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Simplification - "Silence vaut accord" : J-8 avant le coup de sifflet d'une révolution laborieuse

Pour les administrations de l'Etat et de ses établissements publics, un silence de deux mois à l'issue d'une demande vaudra acceptation à partir du 12 novembre prochain... à quelque 700 exceptions près, que les décrets publiés le 1er novembre recensent. Urbanisme, environnement, médicosocial, état civil ou encore funéraire : les collectivités locales sont d'ores et déjà concernées, avant d'être elles-mêmes tenues de mener cette petite révolution dans leurs services l'année prochaine.

Les décrets fixant les exceptions au nouveau principe selon lequel le "silence de l'administration vaut acceptation" sont parus dans le Journal officiel du samedi 1er novembre. Selon l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, modifié par la loi du 12 novembre 2013 "habilitant le gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens", les services de l'Etat et de ses établissements publics seront tenus, dès le 12 novembre prochain, de répondre aux demandes qui leur seront faites dans un délai maximum de deux mois ; au-delà, leur silence vaudra accord. Un renversement de la "règle 'silence valant rejet', vieille de 150 ans" constituant une "véritable révolution administrative au profit des particuliers et des entreprises qui ne verront plus leurs droits limités par l’inertie administrative", avait estimé le secrétaire d'Etat à la simplification le 22 octobre, lors de la présentation des projets de décrets en Conseil des ministres. Bien que datés du 23 octobre, les décrets ne sont sortis que dix jours après cette communication. Un retard que l'on comprend aisément, au regard de l'ampleur du chantier : 1.200 régimes d'autorisation concernés par ce nouveau fonctionnement, sur un total de 1.900 procédures d’autorisation recensées.

Quelque 700 exceptions

Il reste donc quelque 700 exceptions, recensées par 42 décrets émanant du Premier ministre et de 14 ministres – soit de l'ensemble du gouvernement, à l'exception de la ministre des Outre-mer et du ministre de l'Economie. A l'issue d'une "revue exhaustive de l’ensemble des procédures d’autorisations prévues par des textes législatifs ou réglementaires dans tous les ministères", les décrets fixent trois types d'exception à la nouvelle règle générale "silence vaut accord".
Premier type d'exception, deux mois de silence de l'administration continueront à signifier un refus. Deuxième cas de figure, le silence vaudra refus, mais à l'issue d'un délai autre que deux mois (parfois plus court, parfois plus long). Lorsque les décrets vont par trois – ce qui est le cas pour la quasi-totalité des ministères concernés -, ce sont le premier et le troisième de la série qui fixent ces exceptions, respectivement "pour des motifs tenant à l'objet de la décision ou pour des motifs de bonne administration" et en vertu du "respect des engagements internationaux et européens de la France, la protection de la sécurité nationale, la protection des libertés et des principes à valeur constitutionnelle et la sauvegarde de l'ordre public".
Troisième type d'exception : pour certaines procédures, le silence vaudra bien accord, mais à l'issue d'un délai autre que deux mois (parfois moins, parfois plus). Lorsque les décrets vont par trois, c'est le deuxième décret qui recense les autorisations objet de cette exception "pour des motifs tenant à l'urgence ou à la complexité de la procédure".

