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Energie - Proposition de loi Brottes : le Sénat vote le texte sans le bonus/malus

En nouvelle lecture, les sénateurs ont finalement adopté le 14 février la proposition de loi Brottes qu'ils avaient précédemment rejetée mais ils l'ont amputée de sa mesure phare, le bonus/malus sur les consommations d'énergie. Ils ont cependant conservé le volet éolien, en l'assortissant de plusieurs amendements.

Par 176 voix contre 139, les sénateurs ont finalement adopté le 14 février la proposition de loi Brottes "visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes". Mais ils l'ont vidée de son principal objet, à savoir l'instauration d'un bonus/malus sur la consommation des énergies de réseau (électricité, gaz, chaleur). Seule l'UMP a voté contre le texte. Les autres groupes, communistes et centristes compris, l'ont approuvé. Mireille Schurch, du groupe CRC (communiste), a redit tout le mal qu'elle pensait du bonus/malus "complexe, injuste, contre-productif", mais s'est félicitée du volet social et du "compromis" obtenu sur l'éolien. Ladislas Poniatowski (UMP) a fait de même estimant que le bonus/malus "met en cause le principe de la péréquation" des tarifs, annonçant que son groupe déposerait un recours devant le Conseil constitutionnel. Chantal Jouanno (UDI-UC) et Jean-Claude Requier (RDES, à majorité radicaux de gauche) ont apporté leur soutien à un texte expurgé de ce bonus/malus "injuste". Seul André Gattolin (EELV) a regretté la suppression de ce dispositif au "caractère incitatif" pour la sobriété energétique.
Le gouvernement devrait maintenant demander aux députés, qui ont le dernier mot, de statuer définitivement. "Je fais confiance à l'Assemblée nationale pour maintenir le dispositif du bonus/malus", a déclaré la ministre de l'Ecologie, Delphine Batho, assurant que "la cohérence de ce texte c'est la lutte contre la précarité énergétique".
Outre la suppression de l'article sur le bonus-malus, les sénateurs ont apporté d'autres modifications dans le titre 1er de la proposition de loi. Le groupe UMP a fait ajouter un article (1er B) qui complète l'article L100-1 du Code de l'énergie relatif aux objectifs de la politique énergétique. Outre "assurer la sécurité d'approvisionnement ; maintenir un prix de l'énergie compétitif ; préserver la santé humaine et l'environnement, en particulier en luttant contre l'aggravation de l'effet de serre", elle doit garantir la cohésion sociale et territoriale en assurant l'accès de tous à l'énergie "dans le respect des principes d'égalité et de continuité, notamment au travers de la péréquation nationale des tarifs de vente de l'électricité aux consommateurs domestiques, de l'harmonisation de ces tarifs pour le gaz et de la péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution".
Les sénateurs ont aussi modifié l'article 2 demandant au gouvernement un rapport sur la pointe électrique. Ils demandent un autre rapport "contradictoire" portant "sur les conséquences sociales, environnementales et économiques, notamment sur l'évolution des prix des énergies, du processus d'ouverture à la concurrence du secteur de l'énergie". Ce rapport devra être rendu "avant le 31 mars 2013".
Le Sénat a par ailleurs soutenu les articles 7 à 7 sexies relatifs à l'effacement, ainsi que l'article 8 sur l'extension de la trêve hivernale et les articles 9 à 12 portant notamment sur la Commission de régulation de l'énergie (CRE).

