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Habitat - HLM : quoi de neuf, docteur ?

Comme chaque année à pareille époque, la Miilos vient de rendre public son rapport annuel. Ce document constitue un bilan de santé complet du secteur HLM que chacun lit avec attention... en espérant toujours voir apparaître le nom de son voisin plutôt que le sien !

Cette année, quatre thèmes ont été privilégiés par la Mission interministérielle d'inspection du logement social (Miilos) : la mise en oeuvre du droit au logement opposable (Dalo), la gestion patrimoniale mise en place (ou pas) par les organismes, l'exposition aux emprunts toxiques et les mouvements de recomposition au sein du secteur.  Une bonne occasion pour faire un petit check-up de rentrée.

Un parc au double visage

En matière de gestion locative et de politique sociale, l'année 2010 a été marquée par la montée en charge des relogements dans le cadre du droit au logement opposable (Dalo). La plupart des bailleurs sont désormais organisés pour prendre en compte ces demandes et y répondre. Naturellement, le problème concerne surtout les grandes villes et leurs environs. La Miilos souligne que le Dalo a pour conséquence inattendue de mettre en exergue la difficile adéquation du parc de logements HLM à la réalité de la demande. En effet, le parc social présente aujourd'hui un "double visage" : d'un côté des logements situés sur des territoires dynamiques, de l'autre un parc "implanté dans des zones en déshérence". Sur les zones difficiles, la population accueillie est de plus en plus précaire, le parc se fait de moins en moins attractif et connaît certaines fois de graves difficultés de vacance. Et la Miilos de citer des organismes dont le niveau de vacance atteint 15%. Or ces logements inoccupés sont très coûteux pour les bailleurs, au point que certains peuvent être tentés de s'affranchir des règles du Code de la construction et de l'habitation pour remplir leurs logements coûte que coûte. Au contraire, dans les espaces dynamiques, les locataires une fois en place ne partent plus. Les bailleurs se retrouvent avec des taux de rotation très faibles, entre 4,8 % et 8% dans les grandes agglomérations. Les taux de vacance sont alors de l'ordre de 2%. Face à cette dichotomie, les publics Dalo peinent à se trouver une place : les associations sont de plus en plus sollicitées pour le logement des publics prioritaires (rapport, p.13).
Autre problème, le nombre croissant de familles monoparentales ou recomposées qu'il faut loger ou reloger.  En dépit de ces diverses difficultés, la qualité de service rendue aux locataires semble s'améliorer : 64% des bailleurs sociaux inspectés rendent un service qualifié de "satisfaisant", 33% de "moyen". La Miilos souligne tout de même que les marges de progression sont encore importantes en particulier sur la gestion des réclamations et la gestion des charges.

Voir plus loin pour savoir où et pourquoi construire

On va y arriver, mais mon Dieu que c'est long... Ainsi pourrait-on résumer le chapitre 2 de ce rapport 2010. Alors qu'en 2002, l'Etat espérait que les organismes HLM auraient tous adopté en 2005 leur plan stratégique de patrimoine, le but n'est toujours pas atteint aujourd'hui. Un organisme contrôlé sur cinq n'a toujours pas établi ce document qui a pourtant pour vocation d'aider à prendre les bonnes décisions pour une gestion à long terme des logements. Cependant, plus que le document, c'est l'absence de stratégie patrimoniale, le manque de visibilité, les décisions d'entretien mal pensées, l'absence de prospective financière qui sont inquiétants. L'inspection insiste par exemple sur le danger à se focaliser sur un quartier Anru en cours de rénovation au détriment d'une analyse globale de la situation du parc. En résumé, seulement deux organismes sur trois ont aujourd'hui une "véritable stratégie patrimoniale" qui leur permet de prendre des décisions adaptées en matière d'investissement.
Pourtant, depuis dix ans, les organismes HLM ont été "particulièrement sollicités" pour construire de nouveaux logements. Au-delà de la distinction classique entre zones "tendues"/"détendues", la Miilos s'inquiète des "signes de détente" de certains marchés : "forte hausse de la vacance, taux de refus de logements sociaux très élevé, absence de créneau commercial pour le PLS ou certains PLUS, demande volatile". Bien sûr, les organismes HLM ne sont pas toujours responsables de ces situations. Outre l'évolution économique d'une région (fermeture d'usines par exemple), la mission pointe "des exemples de développement massif de l'offre locative privée à partir principalement de produits défiscalisés", développement concomitant "avec le développement d'une vacance anormalement élevée dans le parc social" (rapport, p.24).
Dans ce contexte de très fortes disparités entre les territoires, la Miilos estime que l'adaptation de la politique patrimoniale des organismes HLM à la situation économique et sociale locale est "insuffisante ou inappropriée dans près d'un cas sur quatre". Et elle conclut : "Plus que jamais, il faut s'interroger sur le bon niveau de développement de l'offre dans les différents territoires d'intervention."

Vefa, emprunts toxiques, regroupements : piqûres de rappel

Enfin, le rapport de la Miilos est également l'occasion de distiller quelques conseils juridiques ou financiers. Ainsi, la mission appelle cette année les bailleurs sociaux à être attentifs au cadre juridique de leurs acquisitions en Vefa (vente en l'état futur d'achèvement) afin que ces opérations ne soient pas requalifiées par le juge administratif en marchés publics. En matière d'emprunts toxiques, on lira avec intérêt la typologie présentée page 39 des produits financiers qui ont pu être proposés ces dernières années. Au total, la mission a trouvé dans les comptes d'un organisme sur quatre des produits structurés. Si le message de prudence semble en passe d'être entendu ("la souscription de contrats nouveaux semble moindre en 2010"), la Miilos met toujours en garde contre l'insuffisante information des conseils d'administration, ainsi que sur la difficulté, pour les organismes, à garder dans la durée un personnel compétent pour gérer ces produits complexes.
Le rapport se clôt sur un état des lieux des restructurations que connaît le secteur. Paradoxalement, les effets de la réorganisation des collecteurs du 1% sont encore peu visibles en 2010. Mais les mouvements de restructuration se poursuivent avec beaucoup de rachats de patrimoine. Souvent, constatent les inspecteurs,  ce sont les collectivités qui sont à la manoeuvre au moins autant que des logiques de groupe ne se révèlent (p.52).
On notera également, qu'en cas de regroupement d'organismes de nature juridique différente (OPH, SEM, SA), l'office gagne souvent : d'une part, il a longtemps été plus facile d'intégrer dans un office des structures privées que l'inverse ; d'autre part, le nouveau statut d'OPH, en permettant le recrutement de personnel de droit privé et l'adoption d'une comptabilité privée, a rapproché les modes de gestion publique et privée.
Enfin, last but not least, la mission met en garde encore une fois sur les relations intra-groupe, et les risques encourus lorsqu'on ne respecte pas les fameuses règles du "in house" (sur cette question et les apports de la loi Warsmann, voir notre  article ci-contre du 26 avril 2011).

 

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