Congrès des maires – Mobilités : "Des solutions existent", mais l'État "reste sourd"

Confrontés à d'insurmontables difficultés, notamment financières, en matière de voirie et d'ouvrages d'art, les maires placent leurs espoirs dans le futur (?) projet de loi-cadre tiré de la conférence Ambitions France Transports. "Des solutions existent", veut croire l'AMF.

Pas de ministre, et pas de scoop au forum du Congrès de l'Association des maires de France (AMF) consacré, le 20 novembre dernier, aux "infrastructures et mobilités". Mais l'occasion pour les élus présents, tant en tribune que dans la salle, de donner une fois encore de la voix pour dénoncer les impasses auxquelles ils sont quotidiennement confrontés, ici comme ailleurs : excès de normes – qui plus est "pas adaptées à la situation rurale", précise une maire d'une "petite commune des Alpes-Maritimes" –, appauvrissement des communes et des départements, notamment avec des dotations de l'État "très très très rabotées" (dixit Denis Moulins, président de la communauté de communes Guillestrois Queyras, Hautes-Alpes), incapacité de ce dernier à donner de la visibilité… 

L'enveloppe du programme Ponts bientôt consommée

Le tout au préjudice de travaux de voirie pourtant indispensables, et alors que les besoins vont croissant (lire notre article du 3 octobre). "Je me demande si je ne vais pas être obligée de fermer certaines routes, parce que je ne suis pas en capacité de les entretenir", alerte Coralie Bourdelin, maire de Revel (Isère). Sans parler des ponts, dont la réfection (ou la reconstruction) s'apparente à un défi herculéen pour les communes, en dépit du programme conduit par le Cerema dont la dotation reste "largement insuffisante", déplore Frédéric Cuillerier, maire de Saint-Ay (Loiret). D'autant que "l'enveloppe de 55 millions d'euros sera totalement consommée à la fin du premier trimestre 2026", confirme un représentant du Cerema présent dans la salle (lire notre article du 21 novembre).

"Des solutions existent"

Pourtant, "des solutions existent, mais l'État reste sourd", déplore Frédéric Cuillerier. Et le coprésident de la commission transports de l'AMF de rappeler les propositions de l'association pour bâtir un "modèle de financement des mobilités beaucoup plus juste" (lire notre entretien avec l'autre coprésident, Sylvain Laval). Maire de Villeneuve-lès-Avignon (Gard), Pascal Bories plaide notamment pour que l'État ne tienne plus seulement compte que "de la longueur de la voirie" pour déterminer une partie de la dotation globale de fonctionnement (la dotation de solidarité rurale), mais prenne aussi en compte la situation géographique (altitude, météo…), l'importance des flux, et notamment du "trafic lourd, etc. Un critère de la longueur de voirie – dont une réponse ministérielle de février dernier rappelait qu'il n'a "en aucun cas vocation à refléter les charges d'entretien de voiries supportées par les communes" – dont le mode de calcul a été modifié par la loi de finances pour 2025 et un décret du 20 mai (lire notre article), ce qui a d'ailleurs conduit récemment l'AMF à saisir la DGCL sur le sujet.

La région ne peut pas tout

Sans surprise, le sujet de la réouverture de la prise de compétence Mobilités, réclamée par l'AMF, parmi d'autres, aura également occupé le devant de la scène. "Les régions ont amené des capacités, notamment avec les bus interurbains. Mais il y a un angle mort sur les enjeux de politique de proximité", souligne inlassablement Sylvain Laval (voir notre entretien précité). Didier Mandelli, sénateur de la Vendée, suggère de profiter du projet annoncé, début 2026 (lire notre article), de loi-cadre faisant suite à la conférence Ambition France transports "pour corriger ou améliorer la loi LOM [loi d'orientation des mobilités, ndlr] sur certains points". Et notamment pour revenir sur "les deux péchés originels" du texte : le délai insuffisant laissé aux intercommunalités pour prendre la compétence et "la possibilité d'avoir un versement mobilités réduit pour les zones peu denses qui ne disposaient pas de transports collectifs. Si nous avions obtenu ces deux volets, je pense qu'on n'en serait pas là aujourd'hui".

Retour vers le futur ?

Nul doute qu'Emmanuelle Favre, maire de Saint-Loubès (Gironde), verrait d'un bon œil la possibilité pour les intercommunalités qui ont fait le choix de déléguer leurs compétences aux régions de pouvoir revenir en arrière : "En arrivant aux manettes en 2020, on s'est dit que la région avait quand même plus de moyens, allait mieux fédérer et on lui a donné les clés, pensant qu'on faisait le bon choix pour que ça avance vite et bien […]. Mais ça n'avance pas. On finit par nous dire, six ans après, qu'il ne se passera rien, qu'on n'est pas prioritaire […]. Tout ça pour se retrouver interrogé sur la couleur d'un abri-vélo, dont je ne sais où il va être, comment on va y accéder et comment il va fonctionner", alors que "nous-même, on en avait financé un, sur fonds propres […] On avait [d'ailleurs] galéré pour trouver qui allait signer l'autorisation à la SNCF. Une situation ubuesque où vous avez vu 20 personnes de la SNCF et aucune capable de vous signer l'autorisation". 

Une mission du Sénat sur la billettique

Autre irritant – en particulier pour les usagers – à traiter, la billettique. Le sénateur Didier Mandelli annonce qu'une mission d'information sera "très prochainement" lancée sur le sujet par la commission aménagement du territoire & développement durable du Sénat. "Ça ne fonctionne pas très bien. Peut-être que si on avait laissé ça au marché, peut-être que [le titre unique] serait déjà en place", indique-t-il.

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis