Consignation : l’outil de sécurisation du droit de préemption et d’expropriation des collectivités

La préemption et l’expropriation sont des outils clés pour la réalisation de projets d’intérêt général sur les territoires. Si ces deux termes pâtissent d’une connotation négative, ces procédures sont pourtant essentielles et rigoureusement encadrées. La consignation doit dans certains cas être mobilisée. 

Expropriation et préemption, un outil central de la politique de la ville 

Lorsque l’achat à l’amiable est impossible et que des projets d’intérêt général en dépendent, les acteurs publics locaux peuvent avoir recours à la préemption et à l’expropriation.  

En effet, l’exercice de ces droits doit répondre à un motif d’intérêt général et des objectifs précis pour la réalisation d’aménagements voire la constitution de réserve foncière en vue d’un aménagement futur. L’enjeu est clair : il s’agit de respecter l’intérêt et la liberté de l’ensemble des parties prenantes – expropriant et exproprié, autorité titulaire du droit de préemption et propriétaire actuel du bien. 

Ces actions visent à faciliter la mise en œuvre d’un projet d’aménagement ou d’amélioration du territoire dans l’intérêt du public. Par exemple, pour : 

  • renouveler le parc urbain ;
  • lutter contre l’habitat dégradé, indigne ou insalubre ;
  • développer le logement social ;
  • améliorer l’habitat existant ;
  • maintenir, étendre ou accueillir des activités économiques ;
  • sauvegarder des espaces naturels ;
  • mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti ;
  • constituer des réserves foncières pour anticiper de futurs projets. 

L’expropriation pour cause d’utilité publique 

L’expropriation consiste à contraindre un particulier ou une personne morale à céder son bien immobilier, moyennant le paiement d’une indemnité juste et préalable. Dans ce cas, le titulaire du droit d’expropriation peut prendre possession des biens expropriés après le paiement effectif de l’indemnité – ou dans certains cas après la consignation de cette somme. 

En amont de l’expropriation, la procédure est soumise à une enquête publique et à la prononciation d’une déclaration d’utilité publique (DUP). Divers motifs peuvent conduire à une telle déclaration, notamment pour : 

  • la réalisation d’aménagements urbains (construction d’infrastructures routières et de zones d’activités économiques) ;
  • le développement d’équipements publics (écoles, hôpitaux) ;
  • les actions de préservation de l’environnement (création de parcs naturels et de zones protégées) ;
  • le développement de programmes immobiliers pour répondre aux besoins en habitations et notamment en logements sociaux ;
  • le développement de l’économie locale ;
  • la réhabilitation d’immeubles de logements ;
  • le lancement d’une procédure de délaissement – à l’initiative des propriétaires. 

Le droit de préemption urbain (DPU) 

Le droit de préemption urbain (DPU) diffère de l’expropriation. Il offre la possibilité à une collectivité d’acquérir en priorité un bien immobilier mis en vente sur son territoire afin de mener à bien des projets d’utilité publique. Ce droit peut être exercé pour préempter aussi bien un bâtiment qu’un terrain. 


Les défis et contentieux liés aux procédures de préemption et d’expropriation 

Si les procédures de préemption et d’expropriation apparaissent comme une réponse efficace aux enjeux de développement des territoires, elles se heurtent encore à un défi majeur : l’identification et l’indemnisation des propriétaires.  

Elles sont en effet freinées par des désaccords sur le prix ou par des obstacles au paiement. Certains propriétaires refusent de céder leur bien ou contestent le montant de l’indemnisation. 

Absence des propriétaires lors de la signature de l’acte de vente, défaut de certaines pièces nécessaires à la réalisation de l’acte ou l’absence des propriétaires… L’ensemble des obstacles sont délimités légalement, plus précisément par l’article R.323-8 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.  

De façon générale, ces freins génèrent un allongement du délai entre la DUP et l’indemnisation effective. Ils sont aussi une source de tension avec les propriétaires des biens expropriés ou préemptés.  

Résultat : les projets sont bloqués, les biens risquent d’être perdus, et la situation génère des surcoûts pour les expropriants et les autorités titulaires du droit de préemption. En bout de chaîne, c’est l’ensemble du territoire qui en pâtit compte tenu de l’importance des enjeux des projets. 


Le rôle de la consignation pour accélérer et sécuriser les procédures 

En cas de désaccord sur le prix ou sur l’indemnité proposée, le juge judiciaire peut être saisi, ce qui arrive régulièrement. Dans ce cas, si l’autorité souhaite maintenir l’exercice de son droit de préemption ou d'expropriation, elle est tenue de consigner 15 % du prix ou de l’indemnité initialement proposé.  