Les collectivités concernées, même avant le 12 novembre 2015 

Pour les collectivités territoriales, comme pour les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés d’une mission de service public, la petite révolution n'interviendra que dans un an, au 12 novembre 2015. Les collectivités et leurs partenaires, notamment associatifs, sont pourtant d'ores et déjà intéressés, et à plusieurs titres, par l'évolution du fonctionnement des administrations centrales. Tout d'abord, nombre de procédures d'autorisations les concernent directement puisque, bien souvent, la mise en œuvre de leur action les oblige à solliciter l'accord de l'Etat dans des domaines variés (pour l'ouverture d'un établissement recevant du public notamment). En outre, pour certaines politiques mises en oeuvre de façon conjointe par des administrations déconcentrées et décentralisées, l'évolution des régimes d'autorisation régies par l'Etat et s'imposant aux administrés peut conduire très rapidement les collectivités à revoir leurs propres procédures (tarification et gestion des établissements médico-sociaux par exemple).
Plus globalement, dans la mesure où les collectivités ont encore un an pour se préparer à modifier leurs propres pratiques de délivrance d'autorisations, l'expérience de l'Etat, tant au niveau des choix effectués que dans la méthode suivie, peut utilement servir de terrain d'observation. En effet, certaines difficultés apparaissent déjà à ce stade. Le nombre important d'exceptions démontre ainsi qu'il n'est pas aisé, pour les ministères, de concilier sécurité juridico-administrative et atteinte de l'objectif initial. Si l'on est encore loin de la simplification attendue – peut-être faut-il pour cela d'abord en passer par des étapes intermédiaires de plus grande complexité… -, les décrets et leur louable effort de recensement systématique des procédures d'autorisation cherchent aussi à "bousculer" quelque peu l'administration. "Les services vont se mobiliser pour répondre vite", a ainsi présenté François Hollande le 30 octobre. 

Un enjeu de communication 

Autre défi à relever pour les administrations d'Etat d'ici le 12 novembre – date de l'entrée en vigueur du nouveau principe général et de la republication des décrets dans leur version consolidée -, celui de la cohérence d'ensemble. En effet, il semble que, d'un ministère à l'autre, les choix n'aient pas été les mêmes sur des procédures similaires, telles que l'agrément des associations (voir encadré ci-dessous).
Enfin et surtout, la communication à destination des citoyens apparaît comme un point décisif, pour que cette "révolution" puisse porter ses fruits. La phase de concertation autour des projets de décrets n'ayant pas réussi à attirer l'attention du grand public sur le sujet, les services de l'Etat devront trouver différentes voies pour informer les Français de ces nouvelles modalités de consentement tacite. Les administrations pourront normalement s'appuyer sur un site internet relevant du Premier ministre. Prévu par la loi, ce site doit publier "la liste des procédures pour lesquelles le silence gardé sur une demande vaut décision d'acceptation" et mentionner "l'autorité à laquelle doit être adressée la demande, ainsi que le délai au terme duquel l'acceptation est acquise". 

Caroline Megglé

Panorama non-exhaustif des procédures intéressant les collectivités et les associations

Urbanisme
Le silence continue à valoir refus
Après 1 an : décision sur permis de construire, d'aménager, ou de démolir, en site classé ou en instance de classement après accord exprès du ministre chargé des sites (délivrance au nom de l'etat en application de l'article L. 422-1). Décret n° 2014-1271.
Après 3 mois : permis de construire ou de démolir, dans les zones de protection créées antérieurement à la loi du 7 janvier 1983 en application du titre III de la loi du 2 mai 1930 sur les sites (délivrance au nom de l'Etat en application de l'article L. 422-1) Décret n° 2014-1271
Après 4 mois : inscription de terrains appartenant à l'Etat sur la liste des terrains destinés à être cédés pour y construire des logements. Décret n° 2014-1280.
Après 4 mois : inscription de terrains du domaine privé des établissements publics de l'Etat ou dont la gestion leur a été confiée par la loi sur la liste des terrains destinés à être cédés pour y construire des logements. Décret n° 2014-1280.
Après 6 mois : permis de construire, délivré au nom de l'Etat, pour travaux sur monument historique inscrit soumis à accord du préfet de région. Décret n° 2014-1299.
Après 2 mois : autorisation d'ouverture d'un établissement recevant du public. Décret n° 2014-1301.
Le silence vaut accord
Après 5 mois : permis de démolir, de construire ou d'aménager, délivré au nom de l'Etat lorsqu'il y a lieu de consulter une commission nationale. Décret n° 2014-1300
Après 5 mois : permis de construire, délivré au nom de l'Etat, portant sur des travaux relatifs à un établissement recevant du public et soumis à l'autorisation prévue à l'article L. 111-8 du Code de la construction et de l'habitation. Décret n° 2014-1300.
Après 5 mois : permis de construire, délivré au nom de l'Etat, portant sur des travaux relatifs à un immeuble de grande hauteur et soumis à l'autorisation prévue à l'article L. 122-1 du Code de la construction et de l'habitation. Décret n° 2014-1300.

