Les communes pas toutes logées à la même enseigne face aux stupéfiants

Une étude du SSMSI met en relief l'influence de certaines caractéristiques démographiques, géographiques ou encore socio-économiques sur le taux de mis en cause pour usage ou trafic de stupéfiants dans les communes. La présence de certains équipements, mais aussi la fréquence des contrôles, jouent également. Toutes ces données neutralisées, l'étude met en outre en relief certains "particularismes régionaux", sans les expliquer.

Si l'on sait que le narcotrafic n'épargne désormais aucun territoire (lire notre article du 11 janvier 2024), explosant même dans "l'hyper-ruralité" (lire notre article du 31 janvier) – quand bien même 9 communes sur 10 ne seraient pas directement affectées (lire notre article du 27 mars) –, une étude du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) publiée ce 26 juin montre que les personnes mises en cause pour trafic ou usage de stupéfiants ne sont pas uniformément réparties dans les communes françaises. Elle met en relief le fait que plusieurs caractéristiques socio-économiques, démographiques, géographiques ou encore la présence de certaines infrastructures, voire "des effets régionaux" non expliqués, influent sur les résultats. 

L'influence de la densité, de certains équipements et… de la fréquence des contrôles

Certaines caractéristiques ne surprendront guère. Le nombre de personnes mises en cause s'élève ainsi avec le degré de densité de la commune. Les grandes aires d'attraction des villes sont ainsi singulièrement concernées, tant pour le trafic que pour l'usage, même si un nombre de mis en cause élevé peut également être relevé en dehors de ces dernières, comme en région Paca, "et plus particulièrement à proximité de la frontière italienne". De manière générale, les communes frontalières ou disposant d'un aéroport sont plus susceptibles d'enregistrer des mis en cause pour trafic, notamment du fait que les contrôles y sont plus fréquents. Plus généralement, la présence d'une police municipale ou d'un point d'accueil de la gendarmerie font aussi gonfler les statistiques. Le même argument est avancé pour les quartiers de reconquête républicaine, dont la présence est associée à un plus fort taux de mis en cause du fait des renforts d'effectifs.

L'activité touristique est également une variable importante, tant au regard du trafic que de l'usage. Une tendance notamment expliquée par le fait que l'été est propice à l'expérimentation de drogues. En outre, les communes touristiques sont des zones où la part de logements secondaires est importante. Or, relève l'étude, "un fort lien" est observé entre la part des résidences secondaires et le taux de mis en cause pour usage et, dans une moindre mesure, pour trafic. Le caractère touristique d'une ville n'est d'ailleurs pas sans lien avec l'existence et l'équipement des polices municipales (lire notre article du 29 octobre).

La présence de certaines infrastructures joue également un rôle. Il en va ainsi d'un établissement pénitentiaire, qui entraîne un nombre de mis en cause plus important, que l'étude explique notamment par la consommation et le trafic de stupéfiants au sein même de ces établissements. L'existence d'infrastructures de transport, comme une aire d'autoroute, une route nationale ou une gare régionale, est également associée à un plus fort taux d'usage.

Influence de l'âge, du niveau de vie, de la structure familiale et de la présence d'étrangers

Le fait que les infractions à la législation étant "majoritairement commises par des personnes jeunes" (25 ans en moyenne, contre 32 ans pour l'ensemble des autres infractions) explique logiquement que les communes ayant une population comprise entre 25 et 64 ans plus élevée que les autres enregistre un taux de mis en cause plus important. Un taux qui varie aussi en fonction de la structure du foyer : il "diminue lorsque la part des familles parmi les ménages augmente", les familles monoparentales étant plus exposées.

Par ailleurs, plus le niveau de vie médian des habitants d'une commune est élevé, moins le nombre de mis en cause par habitant est susceptible de l'être. Dans la même logique, plus le taux de chômage des 15-64 ans est élevé, plus le nombre d'infractions pour usage l'est également. Et plus la part des résidences principales occupées par leurs propriétaires est élevée, plus faible est le nombre de mis en cause. L'étude relève encore qu'une "commune avec une part d'étrangers dans la population plus importante est également susceptible d'enregistrer plus de mis en cause pour usage de stupéfiants, tout particulièrement dans les communes urbaines". 

"Particularismes régionaux"

En neutralisant les effets des caractéristiques géographiques, sociales, économiques et démographiques, l'étude met par ailleurs en relief "des effets régionaux propres". Ainsi, une commune de l'ouest de la France métropolitaine (singulièrement en Bretagne) est-elle moins susceptible d'enregistrer des mis en cause pour usage de stupéfiants, alors que c'est l'inverse pour les communes situées globalement dans les régions de l'est, et singulièrement dans les Hauts-de-France, en Île-de-France, en Bourgogne - Franche-Comté et en Paca. S'agissant du trafic, les communes les plus exposées de la métropole se trouvent en  Ile-de-France, Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté, et les moins exposées en Bretagne, Pays-de-la-Loire, Centre-Val-de-Loire et en Occitanie. Que ce soit pour l'usage ou le trafic, la Corse apparaît toujours comme la moins affectée (dans sa circulaire de politique pénale pour l'île du 5 juin, le garde des Sceaux y pointe toutefois "l'essor des trafics de produits stupéfiants"). Outre-mer, l'étude fait état d'une "situation contrastée", en mettant en exergue la situation particulière de la Guyane, "zone de transition de la cocaïne produite en Amérique du Sud", dont on sait qu'elle est une "véritable plaque-tournante" du trafic, avec le fleuve Maroni "porte d'entrée de tout ce qui est illicite".

 

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