De même, en cas d’obstacle au paiement, l’intégralité du prix ou de l’indemnité doit être consignée dans l’attente de la levée de l’obstacle au paiement. Comment ? La somme est déposée sur un compte de consignation ouvert par la Caisse des Dépôts.  

​​À noter 

​Le compte de consignation ne doit pas être confondu avec un compte bancaire. Par exemple, si elles sont conservées sur le compte de dépôt obligatoire (DO) ou de disponibilités courantes (DCN) d’un notaire la somme n’est pas considérée comme consignée. Les fonds demeurent sur un compte bancaire domicilié à la Caisse des Dépôts mais celle-ci n’intervient pas comme consignataire. ​ 

 

Les avantages de la consignation pour les procédures de préemption et expropriation 

La consignation, lorsqu’elle est requise, permet de :  

  • sécuriser les droits de l’ensemble des parties (propriétaire, autorité, créancier, bénéficiaire d’un droit sur l’immeuble…) les fonds sont conservés par un tiers de confiance neutre et impartial qui en assure la disponibilité à l’issue de la procédure ;
  • éviter le risque d’annulation de la procédure, le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique prévoit un certain délai dans lequel le paiement ou la consignation doit être opéré, s’il n’est pas respecté la procédure peut être comprise ;
  • fluidifier le dialogue avec les propriétaires et rassurer une juste indemnisation à l’issue de cette procédure qui peut être longue. 

 

La Banque des Territoires comme tiers de confiance pour vos procédures de préemption et expropriation 

La Banque des Territoires intervient en qualité de tiers de confiance pour la consignation de l’indemnité à verser aux propriétaires actuels du bien. Et pour cause, en cas d’obstacle au paiement à l’occasion d’une procédure d’expropriation, elle permet à l’autorité de s’en libérer et de prendre possession du bien en attendant de trouver un consensus ou d’identifier les propriétaires.  

En cas de désaccord sur le prix, elle garantit le maintien de votre droit de préemption, en attendant la résolution de la procédure judiciaire.  

Ainsi, non seulement la consignation est impérative pour éviter le risque d’annulation d’une procédure, mais surtout, elle est libératoire. Elle habilite l’autorité à prendre possession du terrain afin de poursuivre la réalisation du projet, et au propriétaire de bénéficier d’une sécurité. 

Au-delà de l’aspect pratique, la consignation offre aussi des avantages aux autorités titulaires du droit de préemption et d’expropriation : 

  • une meilleure anticipation financière ;
  • la réduction des coûts liés à la gestion des contentieux et de leur impact ;
  • une meilleure gestion des délais pour l’ensemble des étapes des projets. 

Des projets qui transforment les territoires 

Le projet Grand Matabiau à Toulouse incarne une transformation urbaine d’envergure : la réhabilitation complète d’un quartier de la ville. Grâce à la préemption et à la consignation, la métropole a pu acquérir les terrains nécessaires et ce, malgré des désaccords avec différents propriétaires.  

Après la démolition des anciennes structures, ces terrains ont été cédés à un aménageur pour donner naissance à un quartier complètement repensé. Porté par la métropole, ce projet montre toute l’importance du rôle du droit de préemption dans la réalisation d’aménagements d’intérêt général. Il contribue ainsi à l’amélioration du cadre et de la qualité de vie des habitants. 

Une plateforme digitale dédiée à la consignation 

Tous ces avantages sont d’ailleurs facilités par la plateforme digitale qui accompagne le service de consignation de la Banque des Territoires. Cet outil confère la possibilité d’effectuer un suivi et de communiquer avec les services en charge de la gestion des comptes de consignation. Le tout, sur la base de données actualisées en temps réel, permettant une plus grande réactivité, en consignation comme en déconsignation. 

 

Au cœur des enjeux d’aménagement et de développement territorial, la consignation s’inscrit comme un levier stratégique au service de l’intérêt général. Grâce à une solution fiable, sécurisée et digitalisée, la Banque des Territoires démontre son engagement pour le développement territorial intelligent. À la clé : des contentieux atténués, des procédures fluidifiées et des projets d’utilité publique accomplis.

Les experts

Nicolas Kieffer

Responsable d’unité expertise et appui

Titulaire d’un Master et d’un MBA en droit des affaires, Nicolas Kieffer débute comme juriste dans différents cabinets puis rejoint la Caisse des Dépôts en 2018. 

D’abord chargé de consignations puis chargé d’appui et d’animation, il devient par la suite responsable de l'unité expertise et appui consignations. Il y développe une équipe de collaborateurs experts et accompagne le réseau opérationnel ainsi que les équipes en région sur l’intégralité des offres de consignation.  

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