Le pays de Bitche promeut l’art du verre (57)

Le développement du tourisme industriel à Meisenthal dans le pays de Bitche en Lorraine, trouve son origine dans le démantèlement de l’usine de verre, fermée en 1969, et la mobilisation conjuguée des artisans verriers, habitants et élus, soucieux que ce savoir-faire unique ne se perde pas. Pour David Suck, président de la communauté de communes du Pays de Bitche : « Notre territoire s’est organisé pour être acteur de son avenir. Nous sortons des sentiers battus et prenons des risques pour assurer la transmission des savoir-faire, développer cet art du verre à la française, proposer une destination touristique, être un territoire qui fait la fierté de ses habitants. Le tout, grâce à la dynamique conjuguée de la puissance publique, des acteurs économiques, des bénévoles et des permanents. »

Ambition et excellence

L’ancien site industriel a été réaménagé en plusieurs phases avec le Musée du verre inauguré en 1983, le Centre international d’art verrier (CIAV), inauguré en 1992, et la Halle verrière, friche de l’ancienne unité de production aujourd’hui convertie en « scène conventionnée d’intérêt national », dotée d’une salle de concert d’exception.

Pour répondre aux besoins nouveaux générés à la fois par une fréquentation du site en hausse constante, son appropriation par la population du territoire et sa notoriété grandissante, les élus engagent au début des années 2000, un vaste projet de réhabilitation. David Suck : « cette réalisation illustre l’ambition du territoire et démontre que rien n’est possible sans les collectivités locales. Ce projet fédérateur a été porté par les élus tout au long des mandats, avec la volonté de rassembler autour de nos savoir-faire, de notre identité de territoire. »

Mis en œuvre entre 2017 et 2022, ce chantier monumental (confié au cabinet new-yorkais SO-IL) a permis la création du lieu d’accueil, de la boutique, d’une salle de concert dans la Halle verrière, d’une passerelle reliant les trois espaces. Coût total de l’opération : 20 millions d’euros financés à hauteur de 30 % par la communauté de communes du pays de Bitche, devenue concomitamment propriétaire de l’ensemble du foncier. Ce financement a été complété par l’État, la région, le département ainsi que le mécénat de la fondation Bettencourt-Schueller.

Un musée et une production

Le musée propose aux visiteurs, entre autres découvertes, une collection de pièces exceptionnelles souvent offertes par des bénévoles, anciens verriers et leurs familles. Le site de Meisenthal est aussi un lieu de production qui compte une vingtaine d’artisans permanents et une trentaine de vacataires, contractuels, stagiaires, apprentis, alternants, qui portent un savoir-faire verrier toujours actif. Au Centre international d’art verrier, le visiteur peut observer le travail des artisans verriers, dont les gestes sont aujourd’hui inscrits par l’Unesco au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Chaque année, 90 000 boules de Noël sont produites, dont 40 000 « boules de l’année ». « Nous jouons un rôle d’incubateurs en accueillant des apprentis qui peuvent ensuite rejoindre Lalique ou la cristallerie Saint-Louis, du groupe Hermès. L’industrie du verre continue à investir et embaucher sur le territoire et représente 1 000 emplois », précise David Suck. 

Une boule de Noël « antidérapante »

Chaque mois de février, un designer en résidence commence à travailler pour créer la boule de Noël de l’année. En 2025, pour la trente-sixième édition, la boule de Noël est imaginée par le designer Lucas Lorigeon. Le principe de départ : mieux vaut prévenir que guérir. Les boules en verre étant des objets fragiles, le créateur a dessiné GRIP, une boule antidérapante avec des stries à la surface. « Nous avons fait plusieurs modélisations en 3D et des moules d’essais en plâtre, avant de nous lancer dans la conception de moules en métal destinés à la production. Et puis un beau jour, le premier moule est arrivé ! » résume Lucas Lorigeon Et David Suck d’ajouter : « Si la main de l’homme et la matière n’ont pas changé, il s’agit de réinventer la production et je fais totalement confiance au regard des plus jeunes ». Chaque année, le succès est tel que le nombre d’acquisition par acheteur est limité.

Un savoir-faire industriel 

Une production en « circuit court et local » qui fait la fierté des habitants du territoire et conforte la stratégie résolument moderniste des élus. La boutique du site verrier génère chaque année près de deux millions d’euros de chiffre d’affaires. « Bien sûr, le contribuable participe, mais il est essentiel que des recettes soient dégagées par l’activité du site. »

Pour David Suck, le site verrier de Meisenthal génère un trafic touristique primordial, avec 100 000 visiteurs par an, mais il est aussi « un vaisseau amiral qui doit conduire les visiteurs à découvrir les autres richesses du territoire ». De plus, le Pays de Bitche possède un savoir-faire dans le bois et la pierre, il est aussi réserve mondiale de biosphère, classement fixé par l’Unesco, et compte un grand nombre d’itinéraires cyclables.