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Habitat - La Fondation Abbé-Pierre veut "donner du souffle" à la politique logement

Lundi 1er février avait lieu, à la Grande Halle de la Villette, la présentation du rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre sur l'état du mal-logement en France. Dans notre édition d'hier, nous vous avons rendu compte du contenu des discours des responsables de la Fondation et du gouvernement. Changement d'angle aujourd'hui : dans son rapport, la Fondation propose une vingtaine de mesures, qui, estime-t-elle, permettraient de donner du "souffle" et d'"établir les fondements d'une grande politique du logement, digne d'un pays comme la France". Revue de détail des mesures proposées.

 

Comment construire plus de logements sociaux ?

La Fondation demande tout d'abord la poursuite du plan de cohésion sociale, avec cette année, contrairement à 2009, des objectifs chiffrés : "150.000 logements vraiment sociaux par an dont 30.000 PLAI familiaux." Une position un peu contradictoire : il s'agit à la fois de louer le plan de cohésion sociale, mis en place par définition par les gouvernements de ces cinq dernières années, tout en expliquant que le gouvernement actuel ne va pas assez loin avec ses 115.000 logements financés en 2009 (y compris le plan des 30.000 Vefa). Pour Patrick Doutreligne, le délégué général de la Fondation, le plan de cohésion sociale a "certes permis d'augmenter la production de logements, mais les résultats restent nettement inférieurs tant aux objectifs annoncés, qu'aux besoins de la population".

Toujours sur le volet logement social, la Fondation souhaite que les PLS ne soient attribués que "dans les secteurs où le marché du logement est tendu et à condition qu'ils soient doublés de PLAI". Une position qui,  si elle était adoptée, pourrait conduire les pouvoirs publics à clarifier l'usage qu'ils font des agréments distribués par les services de l'équipement. En effet, dans les zones non-tendues, très peu de bailleurs HLM se hasardent à construire du PLS pour loger des familles : les demandeurs de logements sociaux n'ont pas les moyens de payer ce type de loyers. Par contre, les PLS sont souvent utilisés pour financer des maisons de retraite ou des foyers pour personnes handicapées. Conditionner l'octroi des PLS à des PLAI imposerait donc de clarifier cette question... et donc éventuellement de revoir à la baisse le nombre de logements effectivement construits chaque année. La Fondation demande également que soit imposé, sur tout le territoire et dans tout programme immobilier de plus de dix logements, un quota de 30% de logements à loyer accessible (privé ou public). Ce dispositif, qui consiste à insérer dans les cahiers des charges des permis de construire l'obligation pour le promoteur de vendre par exemple une partie de son opération en Vefa à un organisme HLM, fonctionne déjà à Lille, Rennes ou Paris.

Enfin, afin de mobiliser des terrains, elle souhaite que toutes les communes ou intercommunalités qui doivent élaborer un programme local de l'habitat (PLH) soient tenues d'adhérer à un établissement public foncier. Quant aux plans locaux d'urbanisme, ils pourraient comporter obligatoirement une réserve foncière dont la Fondation ne précise pas l'étendue. 

Logement privé : un nouveau conventionnement et un meilleur accompagnement des familles en impayés

Côté logement privé, la Fondation demande l'encadrement de l'augmentation des loyers entre deux locataires, point sur lequel Martine Aubry s'est prononcée favorablement lundi. Beaucoup plus neuve est la proposition de mettre en place un nouveau conventionnement des logements privés, de type Anah, sans obligation de faire des travaux : ainsi, un propriétaire pourrait être incité à louer à des personnes pauvres d'une part par une forte défiscalisation, d'autre part par la mise en place d'une garantie de paiement des loyers et d'entretien de son bien. Une mesure que l'UNPI, le syndicat des propriétaires, ne repousse pas immédiatement, estimant dans son communiqué que "la baisse de la fiscalité est une piste intéressante".

Sur l'intermédiation locative, la Fondation estime que pour que le dispositif se développe réellement, il faut que l'Etat finance le travail d'ingénierie sociale effectué par les associations. Sur la prévention des expulsions, la Fondation souhaite que soit instituée une médiation obligatoire entre le premier courrier de l'huissier et la convocation au tribunal. Enfin, elle souhaite que l'octroi de la force publique ne puisse avoir lieu qu'après la décision de la commission Dalo. 

Hébergement et achat de logements en diffus : quels moyens?

Enfin, sur le volet hébergement, la Fondation se dit d'accord sur les principes du Plan Apparu rendu public en novembre (voir notre article du 10 novembre 2009)... mais "dans le flou" sur les moyens. En effet, pour l'instant, ce plan ne dispose d'aucune enveloppe supplémentaire par rapport à la situation de ces dernières années. Tout le secteur de l'hébergement devra attendre – si tout va bien – le budget 2011 pour voir ce plan doté de moyens. Quant à la possibilité évoquée par Benoist Apparu hier de faire acheter par des organismes HLM des logements en diffus puis de les faire gérer par une association, pour Patrick Doutreligne, il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Ce système existe déjà, mais se développe peu car ce type de logements coûte très cher à gérer. Les organismes HLM n'ont aucune incitation actuellement à réaliser ce type d'opérations… et il est fort peu probable que soit modifiée, pour ce seul sujet, la liste des indicateurs des conventions d'utilité sociale dont le décret a été si difficile à rédiger cet automne...

 

Hélène Lemesle

 

 

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