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"Services vélos" : une montée en puissance sur tout le territoire

L’actualisation de l’étude sur les "services vélos" que vient de publier l’Ademe constate un développement et un déploiement de l’offre sur l’ensemble du territoire, avec une progression des bouquets de services – nécessaires pour une pérennisation de la pratique. Si l’impact sur l’usage de la voiture semble réel, il reste aujourd’hui à élargir le cercle des pratiquants de la bicyclette.

Alors que l’on célèbre les trois ans du plan "Vélo et mobilités actives", et que de nouveaux programmes ont été annoncés à cette occasion (voir notre article), l’Ademe vient de publier l’actualisation de son étude d’évaluation des "services vélos" menée en 2015 (voir notre article de 2016).

Démocratisation des services sur tout le territoire

Sans surprise, l’Ademe relève "une très bonne dynamique en ce qui concerne le développement et le déploiement de l’ensemble des services sur tout le territoire". Si un décalage persiste entre les grandes villes – "toutes dotées de vélos en libre-service" – et le reste du pays, l’agence constate que le stationnement sécurisé, "en grande partie porté par les régions", les aides locales à l’achat, la location longue durée et les réseaux d’ateliers d’autoréparation "tendent à se démocratiser partout, y compris sur les territoires peu et moyennement denses".

Report modal en marche

L’ensemble de ces services génère "une baisse significative de l’utilisation de la voiture", assure l’Ademe. L’aide à l’achat et la location de longue durée seraient les solutions les plus efficaces pour favoriser le report modal : 63% des bénéficiaires d’une aide locale à l’achat interrogés affirment ainsi avoir réduit l’usage de leur voiture. Les vélos en libre-service permettraient de réduire en moyenne le kilométrage en voiture de leurs usagers de 183 km tous les mois – jusqu’à 236 km/mois avec les vélos à assistance électrique. Les services de location de longue durée de ces derniers auraient en outre permis à 13% des abonnés interrogés de renoncer à l’achat d’une voiture et à 12% d’entre eux de se séparer de la leur.
L’impact sur les transports publics resterait, lui, "positif", estime Élodie Barbier Trauchessec, animatrice "Mobilités émergentes" au sein de l’agence, les usagers délaissant ces derniers pour le vélo étant compensés par ceux les rejoignant précisément du fait du développement des solutions vélos et d’une meilleure intermodalité.

Nécessité d’un bouquet de services

Élodie Barbier Trauchessec insiste néanmoins sur la nécessité de "sortir d’une vision en silo, service par service, qui n’a guère de sens. Seul un bouquet de services permet d’ancrer les changements de comportements", explique-t-elle. Si l’animatrice distingue les services nécessaires pour "mettre le pied à la pédale" (les solutions de locations, les services en entreprises, les vélos-écoles, les randonnées urbaines…) de ceux qui permettent de "pérenniser la pratique" (l’aide à l’achat, les ateliers d’autoréparation, le stationnement sécurisé...), elle pointe par exemple le fait que sans stationnement sécurisé, l’aide à l’achat manquera sa cible.
Les collectivités semblent l’avoir bien compris. L’étude constate que leur offre de service "est de fait rarement unique", le binôme atelier d’autoréparation / location de longue durée étant le plus fréquent.

Élargir le cercle des pratiquants

Reste que l’objectif de 9% des déplacements quotidiens à vélo en 2024 – qualifié d’"ambitieux" par Élodie Barbier Trauchessec – semble encore fort loin. L’Ademe déplore que le vélo reste principalement une affaire d’ "homme, actif, de 35 à 45 ans, CSP+". Même si quelques services touchent néanmoins "des cibles d’usagers plus diversifiés" : les étudiants et les "personnes à plus faibles ressources" avec la location longue durée de vélos classiques, les femmes avec la location longue durée de vélos à assistance électrique.
Pour Élodie Barbier Trauchessec, le principal défi pour les collectivités est donc d’élargir le cercle des usagers – "d’aller chercher les étudiants et les retraités !". Et ce en favorisant la location longue durée plutôt que les vélos en libre-service, "très pertinents seulement en milieu urbain dense", en élargissant l’offre proposée (les vélos cargos pour les familles, les vélos adaptés aux personnes à mobilité réduite…), etc. Elle fait également valoir l’importance des "vélos écoles" et du programme "Savoir rouler à vélo" pour faire de la France une "Nation cyclable". Le Club des villes et territoires cyclables s'était en début d'année fixé l'objectif de 200.000 enfants formés avant leur entrée au collège en 2022, se réjouissant du fait que "de plus en plus de collectivités sont volontaires" (voir notre article).

Stationnement sécurisé, facteur clé de succès

L'Ademe insiste également sur la nécessité de stationnements sécurisés, que ce soit sur les lieux d’intermodalité, à proximité des lieux de résidence, dans les centres urbains et les lieux de travail. Leur absence constituerait ainsi le principal obstacle à l’essor du vélo en entreprise. Élodie Barbier Trauchessec relativise en revanche la question de l’hygiène : "certes un véritable frein psychologique, mais que l’on retrouve principalement chez les non-cyclistes. Dans nombre de cas – cela dépend évidemment du dénivelé, du climat… –, l’accès à une douche n’est pas nécessaire", estime-t-elle. A l'appui de sa démonstration, elle rappelle que, selon l’Insee, 58% des actifs ayant recours à la voiture pour aller travailler parcourent moins d’un kilomètre (le taux flirtant avec les deux tiers pour un trajet de moins de 4 km, et les trois quarts pour un trajet de moins de 5 km). L’engouement pour les vélos à assistance électrique – "plus de 500.000 ventes l’an passé" – devrait également atténuer la difficulté, et ouvrir de nouveaux horizons.