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PLF 2016 - Budget "Recherche et enseignement supérieur" : les sénateurs de la commission des affaires économiques préfèrent s'abstenir

Trop peu de moyens, trop peu d'ambition : les sénateurs de la commission des affaires économiques n'ont pas donné leur aval aux crédits de la mission "recherche et enseignement supérieur" du PLF 2016, qui se montent à 14 milliards d'euros. Dans son rapport pour avis, Henri Tandonnet pointe également la contribution financière croissante des collectivités. Elle a augmenté de 13% en deux ans, entre 2011 et 2013, pour avoisiner les 1,3 milliard d'euros, dont 900 millions d'euros venant des régions. Plus du tiers est destiné à des opérations immobilières.

La commission des affaires économiques du Sénat a émis, le 18 novembre, un avis d'abstention à l'adoption des crédits de la mission "recherche et enseignement supérieur" (Mires) inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016.
Le rapporteur pour avis, Henri Tandonnet, sénateur (UDI) de Lot-et-Garonne, exprime son regret quant aux "moyens consacrés à ce secteur connaissent à nouveau une stagnation cette année" et son "inquiétude" quant à "l'absence de dynamique impulsée par l'Etat". Il consacre un chapitre de son rapport à "l'investissement des collectivités dans la recherche et l'innovation", notamment dans le cadre des contrats de plan Etat-région (CPER).

1,3 milliard d'euros, dont les deux tiers viennent des conseils régionaux

"Si elle reste modérée comparé aux presque 14 milliards d'euros de la Mires, la contribution des collectivités à l'effort national de recherche n'est pas à négliger : en 2013, elle s'élevait à 1,34 milliard d'euros", a indiqué Valérie Létard en commission (la sénatrice UDI du Nord, rapporteure l'année dernière, y remplaçait son collègue Tandonnet absent pour raison de santé). "Et ce montant ne cesse de progresser, avec une hausse de 13,4% depuis 2011", a-t-elle précisé.
Les conseils régionaux sont les plus investis, avec 918 millions d'euros, "soit plus des deux tiers de l'effort total", a-t-elle insisté. Leur budget R&D représentait en 2014, pour les régions de métropole, 2,9% de leur budget primitif en moyenne, soit une dépense moyenne par habitant de 12,7 euros.
Viennent ensuite les communes et leurs groupements, à hauteur de 18% (250 millions d'euros), puis les départements avec une hausse de 13,5% (180 millions d'euros, "dont l'effort était pourtant supérieur à celui des communes en 2011".

465 millions d'euros pour des opérations immobilières

La répartition des dépenses des collectivités montre la prééminence des opérations immobilières, qui représentent, avec 465 millions d'euros dépensés en 2014, plus du tiers des investissements en recherche-développement (R&D) de l'ensemble des collectivités. "Un taux qui n'a cessé d'augmenter, et qui représente même les trois-quarts des dépenses dans le cadre des CPER". Viennent ensuite le soutien à la recherche publique et les aides à l'innovation en entreprises à hauteur respectivement de 31% et de 28%.
A noter aussi, au cours des exercices 2013 et 2014, l'intervention des collectivités de métropole en direction des pôles de compétitivité qui s'est traduite par un budget annuel moyen de 115 millions d'euros. Ces financements étaient dirigés à 85% vers des opérations de transfert de technologie et des aides à l'innovation dont plus des deux-tiers, conformément à la vocation des pôles, s'adressent à la recherche partenariale.
Mais tout ceci n'est qu'une moyenne. L'investissement en recherche-développement est, on le sait, très polarisé. Cinq régions en concentrent plus de la moitié : l'Ile-de-France, Rhône-Alpes, Aquitaine, les Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d'Azur.

1,2 milliard d'euros dans les CPER 2015-2020

Le volet "recherche et enseignement supérieur" des nouveaux CPER 2015-2020 représente 1,2 milliard d'euros sur 5 ans (soit l'équivalent des 1,7 milliard d'euros sur 7 ans de la génération précédente). Sur ces 1,2 milliard d'euros, 1 milliard est dédié aux universités. "Seul le reliquat de 200 millions d'euros environ profitera à la recherche, ce qui est vraiment insuffisant", commente Valérie Létard, rappelant qu'il a "fallu taper du poing sur la table pour obtenir des décisions de rallonge de la part du Premier ministre !"
Au départ, une enveloppe de 124 millions d'euros était prévue, "soit un très net recul par rapport à l'exercice précédent", au motif que les précédentes dotations avaient été sur-calibrées et qu'il existait d'autres instruments de financement comme le programme des investissements d'avenir (PIA) ou le plan Campus. Finalement, les discussions engagées avec l'Etat et les préfets de région ont permis d'obtenir un surplus de 81 millions d'euros de dotations.

Mélange des sources et mise en concurrence

"Ce n'est pas négligeable, mais cela restera sans doute trop limité", estime Valérie Létard, prenant pour exemple sa région, le Nord-Pas-de-Calais, où "cela représente 18 millions de plus, pour un total consacré à l'enseignement supérieur et à la recherche de 69 millions d'euros". Pour celle d'Henri Tandonnet, l'Aquitaine, c'est 11,6 millions de plus, pour un total de 53,6 millions d'euros.
Par ailleurs, le mélange des sources de financement, entre le CPER et d'autres instruments de soutien, "pose problème", ajoute la sénatrice. Le sujet est loin d'être nouveau (voir notre article Localtis du 18 avril... 2006) et Valérie Létard l'avait déjà soulevé l'an dernier, lorsqu'elle était rapporteure pour la commission. Ces instruments "sont en effet fondés sur des logiques différentes : alors que le CPER tend à opérer un rééquilibrage entre les régions, ces autres instruments tendent au contraire à les mettre en concurrence, car ils sont basés sur des appels d'offre. Il pourrait en résulter un effet d'éviction des financements des CPER, que le faible suivi budgétaire et financier de ces contrats risque de masquer".

 

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