Le titre professionnel d'intervenant éducatif petite enfance est créé
Accessible au terme d'une formation en présentiel de 1.400 heures et par la validation des acquis de l'expérience (VAE), ce titre professionnel devrait permettre aux micro-crèches de remplir leurs nouvelles obligations de formation au 1er septembre 2026. Dénonçant "un tournant préoccupant pour l’accueil du jeune enfant en France", le Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE) appelle les professionnels à boycotter les jurys de cette nouvelle certification.
© Marta NASCIMENTO/REA
En février dernier devant la représentation nationale, Catherine Vautrin, alors ministre des Solidarités, affichait sa détermination à mettre fin au régime dérogatoire dont bénéficiaient jusque-là les micro-crèches en matière de formation des professionnels (voir notre article). Publié deux mois plus tard, le décret concrétisant cet alignement des exigences donnait aux micro-crèches jusqu'au 1er septembre 2026 pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation (voir notre article). "17 mois pour remplir des conditions impossibles !", avait alors réagi la Fédération des entreprises de crèches (FFEC).
Dans son communiqué, la FFEC estimait que plus de 12.000 salariés des 7.100 micro-crèches de France étaient désormais tenus d'obtenir un diplôme d'État avant le 1er septembre 2026, "alors que moins de 8.000 personnes sont diplômées chaque année et qu’il manque déjà 10.000 professionnels dans les crèches de France".
Concilier montée en qualité et principe de réalité
Le nombre de postes vacants dans le secteur serait même de 13.700 ETP, selon les derniers chiffres de l'Observatoire national de la petite enfance qui confirme également que ce sont les micro-crèches qui créent actuellement massivement des places d'accueil (voir notre article). Pour tenter de concilier cette réalité – une pénurie de personnels, la nécessité de maintenir les équipes en place et de favoriser les recrutements – et l'objectif de renforcement de la qualité d'accueil du jeune enfant (voir notre article), le ministère du Travail prépare depuis plusieurs mois une nouvelle certification professionnelle : celle d'intervenant éducatif petite enfance (IEPE).
Publié au Journal officiel du 13 décembre 2025, un décret a modifié le code de la santé publique pour y ajouter une nouvelle catégorie de personnels de catégorie I : les "titulaires du titre professionnel de niveau équivalent qualifiant pour l'encadrement des enfants dans les établissements d'accueil des jeunes enfants, délivré par le ministre chargé de l'emploi et enregistré au répertoire national des certifications professionnelles". Les futurs titulaires de ce titre professionnel sont donc mis au même rang que les auxiliaires de puériculture, les psychomotriciens, les éducateurs de jeunes enfants, les infirmiers et les puériculteurs, tous diplômés d'État, par opposition aux personnels de catégorie II que sont les "personnes ayant une qualification ou une expérience". Dans les établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE), le personnel chargé de l'encadrement des enfants "est composé d'au moins un professionnel [de catégorie I] à hauteur d'un équivalent temps plein", précise le même article du code.
VAE : une task force pour "fluidifier le passage en jury"
Au JO du 14 décembre 2025, est paru l'arrêté créant le "titre professionnel d'intervenant éducatif petite enfance". Ce titre est composé de trois blocs de compétences : "Contribuer à l'accueil des jeunes enfants et à la réponse à leurs besoins fondamentaux", "Accompagner le développement des jeunes enfants" et "Accompagner les parents ou l'entourage des jeunes enfants". Ces blocs sont "sanctionnés par des certificats de compétences professionnelles (CCP)".
Délivrée "exclusivement en modalité présentielle" – par opposition aux CAP petite enfance à distance qui avaient été critiqués –, la formation préparant au titre d'IEPE est "d'une durée minimale de 1.400 heures constitué d'une formation théorique d'une durée minimale de 980 heures et d'une période en entreprise d'une durée minimale de 420 heures". Le référentiel prévoit les conditions de la validation des acquis de l'expérience (VAE), qui devrait être la voie privilégiée par le secteur pour aller vers une certification des équipes en place. "Une task force dédiée est mobilisée pour fluidifier le passage en jury des certifications particulièrement demandées, en particulier dans les secteurs réglementés de la petite enfance et du sanitaire et social", avait indiqué le gouvernement en juillet dernier, dans son dossier de presse de présentation de la transformation de la VAE.
La crainte d'une fragilisation des auxiliaires de puériculture
Le Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE) a toutefois appelé les professionnels au boycott des jurys qui se constitueront pour cette certification, considérant que cette réforme représente "un tournant préoccupant pour l’accueil du jeune enfant en France". Le SNPPE redoute en particulier que ce nouveau titre "fragilise les auxiliaires de puériculture, profession réglementée à socle sanitaire", qu'il "[affaiblisse] le rôle éducatif structurant" des éducateurs de jeunes enfants et qu'il "crée, pour ses propres titulaires, une précarité diplômante, le titre étant limité dans le temps sans garantie de reconnaissance durable".
"Cette réforme s’inscrit dans une logique de dérégulation profonde du secteur" et ne réglera rien, juge le Syndicat. Pour ce dernier en effet, "la crise de la petite enfance ne résulte ni d’un manque de diplômes, ni d’une insuffisance de formations, mais de conditions de travail dégradées, de rémunérations insuffisantes et d’un déficit chronique de reconnaissance professionnelle".
| Références : décret n° 2025-1207 du 10 décembre 2025 relatif aux qualifications des personnels chargés de l'encadrement des enfants dans les établissements d'accueil du jeune enfant, publié au Journal officiel du 13 décembre 2025, et arrêté du 12 décembre 2025 portant création du titre professionnel d'intervenant éducatif petite enfance, publié au Journal officiel du 14 décembre 2025. |