Transition écologique : la ministre Monique Barbut entre sur le terrain

Auditionnée par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale ce 24 octobre, la nouvelle ministre de la  Transition Écologique, Monique Barbut, issue de la société civile mais rompue aux négociations climatiques, a traversé l’exercice sans trop de difficultés, soutenant notamment un budget dédié à l’écologie "perfectible" mais "pas sacrifié".

La nouvelle ministre de la Transition écologique, Monique Barbut a fait ses débuts à l’Assemblée nationale ce 24 octobre, aux côtés de ses deux ministres délégués Catherine Chabaud, chargée de la Mer et de la Pêche, et Mathieu Lefèvre, chargé de la Transition écologique, pour répondre aux questions des députés membres de la commission du développement durable. "Je ne suis pas pour une écologie punitive, je suis pour une écologie à laquelle les gens adhèrent, qu’ils comprennent", a d’emblée relevé la ministre issue de la société civile, et qui fut à la tête du WWF France durant quelques années. Peu d’informations concrètes ont toutefois transpercé de cette vision "d’une écologie du contrat et non de la contrainte", qui s’inscrit dans la continuité de celle défendue par les précédents gouvernements. 

C’est le cas de la ligne soutenue pour la politique énergétique française, qu'elle souhaite cohérente avec une "écologie du quotidien", combinant nucléaire et renouvelables. "Je considère pour ma part que notre système énergétique a besoin de ses deux jambes pour marcher", a-t-elle insisté, assurant qu’elle n’était pas "anti-atome", pour répondre à une interpellation du député RN Sébastien Humbert. "C'est une nécessité pour poursuivre l'électrification des usages et pour répondre à un impératif qui vous tient à cœur, la souveraineté énergétique", a ajouté la ministre. Elle a par ailleurs annoncé le même jour dans un entretien au journal Le Monde pousser pour la publication en novembre de la stratégie nationale bas-carbone.

Concernant l’éolien terrestre, "c'est vrai qu’il nous faut protéger nos paysages, nos campagnes (…) Cela sera une question d’équilibre, de discussion avec les collectivités locales et les préfectures pour savoir quoi ? où ? comment ?", a-t-elle précisé. 

Sur l’adaptation au changement climatique, "il nous faudra faire plus. (…) Cela doit être l'urgence absolue", a insisté la ministre. Cela suppose "des réglementations nationales" mais "c'est aussi un sujet très local", a-t-elle rappelé, s’agissant d’aider les collectivités à prendre les mesures "pour protéger leurs sols, pour protéger l'eau, pour être sûrs que les captages soient faits de façon intelligente, que les villes ne soient pas des îlots de chaleur, que les logements soient compatibles avec les deux, trois degrés que nous pouvons peut-être nous attendre à avoir dans les années à venir". Le fonds vert, dont le principe est "reconduit", devrait soutenir en 2026 un certain nombre d'actions du plan national d'adaptation au changement climatique (Pnac) "avec une priorité réaffirmée au recyclage des friches, à la rénovation énergétique, à la renaturation des villes mais aussi à la gestion du recul du trait de côte et à la prévention des risques", a soutenu la ministre, qui a pourtant dû justifier un fonds vert réduit à la portion congrue (650 millions d’euros prévus dans le PLF 2026). Une baisse qui n’est "pas arbitraire" et "trouve une justification dans le calendrier électoral" (avec en mars prochain les élections municipales). "Nous prévoyons que la demande sera moindre le temps que les conseils municipaux s’installent, que les besoins soient évalués et que les commandes soient faites", s’est ainsi expliquée la ministre. De son côté, le socialiste Stéphane Delautrette a notamment déploré "un total décalage avec la liste des projets sur les territoires qui attendent des financements". La ministre a également attiré l’attention sur le fait qu'il existe un fonds européen, le fonds Leader "qui est très peu employé". "Je ne considère pas que l'État est le financeur de la transition écologique. L'État est là pour être sûr de mettre en place les lois, les règlements qui amènent l'économie dans son ensemble à aller vers les bonnes trajectoires", a-t-elle aussi appuyé lors de son audition. "Bien sûr, il y aura des accompagnements financiers de l'État. Mais de mettre l'ensemble du budget nécessaire à la transition écologique en contrepoids du budget du ministère ne paraît pas complètement juste", selon elle.

Le budget de "8,4 milliards d'euros" pour le ministère de la Transition écologique est "stable". Il n’est donc "pas sacrifié", a martelé la ministre, saluant au passage "l'activité de (nos) agences qui font un travail remarquable", à l’exemple de l’Ademe, de l’ONF, de l’OFB et des parcs nationaux (la question de la fusion voire de la suppression de certaines agences de l’Etat est sur le tapis depuis quelques mois dans le cadre des travaux budgétaires). Des marges de progression sont par ailleurs possibles à ses yeux : "Nous proposons, nous débattons et vous votez", a-t-elle fait valoir en référence à la méthode promue par le Premier ministre lui même. En complément, elle a également invité  les parlementaires à se référer le plus possible au futur budget vert, qui devrait progresser en 2026 "de plus de 2 milliards d’euros". 

En sus du budget du ministère, certains domaines basculent dans le dispositif des certificats d'économie d’énergie (CEE). Ces derniers devraient augmenter globalement d'environ 27% et passer de 6 milliards d'euros en 2025 à "plus de 8 milliards en 2026". Trois activités rattachées au ministère en profiteront : MaPrimRénov’ (et ce malgré la coupe dans les crédits de l’Anah), et les dispositifs d’aide à la mobilité électrique, que sont le leasing social et le bonus écologique. Sur le volet rénovation énergétique, Mathieu Lefèvre a confirmé que ce sont environ 290.000 rénovations qui sont prévues l'an prochain : 145.000 gestes et 145.000 rénovations d’ampleur. Avec un "recentrage" à la fois sur les logements prioritaires en ce qui concerne les rénovations d’ampleur et des aides versées au titre des rénovations dites par 'gestes' ciblant en priorité la décarbonation. 

Autre sujet dans le viseur des associations de collectivités locales, la taxe sur les emballages plastiques non recyclés. Un levier fiscal que la ministre "assume complètement". Ce choix budgétaire "est clair" quand on met face à face "les 30 millions" au titre de cette taxation que débourseront les éco-organismes et "les 1,3 milliard d'euros versés [par la France] à l'Union européenne parce que nous ne recyclons pas suffisamment le plastique".  D’autre systèmes sont "peut-être aussi à envisager", par exemple la consigne sur les bouteilles en plastique, pour laquelle la ministre  attend "encore deux ou trois consultations" avant de prendre une décision. 

Toujours dans le domaine des déchets, Mathieu Lefèvre, a précisé que le décret afférent à la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les emballages professionnels - censée voir le jour au 1er janvier 2025 en application de la loi Agec - serait "signé dans les prochains jours" (la consultation publique sur le projet de cahier des charges s’est achevée le 23 septembre, celle sur le projet de décret il y a près d’un an). 

Très attendue la redevance pollueur-payeur suspendue à un décret d’application de la loi visant à protéger la population des risques liés aux PFAS est a priori bien confirmée par Mathieu Lefèvre pour 2026. La loi votée nécessite toutefois "une petite correction pour bien embarquer l'ensemble des pollueurs, mais cela pourrait se faire par voie d’amendement" (dans le cadre du budget 2026), a-t-il précisé. Concrètement, il convient de "dissocier cette redevance de la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique et créer un article spécifique". 

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis