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Accès au logement - Dalo : la parole est à la justice

Le 1er décembre 2008 marque le début effectif du caractère opposable du droit au logement. A compter de ce jour, les personnes autorisées à saisir sans délai la commission départementale de médiation et désignées par elle comme prioritaires et devant être logées en urgence pourront en effet saisir le tribunal administratif si elles n'ont pas obtenu, dans les trois ou six mois suivant la décision de la commission (selon les départements), une offre de logement tenant compte de leurs besoins et de leurs capacités. A partir du 1er janvier 2012, cette possibilité sera ouverte également à toute personne qui, ayant saisi la commission de médiation après un délai d'attente anormalement long d'un logement social et ayant vu sa demande de logement reconnue comme prioritaire et urgente par cette commission, n'a pas reçu une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités dans un délai de trois ou de six mois selon les départements. Aux termes de l'article 9 de la loi du 5 mars 2007, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne doit alors statuer en urgence, dans un délai maximal de deux mois. Lorsqu'il constate "que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d'urgence et que n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités", le juge administratif "ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l'Etat". Il peut également assortir son injonction d'une astreinte. Son montant est versé au fonds d'aménagement urbain, institué dans chaque région et destiné aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale pour des actions foncières et immobilières en faveur du logement social.
A partir du 1er décembre 2008, la même procédure s'applique aussi aux demandeurs reconnus par la commission de médiation comme prioritaires et comme devant être accueillis dans une structure d'hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale et qui n'ont pas bénéficié d'un tel accueil.


 

Combien de saisines ?

Les associations spécialisées - comme le DAL - déclarent se préparer à accompagner, dès le 1er décembre, plusieurs dizaines de personnes dans leur recours devant les tribunaux administratifs. Mais, au-delà de la symbolique forte des premiers recours et des premières décisions, la montée en charge des saisines devrait être très progressive. D'une part, la loi du 5 mars 2007 fait de la médiation le pivot de l'accès au logement, la saisine du juge administratif n'intervenant qu'en dernier recours. Les premiers bilans de l'activité des commissions de médiation font d'ailleurs apparaître un fonctionnement plutôt satisfaisant. D'autre part, le nombre des personnes susceptibles de saisir les juridictions administratives est encore assez restreint et se situe très loin des 600.000 bénéficiaires potentiels du Dalo estimé lors de l'examen de la loi du 5 mars 2007. Au 31 octobre 2008, les commissions de médiation avaient enregistré le dépôt d'un peu plus de 50.000 dossiers. A cette même date, 29.454 d'entre eux avaient déjà été examinés et donné lieu à 13.206 avis favorables. Ces derniers avaient eux-mêmes débouché sur 3.374 relogements effectifs et 631 refus de l'offre du bailleur. Le "vivier" des personnes susceptibles de saisir un tribunal administratif se limite donc, pour l'instant, à 9.201 (13.206 - 3.374 - 631), parmi lesquelles une grande majorité va vraisemblablement se voir proposer une offre de logement dans les prochaines semaines.
Le véritable enjeu de l'arrivée de la juridiction administrative dans le champ du droit au logement se situe dans la pression mise sur les bailleurs et les acteurs locaux pour trouver des solutions de logement ou d'hébergement et dans l'établissement progressif d'une jurisprudence de la mise en oeuvre du droit au logement, par exemple sur la question du refus de l'offre d'un bailleur lorsque celle-ci est trop éloignée ou ne correspond pas aux attentes du demandeur.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Un décret précise le déroulement de la procédure
Un décret du ministère de la Justice, en date du 27 novembre 2008, précise que les jugements seront rendus par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cet effet. Le juge statuera à l'issue d'une procédure contradictoire écrite ou orale et, sauf renvoi à une formation collégiale, l'audience se déroulera sans conclusions du commissaire du gouvernement.
En termes de procédure, les requêtes devant le tribunal administratif doivent être déposées dans un délai de quatre mois suivant l'expiration des différents délais prévus par la loi Dalo. Pour sa part, le préfet doit, dès qu'il reçoit notification de la requête, communiquer au tribunal administratif l'ensemble du dossier constitué pour l'instruction de la demande correspondante. Dès l'enregistrement de la requête, le magistrat fixe la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience. Lors de l'instruction, "un représentant d'une association ayant reçu l'agrément prévu au deuxième alinéa du I de l'article L.441-2-3-1 du Code de la construction et de l'habitation peut être entendu [...]". En pratique, il s'agit des associations dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées ou des associations de défense des personnes en situation d'exclusion, agréées par le représentant de l'Etat dans le département. Le décret du 27 novembre 2008 précise également que le tribunal administratif statue "en premier et en dernier ressort".

 

Références :  loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (Journal officiel du 6 mars 2007) ; décret 2008-1227 du 27 novembre 2008 relatif au contentieux du droit au logement opposable (Journal officiel du 28 novembre 2008).

 

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