Environnement
Le silence continue à valoir refus
Après 6 mois : désignation d'un organisme unique de gestion collective sur un territoire donné. Décret n° 2014-1271.
Après 6 mois : autorisation temporaire d'une installation, d'un ouvrage, de travaux, d'une activité, soumis à la loi sur l'eau. Décret n° 2014-1271.
Après délai prévu par la législation particulière au projet : autorisation d'un projet soumis à étude d'impact environnemental. Décret n° 2014-1273.
Après 2 mois : autorisation d'occupation ou d'utilisation temporaire du domaine public maritime ou fluvial. Décret n° 2014-1273.
Le silence vaut accord
Après 4 mois : habilitation à être désigné pour prendre part au débat sur l'environnement dans le cadre des instances consultatives ayant vocation à examiner les politiques d'environnement et de développement durable. Décret n° 2014-1272.
Après 3 mois (à compter de la notification de l'avis de l'organisme notifié auprès des ministères compétents) : agrément de dispositifs de traitement des eaux usées domestiques. Décret n° 2014-1272.

Transports
Le silence continue à valoir refus
Après 6 mois : dérogation à une spécification technique d'interopérabilité (du système ferroviaire). Décret n° 2014-1271.
Après 2 mois : autorisation de mise en circulation des véhicules de transport en commun de personnes. Décret n° 2014-1273.
Le silence vaut accord
Après 6 mois : dérogation à la réglementation technique de sécurité et d'interopérabilité hors réseau transeuropéen (ministère des transports). Décret n° 2014-1272.


Action sociale et médico-sociale
Le silence continue à valoir refus
Après 2 mois : habilitation des organismes autorisés pour l'adoption, pour l'exercice de leur activité au profit de mineurs étrangers. Décret n° 2014-1268.
Après 2 mois : dérogation au taux plafond d'évolution des tarifs des prestations d'hébergement des établissements accueillant des personnes âgées. Décret n° 2014-1280.
Après 2 mois : dérogation au taux plafond d'évolution des tarifs des prestations de certains services d'aide et d'accompagnement à domicile. Décret n° 2014-1280.
Après 2 mois : agrément des organismes procédant à la domiciliation. Décret n° 2014-1286.
Après 2 mois : agrément des organismes assurant l'accueil et l'hébergement de personnes en difficulté et qui ne relèvent pas de l'article L. 312-1 du Code de l'action sociale et des familles. Décret n° 2014-1286.
Après 6 mois : autorisation de création, d'extension et de transformation des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des lieux de vie et d'accueil soumis à la procédure d'appel à projet, lorsque la décision relève notamment de l'Etat. Décret n° 2014-1286.
Après 2 mois : habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale et autorisation à dispenser des prestations prises en charge par l'Etat ou l'assurance-maladie, lorsque la décision relève notamment de l'Etat. Décret n° 2014-1286.
Après 2 mois : accord sur le choix par le gestionnaire de l'établissement ou du service fermé de l'attributaire des sommes affectées à l'établissement ou service fermé, apportées par l'Etat, par l'agence régionale de santé, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou par les organismes de sécurité sociale, énumérées à l'article L. 313-19, lorsque la décision relève notamment de l'Etat. Décret n° 2014-1286.
Après 2 mois : accord de l'autorité de tarification sur les conditions de mise en œuvre de l'obligation de reversement des sommes affectées à l'établissement ou service fermé, apportées par l'Etat, par l'agence régionale de santé, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ou par les organismes de sécurité sociale, énumérées à l'article L. 313-19. Décret n° 2014-1286.
Le silence vaut accord
Après 3 mois : agrément pour l'exercice d'une activité s'adressant à un public fragile dans le secteur des services à la personne. Décret n° 2014-1281.
Après 4 mois : agrément des conventions collectives de travail, conventions d'entreprise ou d'établissement et accords de retraite applicables aux salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux à but non lucratif. Décret n° 2014-1287.
Après un délai (différent de 2 mois) non précisé dans la version initiale du décret : autorisation à porter le titre ou occuper un emploi d'assistant de service social accordée aux ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, à une convention internationale ou un arrangement en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Décret n° 2014-1287.
Après 4 mois (à compter de la date de publication de l'appel à candidature) : habilitation des personnes morales autorisées à recevoir des denrées obtenues au moyen de la cession des stocks d'intervention de l'Union européenne, des crédits du programme européen d'aide aux plus démunis ou des crédits du programme national d'aide alimentaire. Décret n° 2014-1297.