Eolien : les ZDE ne seront pas rétablies

L'article 12 ter, qui introduit la possibilité de procéder au raccordement au réseau des installations marines utilisant des énergies renouvelables par le passage de canalisations électriques souterraines dans les espaces remarquables du littoral, a été adopté après avoir été amendé. Le rapporteur Daniel Raoul (PS, Maine-et-Loire), également président de la commission des affaires économiques, déplace la procédure de vérification de l'absence d'atteinte à l'environnement ou aux sites et paysages remarquables "plus en amont, au stade de la déclaration d'utilité publique (DUP) des travaux". "A ce stade, l'autorité compétente dispose en effet de l'ensemble des informations (étude d'impact, avis de l'autorité environnementale…) lui permettant d'apprécier l'impact éventuel du projet sur l'espace remarquable en question", a justifié Daniel Raoul. Cet amendement a été adopté contre l'avis de Delphine Batho.
Par ailleurs, le Sénat étend, avec avis favorable du gouvernement, le champ de l'article aux canalisations électriques du "réseau public de transport ou de distribution d'électricité visant à promouvoir l'utilisation des énergies renouvelables". Il s'agit d'autoriser les interconnexions transfrontalières, "tout particulièrement du projet de liaison sous-marine entre la France et l'Espagne", selon Daniel Raoul.
Les sénateurs ont aussi tempéré l'assouplissement de l'implantation de l'éolien voulu par le gouvernement. Ils ont rejeté les amendements visant à rétablir les zones de développement de l'éolien (ZDE) supprimées par l'article 12 bis de la proposition de loi. Par contre, ils ont adopté un amendement présenté par Mireille Schurch et le groupe communiste proposant que les schémas régionaux éoliens adoptés avant la promulgation de la loi soient révisés dans la mesure où ils ont été conçus avec la perspective des ZDE. Surtout, ils ont voté, contre l'avis de Delphine Batho, un amendement de Daniel Raoul qui prévoit la constitution de parcs d'au moins trois éoliennes ou d'une puissance minimale de 6 mégawatts pour bénéficier de l'obligation d'achat de l'électricité produite par EDF. Le texte initial ouvrait la possibilité d'implantation d'une seule éolienne.
L'article 12 quater, qui exonère l'éolien terrestre de l'application de la loi Littoral dans l'outre-mer, a également été modifié. Jusqu'ici, l'exonération pouvait être autorisée "après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites et des ministres chargés de l'Urbanisme, de l'Environnement et de l'Energie". Les sénateurs ajoutent l'avis de "la commission départementale de consommation des espaces agricoles". L'amendement, d'origine UMP, a été soutenu par Daniel Raoul, mais pas par Delphine Batho, selon qui la procédure "permet déjà de refuser l'implantation d'éoliennes dans ce cas".

Tarif social de l'eau : expérimenter... et évaluer

Le Sénat a en outre modifié l'article 14 relatif à l'expérimentation par les collectivités d'un tarif social de l'eau. Il reporte au 31 décembre 2014 la date limite de transmission de la demande d'expérimentation, et non plus au 31 décembre 2013. Ceci, pour permettre aux équipes municipales issues des prochaines élections d'engager l'expérimentation si elles le souhaitent, selon l'explication de Michel Teston (PS, Ardèche), rapporteur pour avis de la commission du développement durable. Dès lors, le calendrier global est reporté d'un an : le Comité national de l'eau, chargé du suivi et de l'évaluation de l'expérimentation, remettra au gouvernement, "avant la fin de l'année 2015, un rapport décrivant les actions engagées dans le cadre de l'expérimentation et, avant la fin de l'année 2017, un rapport d'évaluation et de proposition, un rapport intermédiaire étant remis avant la fin de l'année 2016".
Les sénateurs ont aussi décidé que les collectivités pourront instaurer un tarif progressif pouvant inclure "des premières tranches de consommation gratuite", et non plus une seule tranche. Pour l'auteur de l'amendement, Philippe Kaltenbach (PS, Hauts-de-Seine), il s'agit ainsi de ne pas exclure les " familles nombreuses qui peuvent être en situation très fragile".
Enfin, Hervé Marseille (UMP, Hauts-de-Seine) et Christian Cambon (UMP, Val-de-Marne), ont créé une nouvelle obligation pour les collectivités locales mettant en place une expérimentation. Elles devront évaluer cette dernière "au sein du rapport annuel sur le prix et la qualité du service public de l'eau potable […] en établissant une partie chiffrant les coûts de gestion rendus nécessaires par la mise en œuvre du dispositif d'aide sociale, afin de les comparer au volume d'aides apportées". Un arrêté interministériel du ministre de l'Economie et du ministre de l'Ecologie "fixe les postes de coûts devant figurer dans ce chiffrage", précise l'amendement.

 

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