouvert en réponse à la crise du Covid-19. Pour le ministère, "le seul désagrément tient au délai de l’envoi de mail de confirmation de l’inscription" ; un problème "en cours de résolution". 
Quant aux environnements numériques de travail (ENT), ils "sont effectivement soumis à une forte pression" et "des cas de lenteurs ou d’arrêt du service temporaires sont signalés", concède le MEN. "Les collectivités territoriales sont sensibilisées à la nécessité de travailler avec leurs prestataires pour améliorer leur offre", est-il souligné dans le communiqué. Un fonctionnement opérationnel est prévu dès ce milieu de semaine, prédit-il. Des permanences dans les établissements scolaires et les services ministériels peuvent apporter leur soutien, en cas de besoin. 

Consultation gratuite de manuels des Éditeurs d’éducation  

En attendant, des professeurs s'organisent. Certains utilisent par exemple le logiciel américain de discussion en ligne Discord, en temps normal prisé par les fans de jeux vidéo pour échanger sur leurs parties en ligne et réservé aux plus de 13 ans. "Bienvenue aux nouveaux professeurs sur Discord", peut-lire sur le Twitter de l'entreprise américaine. Sur les réseaux sociaux, des lycéens s'amusent du décalage entre l'utilisation, normalement informelle de Discord, et la présence de leurs professeurs.

De leur côté, les éditeurs scolaires membres de l’association "Les Éditeurs d’éducation" ont fait savoir depuis le 12 mars qu’ils mettront gratuitement à la disposition des élèves et des enseignants la consultation de manuels numériques via leurs sites ou plateformes. Une liste est publiée sur leur site. "Chaque éditeur informera sur son site et/ou ses réseaux sociaux des modalités pratiques de mise en œuvre de cette décision collective", précisent-ils. 
Le ministère mentionne des "offres à venir" avec un "renforcement des contenus éducatifs sur les chaînes de France Télévisions et la programmation de Radio France". La plateforme éducative publique Lumni développe son offre, tout comme Educ’Arte. Un nouveau magazine quotidien éducatif de 52 minutes sera ainsi diffusé sur France 5 en fin de matinée à partir du 23 mars en direction des 8/12 ans.

Risque d'inégalités malgré la solidarité

Sur le terrain, des difficultés à communiquer avec certaines familles, le défaut d'ordinateur ou le manque d’aisance de certains parents font craindre de voir les inégalités entre élèves se creuser avec l'enseignement à distance, même si des initiatives et un important "élan solidaire" se mettent en place.
 "On va faire un effort supplémentaire pour les élèves dont on craint le décrochage", dans "certains territoires défavorisés ou niveaux de classe comme le CP ou CE1", a assuré mercredi 18 mars sur France Info Jean-Michel Blanquer (lire notre article du 18 mars). "On est en train de déployer un dispositif pour que des recommandations soient faites aux parents", a ajouté le ministre. De nombreuses collectivités territoriales ont également équipé des élèves en matériels numérique. 

Au défaut d'équipement s'ajoute parfois la barrière de la langue, avec "pas mal de parents qui ne sont pas francophones". La Fédération des parents d'élèves (FCPE) de Seine-Saint-Denis note elle aussi un grand "élan solidaire", avec notamment "une coopération entre parents". "Par exemple, nous sommes en train de récupérer des modes d'emploi en plusieurs langues pour l'utilisation des espaces numériques de travail", explique Alixe Rivière, co-présidente de la FCPE 93. Des groupes Whatsapp de parents s'activent un peu partout.

Concernant les infrastructures générales, des échanges ont eu lieu ce week-end entre le gouvernement, le régulateur des télécoms (Arcep) et les principaux fournisseurs d’accès à internet. Ces derniers ont indiqué avoir anticipé l’accroissement du trafic mais le risque de saturation plane toujours (lire notre article du 17 mars).