Etat civil
Le silence continue à valoir refus
Après 6 mois : autorisation de dispense de certaines conditions pour la célébration d'un mariage (articles 164 et 171 du Code civil). Décret n° 2014-1279.
Après 2 mois : inscription sur les listes électorales. Décret n° 2014-1292.
Après 2 mois : délivrance d'une carte nationale d'identité. Décret n° 2014-1292.

Agréments des associations
Le silence continue à valoir refus
Après 4 mois : demande d'agrément et de renouvellement d'agrément des associations de lutte contre la corruption. Décret n° 2014-1277.
Après 4 mois : agrément délivré aux associations, fédérations ou unions d'association régulièrement déclarées ayant une activité dans le domaine de l'éducation populaire et de la jeunesse. Décret n° 2014-1306.
Le silence vaut accord
Après 6 mois : agrément (et renouvellement d'agrément) des associations de protection de l'environnement. Décret n° 2014-1272.

Jeunesse – Sports
Le silence continue à valoir refus
Après 3 mois : organisation d'un accueil collectif à caractère éducatif hors du domicile parental, à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels ou des loisirs, public ou privé, ouvert à des enfants scolarisés de moins de six ans. Décret n° 2014-1306.
Après 6 mois (à compter de la réception de la demande) : demande d'homologation des enceintes destinées à recevoir des manifestations sportives ouvertes au public. Décret n° 2014-1308.

Forêts
Le silence continue à valoir refus
Après 2 mois : autorisation de défrichement des bois et forêts appartenant aux collectivités territoriales et autres personnes publiques mentionnées au 2° du I de l'article L. 211-1 du Code forestier (sans enquête publique). Décret n° 2014-1296.

Funéraire
Le silence continue à valoir refus
Après 2 mois : inhumation dans une propriété particulière. Décret n° 2014-1294.
Le silence vaut accord
Après 4 mois : autorisation de création et d'extension de chambres funéraires. Décret n° 2014-1293.  

Accès à des données de l'Etat – Traitement des archives
Le silence continue à valoir refus
Après 2 mois : demandes relatives à l'accès aux documents ou informations que les administrations d'Etat détiennent ou que détient l'administration des archives. Décret n° 2014-1264.
Après 2 mois : communication des listes catégorielles d'entreprises par les chambres de commerce et d'industrie territoriales et départementales d'Ile-de-France. Décret n° 2014-1280.
Le silence vaut accord
Après 10 mois : classement et déclassement des archives privées comme archives historiques. Décret n° 2014-1305.

Fonction publique
Le silence continue à valoir refus
Après 2 mois : "lorsque la demande est adressée par une personne en qualité d'ayant droit ou ayant cause d'un agent ; lorsque la demande s'inscrit dans une procédure d'accès à un emploi relevant de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics administratifs." Décret n° 2014-1303.

Divers - Insolite
Silence vaut accord
Après 4 mois : décision d'agrément pour la formation des élus locaux. Décret n° 2014-1293.
Après 4 mois : autorisation de fouilles dans les dunes du Pas-de-Calais. Décret n° 2014-1297.

 

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