Archives

Déchets - Filières REP : Amorce milite pour une gouvernance partagée

Modernisation des centres de tri, réaction au rapport de la Cour des comptes, concurrence qui se profile dans les emballages : à l'occasion des neuvièmes rencontres sur le thème des filières de responsabilité élargie du producteur (REP) qu'il a organisé le 10 février, le réseau d'élus et de professionnels Amorce est revenu sur des points qui crispent ou qui fâchent.

Alors que les négociations des futurs agréments des filières emballages et papiers battent leur plein, l'association Amorce a fait un point le 10 février sur des enjeux émergents ou persistants. Elle a regretté la tournure "parfois superficielle" des recommandations que la Cour des comptes formule et répète, tant dans le rapport actualisé sur Eco-emballages et Adelphe publié le mois dernier (deux ans après la publication de la première version) que dans son rapport public annuel rendu public le 10 février 2016. Exemple : les magistrats de la rue Cambon enjoignent les collectivités à mettre à jour leurs consignes de tri. "Or cette histoire d'harmonisation des consignes et couleurs des bacs est datée et n'a plus guère de sens", riposte Gilles Vincent, président d'Amorce et maire de la commune provençale de Saint-Mandrier-sur-Mer.

L'enjeu majeur des centres de tri

Pour Amorce, la bataille se joue ailleurs, dans la gouvernance des filières de responsabilité élargie du producteur (REP) mais aussi sur le terrain, dans l'adaptation des centres de tri aux nouveaux flux. L'extension des consignes de tri pour tous les emballages en plastique s'étendra par tranches successives jusqu'en 2022 : "Il y a eu une phase d'expérimentation par une trentaine de collectivités, place désormais à la généralisation. Je peux vous assurer qu'il s'agit là d'un enjeu majeur", prévient Nicolas Garnier, délégué général de l'association. Du fait de cette extension progressive des consignes de tri à tous les emballages plastiques, les flux entrants dans ces centres vont changer. Une note publiée au printemps dernier à ce sujet par l'Ademe et Eco-emballages (voir notre article dans l'édition du 18 mai 2015) donnait quelques éléments pour comprendre par quel bout commencer cette adaptation du parc actuel des centres de tri. Or très vite sont introduites les notions d'automatisation du tri, de besoin de technologies poussées et l'insuffisance d'un simple effort d'adaptation. "Tout cela ne sera pas sans poser des difficultés car qui dit automatisation dit enjeu en termes d'emploi. Et ce dans des filières qui ont historiquement misé sur l'insertion", poursuit Nicolas Garnier. La Cour des comptes, qui a aussi abordé l'enjeu, s'est contentée de rappeler sobrement qu'une expérimentation conduite par Eco-emballages sur des centres de tri a conclu que près de 85% des centres de tri restaient inadaptés à cette extension.

Filières REP : constats, craintes et cas pratiques

Concernant les filières de responsabilité élargie du producteur (REP), Amorce part du constat suivant : il y en a une quinzaine en France qui ne couvrent au final qu'un tiers du gisement total de déchets. Donc "faut-il étendre des REP existantes à de nouveaux produits ou bien créer de nouvelles REP ?", s'interroge Amorce. L'association surveille aussi de près le cas pratique qui se pose avec les déchets issus des matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels. Un décret destiné à appliquer cette mesure (article 21 quater) issue de la loi sur la transition énergétique est au Conseil d'Etat. Dans son orientation actuelle, ce texte demande aux distributeurs de reprendre sur leur site de vente ces déchets issus de l'utilisation des matériaux de construction. "Se pose donc la question du point d'apport. Ces distributeurs vont se rapprocher des déchetteries municipales qui gèrent déjà dix millions de tonnes. Mais que se passera-t-il si les collectivités n'ont plus de place ?", interpelle Nicolas Garnier.

Vers une meilleure représentativité des collectivités

Dans le cadre de la rédaction du futur cahier des charges des filières emballages et papiers graphiques, cette association habituellement plutôt critique applaudit des deux mains "l'évolution très positive des conditions de concertation mises en place par le ministère de l'Ecologie, avec le soutien technique précieux de l'Ademe". Le cadre de mise en œuvre de la REP est, selon elle, beaucoup plus encadré que par le passé et apporte des garanties notamment en termes de gouvernance, de respect des cahiers des charges de ces filières et de "représentativité des collectivités territoriales signataires des contrats avec les éco-organismes".
Il n'en reste pas moins que pour "éviter définitivement des crises du passé", elle veille au grain pour que la gouvernance des filières REP soit réellement "partagée, efficace et apaisée". Un décret du 30 décembre 2015 met en effet en place une nouvelle instance de gouvernance de ces filières. Cette commission se substituera à toutes celles qui sont actuellement en place, notamment celles chargées de l'agrément. Amorce milite pour qu'il y ait dans cette nouvelle instance "un juste équilibre des forces entre les différents acteurs de la filière". Et une représentativité renforcée des collectivités "qui assument encore aujourd'hui majoritairement la collecte, le traitement et le coût de gestion des gisements de déchets sous REP".
Cette commission chapeautera des sous-commissions thématiques. Or les metteurs sur le marché y ont une voix "légèrement prépondérante", déplore Amorce. Enfin, la représentativité s'applique aussi entre associations de collectivités territoriales, et ce afin que "les différentes voix des collectivités puissent librement et légitimement s'exprimer". Le fonctionnement de cette "commission administrative dotée de 14 sous-sections" préoccupe profondément l'Association des maires de France (AMF) qui en a dénoncé le 10 février la gouvernance. Elle déplore le fait que l'Etat "balaie la candidature d'un élu" à sa tête afin d'en confier plutôt la présidence  "à des hauts fonctionnaires". Pour rappel, dans la filière emballages, la présidence de la commission consultative d'agrément a toujours été confiée à l'AMF.
Le point de vue est opposé chez Amorce, qui voit d'un bon œil cette reprise en main des filières par l'Etat, pour mieux "réguler la concurrence qui de toute façon arrive " en 2017 et "améliorer le dialogue et la concertation" entre les acteurs.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis