Les écologistes dévoilent un arsenal de mesures pour affronter les étés à 40°C

Alors que la France a connu début juillet une nouvelle vague de chaleur, les députés du groupe Écologiste et social ont présenté mardi 9 juillet à l’Assemblée nationale une série de propositions de lois pour "(sur)vivre l’été". Face à l’intensification des canicules, leur plan s’articule autour de mesures d’urgence, d’adaptation et d’anticipation, dans des domaines allant de l’éducation à l’agriculture, du logement aux politiques budgétaires.

Comment vivre, ou plutôt survivre, dans un pays qui franchit régulièrement les 40°C ? C’est la question qui a structuré la conférence de presse du groupe Écologiste et social à l’Assemblée nationale, ce mardi 9 juillet. "Entre les nuits sans sommeil, les transports bondés et les incendies à nos portes, l’été est devenu un moment de survie", a introduit Cyrielle Chatelain, présidente du groupe et députée de l’Isère en introduction. Selon Santé publique France, la chaleur a causé la mort de 33.000 personnes entre 2014 et 2022. "Et cela ne fera qu’empirer", alerte l’élue.

Un triptyque : urgence, adaptation, anticipation

La stratégie présentée repose sur trois volets. Premier axe : agir immédiatement face aux épisodes de chaleur. "Le gouvernement brille par son absence de réaction", accuse Cyrielle Chatelain. En contrepoint, les écologistes proposent la mise en œuvre d’un "plan grand chaud", calqué sur le plan grand froid, pour venir en aide aux plus vulnérables.

Deuxième volet : adapter les bâtiments et les équipements publics. Arnaud Bonnet, député de Seine-et-Marne, s’est concentré sur l’école : "Aucun enfant ne devrait apprendre dans une classe à 40°C". Il défend une proposition de loi instaurant des seuils de température – entre 16 et 30°C – au-delà desquels l’accueil des enfants serait réorganisé. Objectif : imposer au ministère de l’Éducation nationale un cadre contraignant, y compris en matière d’aménagement.

Troisième axe : anticiper les bouleversements à venir. La députée des Hauts-de-Seine Sabrina Sebaihi plaide pour un "droit opposable à la fraîcheur", à l’instar du Dalo. En cas de logement surchauffé, des travaux devraient être imposés aux bailleurs, avec un relogement immédiat possible en cas de carence. "La précarité thermique tue, et pas uniquement en hiver", a-t-elle insisté, appelant aussi à créer un statut européen de réfugié climatique.

Le logement au cœur de la réponse

L’adaptation du bâti a occupé une place centrale. Nicolas Bonnet, député du Puy-de-Dôme, a défendu une proposition de loi élaborée avec Cyrielle Chatelain pour rendre effectif un "droit à des températures décentes en été comme en hiver". Il s’agit notamment d’interdire les coupures d’électricité en été, de financer l’installation de stores et de brasseurs d’air via MaPrimeRénov’, et d’actualiser le diagnostic de performance énergétique (DPE) en y intégrant l’habitabilité estivale.

"42% des Français ont eu trop chaud chez eux en 2024, et 60% dans les quartiers populaires", a rappelé le député. "Il est temps d’interdire les ‘bouilloires thermiques’ à la location." Pour soutenir cette adaptation, il appelle à inscrire dans le Code de l’environnement une base juridique commune, fondée sur le scénario Trajectoires Climat (TraClim), afin d’harmoniser les politiques publiques.

Une critique du sous-financement de l’adaptation

C’est sur ce terrain budgétaire que les députés Eva Sas (Paris) et Tristan Lahais (Ille-et-Vilaine), co-auteurs d’un rapport sur les moyens affectés au troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC), ont tiré la sonnette d’alarme. "Sur les 52 mesures du PNACC, 31 n’ont aucun budget défini", a résumé Eva Sas. Le fonds Barnier, destiné à la prévention des risques, reste sous-doté, malgré l’augmentation des primes d’assurance censées l’alimenter.

Le Fonds vert, censé soutenir l’adaptation locale, a vu ses crédits d’engagement passer de 2,5 à 1,6 milliard d’euros entre 2024 et 2025. "On réduit les moyens au moment où il faudrait les renforcer", déplore Tristan Lahais. Le député a aussi pointé le "trou dans la raquette" concernant le financement du bâti scolaire, avec seulement 300 millions d’euros effectivement consommés en 2024 sur les 500 programmés.

L’agriculture en première ligne

À cette cartographie des vulnérabilités s’ajoute celle du monde agricole. Benoît Biteau, député de Charente-Maritime et agriculteur, plaide pour un fonds de solidarité public pour les pertes de récolte liées au dérèglement climatique, en remplacement d’un modèle reposant exclusivement sur les assurances privées. Il appelle aussi à promouvoir l’agroécologie et l’agroforesterie, seules à même selon lui de "séquestrer du carbone, améliorer les sols et renforcer la résilience des cultures".

"Opposer techno-solutionnisme et agroécologie, c’est choisir entre une impasse coûteuse et une triple victoire pour le climat, la biodiversité et les agriculteurs", résume-t-il, en annonçant une proposition de résolution européenne pour faire évoluer la PAC post-2027.

Des territoires ultramarins oubliés

Enfin, Steevy Gustave, député de l’Essonne d’origine martiniquaise, a dénoncé la "reproduction mécanique de politiques publiques hexagonales inadaptées" aux réalités des outre-mer. Érosion côtière, cyclones, sargasses… "On parle de plages, de rhum, mais les territoires ultramarins sont en première ligne", a-t-il lancé, appelant à une "adaptation différenciée, obligatoire, des politiques publiques" dans ces territoires.

Son intervention a été marquée par l’exemple de la Guadeloupe et de la Martinique, où plus de 4.500 tonnes de sargasses se sont échouées depuis janvier. "Ces algues tuent. Et l’État répond avec des miettes."

Une offensive législative tous azimuts

Les députés du groupe écologiste entendent transformer ces alertes en texte de loi : propositions, résolutions, amendements budgétaires. Tous visent un même objectif : faire de l’adaptation au changement climatique une priorité de l’action publique. "L’inaction coûte plus cher que l’action", martèle Cyrielle Chatelain. Reste à voir si, en plein été et en pleine recomposition politique, leurs propositions trouveront écho dans l’hémicycle.

 

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