Un amendement du Sénat pourrait autoriser les maires à limiter à 60 jours les locations touristiques meublées

Le Sénat a adopté un amendement inspiré par la ville de Paris visant à permettre aux communes de ramener de 120 à 60 jours la durée annuelle maximale de location de meublés touristiques sur les plateformes de type Airbnb.

À l'occasion de l'examen, en première lecture, du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, le Sénat a adopté, le 16 octobre, un amendement permettant aux communes de ramener de 120 à 60 jours par an la durée maximale annuelle d'une location touristique meublée, autrement dit des logements proposés en location sur des sites comme Airbnb ou Abritel. Plus précisément, l'amendement adopté modifie l'article L.324-1-1 du code du tourisme, en prévoyant que "la commune peut décider par délibération de fixer une limite inférieure à 120 jours, qui ne peut être inférieure à 60 jours au cours d’une même année civile".

Un amendement inspiré par la ville de Paris

L'amendement est clairement inspiré par la ville de Paris, dont la maire et son adjoint en charge du logement, Ian Brossat, n'ont jamais caché leur intention de restreindre les locations touristiques meublées dans la capitale. L'amendement a d'ailleurs été déposé par Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice et conseillère de Paris, ainsi que par les membres du groupe socialiste. Dans un communiqué du 17 octobre, la ville de Paris s'est aussitôt félicitée "de cette première avancée [...] conforme aux vœux exprimés par la ville d'adapter les réponses à apporter à un phénomène en fort développement, qui impacte l'accès au logement des Parisiennes et des Parisiens".

L'exposé des motifs de l'amendement justifie la remise en cause de la limite légale actuelle de 120 jours par le fait que "cette limitation uniforme ne permet cependant pas d’adaptation aux différences de situations des collectivités". Il prend cependant soin de "souligner que permettre à une collectivité de renforcer l’encadrement de ces locations de courtes durées ne constitue pas une atteinte au droit de propriété. Saisie sur ce point d’une question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation a refusé de saisir le Conseil constitutionnel tant en raison du changement de destination que de l’intérêt général poursuivi". Une saisine directe par des députés ou sénateurs, ou par le gouvernement, reste toutefois possible après l'adoption du projet de loi.

Un sort incertain, face à des fragilités juridiques

Même s'il a été adopté facilement à mains levées, l'amendement à fait l'objet d'un avis défavorable de la commission des lois. Le rapporteur, le sénateur (LR) de l'Ardèche Mathieu Darnaud, a ainsi estimé qu'"il serait peut-être pertinent de laisser le temps à la loi Elan de s'appliquer, qui atteint un équilibre entre la lutte contre la pénurie de logements et le droit de propriété. Or tous ses décrets d'application n'ont pas été publiés". Il s'est également montré sceptique sur l'absence d'atteinte au droit de propriété, en estimant que "limiter la faculté de percevoir des revenus locatifs est bien une atteinte au droit de propriété. Le juge évalue si elle est proportionnée au motif d'intérêt général recherché. Or le motif d'intérêt général n'est pas opérant puisqu'une telle mesure n'aurait pas d'impact sur la pénurie de logements : les résidences principales sont par définition habitées huit mois par an".

Le gouvernement, par la voix de Sébastien Lecornu, le secrétaire d'État en charge des collectivités territoriales, ayant également émis un avis défavorable, le sort définitif de l'amendement lors du passage devant l'Assemblée nationale apparaît donc incertain. Et même s'il figure dans le texte définitif, il pourrait être considéré comme un cavalier législatif par le Conseil constitutionnel, dans la mesure où son contenu n'a pas un lien direct avec l'objet du projet de loi.

Référence : projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, amendement n°729 rectifié ter, article additionnel après l'article 15 (examiné au Sénat en première lecture du 8 au 22 octobre).

 

 

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