Déclaration de Sébastien Lecornu au Sénat : des précisions sur les sujets territoriaux

Après les députés mardi (voir notre article sur cette déclaration de politique générale), c'était au tour des sénateurs d'entendre, ce mercredi 15 octobre, Sébastien Lecornu. L'abcès ayant été au moins provisoirement crevé la veille sur le sujet des retraites, le Premier ministre a pu, lors de cette deuxième allocution depuis sa renomination, aborder certains sujets concrets qu'il n'avait pas évoqués devant les députés. Dont, logiquement, ceux qui ont trait aux territoires. Passage en revue de ce qu'il a lui-même qualifié de "compléments".

Modernisation de l'Etat. Il a rappelé avoir "installé dès [son] arrivée à Matignon la mission 'Etat efficace' pour faire en continu des propositions de rationalisation des dépenses publiques, à commencer par la suppression ou la fusion d'administrations ou d'organismes" (voir notre article du 22 septembre). L'idée étant d'"engager un mouvement d'amélioration de l'efficacité de l'État dans un cadre pluriannuel, en revoyant le format de l'État central qui demeure trop pléthorique malgré les mouvements de décentralisation et de déconcentration".

Décentralisation. Le Premier ministre a peu ou prou repris ses propos de la veille sur son projet de réforme de la décentralisation qui, selon lui, "n'est possible qu'en repartant de l'État" : "Il n'y aura pas de débat sur le rôle des collectivités sans d'abord parler du rôle de l'État". Mardi à l'Assemblée, il avait évoqué un projet de loi pour décembre. Il fut maintenant question d'un texte "soumis au Parlement avant les élections municipales". Son projet, affirme-t-il, "réformera l'action publique de manière globale (…) pour rendre le fonctionnement de tous nos services publics plus efficaces dans une logique de modernisation, de responsabilité et plus encore de proximité". Avec une "question centrale" : "Qu'est-ce que l'on attend de l'État ? La police, la justice, la sécurité, la défense, les relations internationales sont les missions qui font le cœur même de l'État (…). L'État régalien s'est renforcé et il ne faut pour rien au monde y renoncer. Pour le reste, il faudra se réorganiser. Des missions aujourd'hui assumées par l'État pourront être prises au niveau local. L'inverse pourra aussi être vrai, mais la question au cœur de ce texte sera d'identifier bonne fois pour toutes qui est responsable de quoi."

Finances locales (et notamment départementales). Alors que le volet collectivités du PLF était présenté le matin même au Comité des finances locales, avec les réactions que l'on pouvait attendre (voir notre article de ce jour), le Premier ministre a reconnu que "ce budget demandera un effort aux collectivités locales comme à tous les autres acteurs". Ajoutant toutefois : "J'ai conscience comme élu local que cet effort est difficile et parfois incompris. Aussi ai-je souhaité, en reprenant cette copie (…), que les moyens alloués aux collectivités maintiennent une trajectoire de hausse en 2026. Par ailleurs, il faudra veiller à adapter ces mesures au cas par cas. Comment ne pas voir la situation préoccupante des conseils départementaux ? L'État sera au rendez-vous avec un fond de sauvegarde pour 2026. Mais au-delà de ces mesures d'urgence, il faut enfin se mettre au travail pour adopter des mesures structurelles pour les départements. C'est ce que j'ai demandé à la ministre en charge des collectivités locales."

Statut de l'élu. Il a assuré que le gouvernement "soutient et s'engage à faciliter" l'adoption du texte "aussitôt que possible".

