Adaptation au changement climatique : la proposition de loi socialiste obtient le feu vert en commission
Le texte porté par le député Fabrice Barusseau, dont l’objectif est d’inscrire dans la loi le plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) et la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc) et de mettre fin au principe de reconstruction à l’identique après catastrophe naturelle, a passé sans difficulté le cap de la commission. Son avenir, suspendu à son ordre de passage dans le cadre de la niche réservée au groupe socialiste le 11 décembre prochain, reste plus qu’incertain.
© Capture vidéo Assemblée nationale/ Fabrice Barusseau, rapporteur
Les députés ont adopté en commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, ce 3 décembre, la proposition de loi (PPL) portée par le socialiste Fabrice Barusseau (Charente-Maritime) "visant à reconnaître une politique nationale d’adaptation au changement climatique et à adapter les mécanismes d’assurance". Le texte, qui s’inscrit dans la continuité des travaux menés dans le cadre de la mission d’information sur l’adaptation au changement climatique et l’aménagement des territoires (lire notre article du 5 juin 2025) présidée par Vincent Descoeur (DR-Cantal), et dont Fabrice Barusseau était le corapporteur avec Philippe Fait (EPR, Pas-de-Calais), sera examiné le 11 décembre prochain en séance dans le cadre de la niche socialiste. Compte tenu de son ordre de passage - a priori quasiment en toute fin de l’ordre du jour - les chances de voir aboutir cette PPL, dont l’objet est notamment d’inscrire dans la loi le plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) et la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc), paraissent bien minces. La vingtaine d’amendements adoptés lors de son passage en commission sont pour la plupart issus du rapporteur Fabrice Barusseau.
Donner une valeur juridique aux deux piliers de l’adaptation
"Nous ne sommes plus en phase de prévention théorique. Nous sommes d'ores et déjà dans la gestion d'impacts réels, fréquents et massifs. Le changement climatique augmente la fréquence et l'intensité des inondations, des submersions, des vagues de chaleur, des tempêtes, des feux de forêt, mais aussi les phénomènes de retrait gonflement des sols argileux qui concernent déjà 10,4 millions de maisons individuelles. Nous savons également que les vagues de chaleur ont causé entre 30.000 et 35.000 décès depuis 2014", a-t-il martelé au soutien de sa proposition, dont l’article 1er permet de donner une assise juridique au Pnacc et à la Tracc en prévoyant leur mise à jour tous les cinq ans. "Il s’agit ici d’une première étape nécessaire pour que l'adaptation au changement climatique soit effectivement déclinée dans les documents de planification et d'urbanisme, à l'échelle régionale comme à l'échelle locale, notamment au niveau des PLU", a souligné le rapporteur. Un amendement est notamment venu préciser comment cette inscription législative peut renforcer la portée des projets de décret et d’arrêté préparés par le gouvernement et actuellement en cours d’examen en Conseil d’État. Un autre a pour objet de rendre les PLU compatibles avec la Tracc. Plus précisément, il prévoit que le diagnostic sur lequel le rapport de présentation des PLU est établi intègre une dimension climatique, en plus de prévisions économiques et démographiques. Cette nouvelle obligation n’entrerait toutefois en vigueur qu’à la prochaine révision du PLU.
Favoriser une reconstruction résiliente
L’inefficacité des reconstructions répétées et à l’identique, qui perpétuent une vulnérabilité coûteuse et injuste, était l’une des "absurdités" pointées par la mission qui a précédé le texte de quelques mois. La PPL propose donc à l’article 2 de mettre fin au principe de reconstruction à l’identique après catastrophe naturelle, pour lui substituer une obligation de reconstruction résiliente, c’est-à-dire qui tient compte des risques identifiés par la carte des aléas naturels en cours d'élaboration. Pour cela, les assurances pourront, après diagnostic, verser une indemnisation qui excède la valeur du bien assuré dans la mesure où ce complément sera effectivement employé pour des travaux de reconstruction résiliente permettant de réduire le risque futur. Le texte limite par ailleurs la résiliation anticipée des contrats après versement d’une indemnité d’adaptation, afin d’éviter les effets d’aubaine.
La soutenabilité du régime assurantiel en question
"Nous ne pouvons ignorer les chiffres. Huit années consécutives de déficit, une sinistralité moyenne qui est passée de 1,5 à 3,5 milliards d'euros en deux décennies, avec des pics allant parfois au-delà de 10 milliards d'euros, comme en 2022", a relevé Fabrice Barusseau. C’est pourquoi "pour assurer la pérennité financière du régime d’assurance CatNat et l’équité sociale", l’article 3 permet aux assureurs (il s’agit d’une faculté) de moduler à la hausse la surprime pour des biens ciblés, que sont les résidences secondaires et les biens professionnels de grande valeur (supérieurs à 20 millions d’euros), lorsque ceux-ci se situent dans les zones identifiées comme exposées au sein des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN). C’était l’une des mesures figurant dans le rapport visant à adapter le système assurantiel français à l’évolution des risques climatiques remis par Thierry Langreney, Gonéri Le Cozannet et Myriam Merad (lire notre article du 2 avril 2024). S’interrogeant sur le zonage retenu par cette disposition, tout en souscrivant aux objectifs de la PPL, le député Vincent Descoeur a préféré s’abstenir lors du vote en commission.