Piscines publiques : réduire les horaires, baisser la température... ou baisser le rideau

Les collectivités recherchent diverses solutions pour réduire la facture de leurs piscines face à la hausse des prix de l'énergie. On l'avait constaté dès le début de l'été. Les choses se confirment. Et l'arrivée de l'hiver sera une nouvelle étape.

Dès juillet une enquête sur les besoins des piscines menée par de nombreux acteurs du secteur sportif mettait en lumière les conséquences de la hausse des prix de l'énergie sur le fonctionnement des piscines publiques (lire notre article du 21 juillet). Au-delà de quelques rares cas de fermeture, y apparaissait le plus souvent l'idée de diminuer la température tant de l'eau que de l'air. Un peu plus d'un mois plus tard, les choses semblent se confirmer. Baisse du thermostat et/ou réductions des plages horaires sont bien d'actualité.

"Nous sommes devant un patrimoine vieillissant et gourmand en énergie", explique France urbaine. Et les 4.000 piscines publiques sont majoritairement chauffées au gaz. Un gaz cher qui pourrait être plus rare cet hiver. En rappelant que les piscines ont déjà pris de plein fouet les fermetures dues au Covid, avec une perte de 200.000 euros en moyenne par équipement.

Les exemples de décisions visant à contenir la note ne manquent pas. A Échirolles (Isère), depuis début juillet, la température de l'eau est passé de 27 à 25 degrés à l'extérieur et de 27,5 à 26 à l'intérieur. Un degré en moins représente une économie de 7%, selon la ville.

Dans les environs de Montpellier, les piscines de Lansargues, Palavas-les-Flots, Mauguio et La Grande Motte devront "fermer un jour par semaine".

À Paris, qui compte une quarantaine de bassins tout public et dix bassins écoles, "on veut tout faire pour éviter les fermetures", explique à l'AFP Pierre Rabadan, maire adjoint au sport. Certaines piscines sont actuellement fermées pour cause de travaux de rénovation énergétique. Mieux filtrer l'eau, changer les éclairages... un plan destiné à faire de 30 à 35% d'économies d'énergie.

Mais dans certaines collectivités, des projets de rénovation énergétique tombent à l'eau… précisément pour pouvoir payer la facture d'énergie, explique aussi France urbaine.

Abaisser la température ? À Paris, Pierre Rabadan n'est pas très chaud. Là où des adultes peuvent supporter une eau plus fraîche, la question se pose pour les enfants ou les bébés nageurs. "On l'avait fait une fois et on avait fait machine arrière en raison des scolaires", explique-t-il. Varier en fonction des saisons est peut-être plus envisageable. "On est sur un 'trend' unique 27 degrés point final qu'il fasse deux degrés dehors ou 30 degrés ; on peut peut-être aller plus finement", s'interroge-t-il.

Si l'idée est de "tenir sans avoir à réduire les amplitudes horaires", tout dépend de la tournure que prendra la facture - qui n'est pas encore évaluée pour 2022.

Pour Vincent Saulnier, secrétaire général de l'Association nationale des élus du sport (Andes), la question de la température et des fermetures sera étudiée dans le cadre des discussions sur le volet sport du plan de sobriété énergétique qui a tenu sa première réunion la semaine dernière (voir notre article du 31 août). Son association a aussi réclamé un report des obligations de vidange compte tenu de la sécheresse estivale (voir notre article du 30 août).

D'ailleurs dans certaines villes, des piscines vidées au début de l'été ne peuvent pas être remplies du fait de la restriction des usages de l'eau. C'est le cas dans la ville de Bourges qui attend de pouvoir re-remplir ses deux piscines. Pour l'instant, le maire, Yann Galut, envisage de laisser la piscine de quartier, "peu fréquentée", ouverte seulement pour les scolaires et pendant les vacances d'été, a-t-il expliqué à l'AFP. Dans l'autre piscine, la température a déjà été baissé de 0,5 degré. "On ne peut pas faire n'importe quoi avec nos piscines", explique-t-il compte tenu de l'importance de l'apprentissage de la natation. "Pour les habitants, la piscine est un équipement essentiel", rappelle-t-il.

Selon un sondage interne réalisé par France urbaine dans 108 territoires, 10% envisagent des fermetures totales ou partielles cet hiver.

Au-delà de ces solutions à court terme, il faut "un plan Marshall avec un milliard d'euros sur cinq ans pour la rénovation énergétique des équipements sportifs", prévient Vincent Saulnier, adjoint au maire de Château-Gontier-sur-Mayenne et président du comité de pilotage des JO de son département.

Une information tombée ce lundi après-midi est toutefois venue donner une dimension très concrète à ce court terme : une trentaine de piscines publiques, à Limoges, Granville (Manche) ou Versailles notamment, ont brutalement fermé leurs portes ce 5 septembre. La société Vert Marine qui les exploite affirmant dans un communiqué ne plus pouvoir faire face à l'augmentation des prix de l'énergie.

Environ 10% des 4.000 piscines publiques françaises sont gérées via une délégation de service public. La société Vert Marine a dû fermer "pour une durée temporaire" un tiers de ses établissements et a placé "les personnels en chômage partiel". La facture énergétique de ce délégataire de service public est passée de "15 à 100 millions d'euros", soit "la totalité du chiffre d'affaires annuel de l'entreprise". La société, qui a des discussions avec les collectivités depuis juin, n'a pas pu trouver de solution à ce stade, a-t-elle précisé à l'AFP. Elle affirme ne pas vouloir procéder à une multiplication des tarifs par trois.

Elle en appelle ainsi "aux instances locales et gouvernementales afin de prendre les décisions nécessaires et inédites pour revenir à des coûts supportables de l’énergie et permettre d’assumer les obligations de service public, et en premier lieu l'apprentissage de la natation notamment en milieu scolaire", explique cette société qui compte 2.000 salariés. Sur les 90 piscines et patinoires qu'elle gère, certains contrats de délégation ne comprennent pas le coût de l'énergie.