Déclassement de la protection du loup : le nouveau cadre réglementaire en consultation

Faisant suite au "reclassement" du loup au sein de l’Union européenne, l’État a ouvert une consultation publique sur un projet d’arrêté traduisant au niveau réglementaire une simplification significative des conditions d’accès aux tirs de défense. Mais le maintien d’un plafond de destructions national de 19% établi à partir de l’estimation annuelle de la population lupine reste fortement décrié par les éleveurs.

La population lupine en France s’établit désormais, "avec un intervalle de confiance à 95%, entre 989 et 1.187 individus pour un effectif moyen estimé à 1.082 loups", soit une augmentation de 69 individus sur un an, a annoncé ce 28 novembre le cabinet de la préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes (Aura), coordinatrice sur le plan national d'actions loup et les activités d’élevage. Cette estimation, tirée de l'étude annuelle de l'Office français de la biodiversité (OFB), "bien que légèrement supérieure à celle de 2024 (1.013 loups dénombrés), confirme la tendance à la stabilisation des effectifs constatée ces dernières années", ajoute le communiqué

La tenue, le 12 décembre prochain, d’un groupe national Loup, sera l’occasion de présenter cette évaluation mais également d’évoquer avec l’ensemble des parties prenantes, les perspectives concernant l’adaptation du statut du loup dans la réglementation nationale. Fin septembre, l’État avait déjà évoqué les grandes lignes d’un assouplissement dès 2026 du dispositif de tirs de défense, permettant aux éleveurs en zone de prédation d’y recourir sur simple déclaration, au grand dam des associations de protection de la nature (lire notre article)

Il s’agit de traduire le déclassement du statut de protection du loup acté en juin dernier au sein de l’Union européenne - de "protégé" à "espèce animale d’intérêt communautaire dont le prélèvement dans la nature et l'exploitation est susceptible de faire l'objet de mesures de gestion"- visant à donner plus de flexibilité aux États membres pour gérer les populations de loups. Le projet d’arrêté définissant le statut de protection et fixant les conditions et limites de la destruction des loups vient d’être soumis à consultation publique, et ce jusqu’au 19 décembre prochain. En moins d’une semaine la plateforme du ministère de la Transition écologique a déjà recueilli près de 5.000 contributions. C’est dire si le sujet divise. 

Des éleveurs insatisfaits

Pour Jeunes Agriculteurs et la FNSEA "ce projet d’arrêté est un texte creux". "Maintien du quota annuel de prélèvements, restrictions de l’envoi des louvetiers, suspension des tirs, maintien d’un régime d’autorisation pour les bovins…" font partie des sujets de grogne. "Les dispositifs proposés, trop timides et excessivement technocratiques, démontrent un refus persistant d'affronter la réalité du terrain : les attaques se multiplient, les pertes s'aggravent, les éleveurs continuent d'en porter seuls les conséquences", épingle le communiqué des syndicats. 

Le préfet référent a écarté à ce stade toute hausse du plafond (objet d’un autre arrêté) fixé à 19% de l’effectif moyen de loups estimé annuellement. Celui-ci aura en outre la possibilité, si le niveau de consommation s’avérait trop précoce et avant l’atteinte du plafond, "de suspendre temporairement ou jusqu’à la fin de l’année les déclarations et autorisations de tir sur les territoires qu’il détermine", précise le ministère. Dans ces conditions, les tirs pourraient, sur accord du préfet coordonnateur, continuer d’être mis en œuvre seulement par les lieutenants de louveterie ou la brigade mobile d’intervention "afin de conserver une meilleure maîtrise de consommation du plafond". 

Distinction des régimes de tir de défense selon le zonage

Concrètement, ce projet d'arrêté "va ouvrir la porte à la possibilité de tir de loups sur simple déclaration et sans condition sur une grande partie du territoire fréquentée par l’espèce [cercles 0, 1 et 2] et par conséquent créer une grande tension sur la maîtrise du plafond de tir, actuellement de 19% des effectifs (qui peut être porté à 21%), à la limite du basculement de la population vers la décroissance", étrille de son côté le Conseil national de protection de la nature (CNPN) qui a rendu un avis défavorable à l’unanimité de ses membres. "C’est lâcher d’une main en libéralisant notamment les tirs sans autorisation, tout en voulant piloter de l’autre leur réalisation pour contenir la limite du plafond de tirs actuel, du moins dans l’état actuel du texte qui le fixe", relève-t-il. "La gestion des dommages à l’élevage par le développement des tirs semble avoir atteint ses limites en termes de maintien de l’espèce dans un statut de conservation favorable et nécessite d’être remise en question", appuie le CNPN. 

La destruction d’un loup ne demeurera soumise à autorisation individuelle que dans les communes relevant du cercle 3 (c’est-à-dire les zones possibles d’extension géographique du loup où des actions de prévention sont encouragées du fait de la survenue possible du loup à moyen terme) et pour les troupeaux bovins et équins. Les tirs létaux seront par ailleurs possibles en l’absence de mesures de protection (chien, clôture électrifiée ou gardiennage) pour l’ensemble des zones (cercles 0 à 3). La mise en œuvre des mesures de protection reste toutefois "encouragée", souligne la notice de consultation. Le déploiement de telles mesures ouvrira entre autres la possibilité d’une intervention des lieutenants de louveterie ou de la brigade mobile d’intervention de l'OFB en défense du troupeau. 

Hors du cadre défini, tuer un loup demeurera un délit passible d'une peine de trois ans de prison et de 150.000 euros d’amende, rappelle également le ministère.

 

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