Accès aux soins. Sébastien Lecornu a rappelé sa volonté d'"établir 'France Santé' partout en France, avec un rendez-vous chez un médecin à 30 minutes de chez soi en moins de 48 heures" – un sujet qu'il avait développé lors de son premier (et seul) déplacement lors de sa précédente nomination (voir notre article du 13 septembre). "Une première base est prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale" et "d'autres mesures rendront l'accès aux soins plus simples dans nos territoires", telles que "la facilitation de l'ouverture d'officines dans les communes de moins de 2.500 habitants, l'installation de jeunes médecins dans les territoires concernés et l'installation de 3.700 docteurs juniors dans le cadre de leur dernière année de diplôme d'études spécialisées de médecine générale". "Il n'y aura aucune fermeture d'hôpital en 2026", a-t-il par ailleurs assuré.
Mais selon lui, sur la santé comme sur d'autres politiques, "trop d'acteurs interviennent, on multiplie les initiatives et donc les dépenses". La nécessaire "clarification des responsabilités" soulèvera pas mal de questions, a-t-il dit : "Quelle réflexion devons-nous mener sur le fonctionnement actuel des agences régionales de santé ? Les élus doivent-ils participer à leur gouvernance ? Que faut-il décentraliser ou au contraire mieux assumer au niveau de l'État ? Qu'attend-on des élus locaux qui siègent dans les conseils d'administration des hôpitaux ?".

Energie. Sur "le secteur des énergies renouvelables ou de la sobriété énergétique, s'il est hors de question de baisser nos ambitions environnementales, il est tout autant hors de question que cela pèse anormalement sur le contribuable", a déclaré Sébastien Lecornu, assurant que toutes les propositions de "mesures d'économies" seront "examinées et débattues". Un sujet qu'il avait également évoqué quelques instants plutôt à l'Assemblée nationale lors des questions au gouvernement, en référence aux "effets d'aubaine" dont ont profité lors de la crise de l'énergie les producteurs d'énergies renouvelables soutenus par les pouvoirs publics via le système d'achat d'électricité à prix garanti pour soutenir les filières éolienne et solaire. L'article 69 du PLF entend les "corriger". "Quels sont les bons moyens financiers pour éviter des effets de rente, des effets de bord sur le financement de ces énergies renouvelables, c'est un sujet qui est clef", a-t-il considéré.

Environnement. Pour "protéger notre environnement et lutter contre le réchauffement climatique", il faut privilégier "une approche locale" car "l'écologie, c'est de l'aménagement du territoire" : "Décentraliser les compétences, les responsabilités, les moyens, c'est aussi une formidable occasion de repenser complètement notre planification écologique et énergétique. Nous ferons des propositions précises sur le sujet. Je pense en particulier sur la gestion de l'eau qui n'obéit pas à des périmètres administratifs mais à des réalités géographiques de terrain."

Mobilités. "La question de la desserte des territoires est capitale pour éviter qu'un sentiment de relégation ne se développe davantage chez des millions de nos concitoyens." "Le ministre des Transports proposera une loi-cadre qui permettra notamment de flécher les recettes des futures concessions autoroutières vers le développement de nouvelles mobilités et de nouvelles infrastructures notamment ferroviaires."

Logement. Saluant "les premières décisions prises récemment par Valérie Létard", Sébastien Lecornu estime que les solutions à la crise du logement passent entre autres par le fait de "réduire le millefeuille de documents de planification pour les rendre plus durables, moins coûteux pour les collectivités et plus efficaces" et de "simplifier les procédures d'urbanisme pour baisser les coûts de construction". Si la proposition de loi Huwart (voir notre article du 10 juillet) "était un premier pas" (elle a justement été définitivement adoptée ce 15 octobre par les députés), il s'agit de "continuer" dans cette direction.

Ruralité. Le ministre délégué en charge de la ruralité, Michel Fournier, "aura pour mission de développer toutes les formules itinérantes de services publics et de commerce de proximité sur le modèle des Frances Services" et de "garantir un accompagnement adapté des collectivités rurales les plus fragiles selon la méthode du programme Villages d'Avenir".

ACV et PVD. Sébastien Lecornu a assuré que "le gouvernement poursuivra ce qui a été fait il y a quelques années par Jacqueline Gourault avec le plan Action cœur de ville et Petites villes de demain pour sauver et surtout développer le commerce de centre-ville". Il "compte" sur Serge Papin, le nouveau ministre des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l'Artisanat, du Tourisme et du Pouvoir d'achat, pour présenter prochainement des "idées" notamment tirées de son expérience d'ex-patron de Système U.

Sécurité. Le Premier ministre dit souhaiter "que le projet de loi pour le renforcement des pouvoirs des policiers municipaux et des gardes-champêtres soit rapidement examiné" (voir notre article du 16 septembre).

 

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