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Espaces verts - Réduction des phytosanitaires : une étude relativise l'intérêt des techniques de désherbage alternatif

Un bureau d'étude indépendant, Evea, vient de révéler les résultats d'une étude qui fait du bruit dans les services espaces verts des collectivités. Commanditée par le groupe Bayer, leader européen dans la production de phytosanitaires, elle appelle en cela à une lecture prudente. Elle a été néanmoins soumise à l'analyse critique du Cemagref et de l'Ademe et ses résultats sont suffisamment éloquents pour alimenter le débat. Réalisée en croisant des données scientifiques de type analyses de cycles de vie (ACV) et d'autres recueillies sur le terrain dans onze communes françaises, elle porte sur les impacts environnementaux de trois techniques de désherbage alternatif : la technique à eau chaude, le désherbage thermique à infrarouge et la technique de projection de mousse chaude. Ce comparatif intègre bien sûr la méthode chimique, quelque peu mise à mal depuis que nombre de services espaces verts s'engagent dans des démarches de type "zéro phyto".

Les résultats de l'étude sont surprenants : en passant au crible douze indicateurs d'impacts environnementaux, elle démontre que le désherbage chimique n'est pas forcément la technique la plus nocive. Elle ne nie pas que celle-ci l'est en termes d'impact sur les milieux aquatiques. Mais les autres le seraient à d'autres titres non moins inquiétants : la technique à infrarouge serait ainsi la plus impactante pour 7 des 12 indicateurs environnementaux retenus (écotoxicité des milieux terrestres, acidification et eutrophisation, émission de particules fines, etc). Cette méthode consomme toutefois peu d'eau et d'énergie, deux postes pour lesquels la technique à mousse chaude est la plus impactante. En matière de toxicité humaine, la technique à eau chaude serait la plus nocive car elle nécessite entre autres de nombreux passages annuels. En comparaison, la technique chimique consommerait notamment moins d'eau et d'énergie, augmenterait moins l'acidification des sols et émettrait moins de particules.

Les alternatives et remèdes sont-ils pires que le mal ? Le débat était déjà ouvert dans les rangs des services espaces verts, mais il s'enrichit ici de nouvelles données chiffrées. Toutefois, comme l'a noté l'hebdomadaireLien Horticole,cette étude présente des carences et ne prend ni en compte les formes de désherbage manuel (arrachage, binage) et mécanique (balayage), ni des techniques alternatives aussi prisées par les services espaces verts que l'enherbement, le paillage et le mulching, une technique de fertilisation naturelle. Par ailleurs, ses résultats s'appliquent essentiellement au traitement des voies et allées. Ils ne recouvrent pas celui de zones plus complexes à traiter (parcs, places), où une mixité de techniques généralement s'impose. En guise de contre-offensive, le réseau des fédérations de défense contre les organismes nuisibles, très actif auprès des collectivités, préparerait une étude dressant également un écobilan des techniques de désherbage alternatif.

 

Morgan Boëdec / Victoires éditions