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Emploi - Les maisons de l'emploi regagnent du terrain

La diminution du budget des maisons de l'emploi sera moindre que prévu, après l'examen du projet de loi de finances 2011 au Parlement. Mais une question de fond se pose, qui doit être analysée lors des journées nationales des maisons de l'emploi, organisées les 9 et 10 décembre : comment inscrire une fois pour toutes les politiques territoriales d'insertion et d'emploi dans le "dur" ?

Finalement, les maisons de l’emploi ne verront pas leur budget réduit de 45 % en 2011 mais d'un peu moins de 27 %. Les discussions qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale et au Sénat ces derniers jours ont permis de limiter les pertes. La réduction prévue par le gouvernement dans le projet de loi de finances 2011 faisait passer la subvention de l’Etat aux maisons de l’emploi de 95 millions d’euros en 2010 à 53 millions d’euros en 2011. Une réduction contestée par de nombreux élus, de tous bords politiques. Après le passage à l’Assemblée en novembre, 10 millions d’euros ont été votés pour agrémenter le budget de ces structures en 2011, limitant la réduction à 35 %. Une décision qui ne satisfaisait pas totalement les acteurs de terrain et qui a été rediscutée lors des débats au Sénat début décembre. "Quant aux maisons de l’emploi, vous les asphyxiez financièrement. En réduisant leurs crédits de fonctionnement de plus d’un tiers, vous les condamnez à mourir. Pourtant depuis leur création, elles travaillent en complémentarité avec l’Etat, Pôle emploi et les collectivités territoriales afin de favoriser l’ancrage territorial des politiques de l’emploi", a affirmé Annie David, sénatrice de l’Isère, lors des débats autour du projet de loi de finances. "La diminution du budget alloué aux maisons de l’emploi ne sera pas sans conséquence sur ces structures dont nous connaissons tous le rôle concret et fédérateur, a détaillé Jean-Pierre Godefroy, sénateur de la Manche. La maison de l’emploi et de la formation du Cotentin perdra 350.000 euros de financements par an, dès lors elle se trouvera dans une situation très difficile et avec elle l’ensemble des personnes qui bénéficient de ses services." D’autres maisons de l’emploi, comme celle de Plaine commune (93), avaient tiré le signal d’alarme récemment. Après discussion, les sénateurs ont finalement voté eux aussi, le 2 décembre, une nouvelle rallonge de 5 millions d’euros, ce qui ramène le budget des maisons de l'emploi à 68 millions d’euros pour 2011, contre les 53 millions annoncés par le gouvernement avec la diminution initiale de 45 %...

"Les maisons de l’emploi sont nécessaires" 

"Depuis septembre, sans rien dire, nous nous sommes battus, avec des courriers transmis à tous les ministres et des amendements portés à l’Assemblée nationale et au Sénat, explique Marie-Pierre Establie, directrice d’Alliance villes emploi (AVE), la tête de réseau national des maisons de l’emploi. Tout ce travail qui a été fait de façon acharnée nous a permis d’avoir 15 millions d’euros votés." Reste maintenant le passage en commission mixte paritaire qui doit entériner ces décisions mais dont la date n’est pas encore communiquée.
Au-delà de cet acquis financier, les acteurs de terrain sont aussi satisfaits du positionnement du nouveau ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé, Xavier Bertrand. "Les maisons de l’emploi sont nécessaires, a-t-il insisté lors des débats au Sénat. Alors que la situation de l’emploi impose toujours la mobilisation totale de l’ensemble des acteurs sur le terrain, les maisons de l’emploi, qui fonctionnent et dont l’utilité est perçue par tous, continueront à être soutenues." Un positionnement que les maisons de l’emploi attendaient depuis longtemps, après les différentes phases d’incertitudes qu’elles ont traversées : le gel de leur conventionnement, annoncé en septembre 2007 par le gouvernement, la mise au point de leur nouveau cahier des charges en janvier 2010, et les réductions budgétaires... "Cela fait trois ans qu’on attendait ça, maintenant on a un ministre qui les soutient", souligne Marie-Pierre Establie. Un ministre qui met en avant la complémentarité des deux structures, maisons de l’emploi et Pôle emploi, un des points-clés du nouveau cahier des charges destiné à éviter les doublons entre les deux. "Je ne suis pas de ceux qui prônent la suppression des maisons de l’emploi au motif qu’elles font concurrence à Pôle emploi. Ces deux structures ont des vocations différentes, mais l’ambition qui les sous-tend est identique : faire reculer le chômage, a ainsi signalé Xavier Bertrand. Les maisons de l’emploi n’ont pas vocation à se substituer à Pôle emploi mais à ajouter des services complémentaires." Des services qu’AVE met aussi en valeur, comme le travail effectué dans le domaine du développement durable par trente trois maisons de l’emploi dans le cadre d’un programme expérimental, lancé en 2008 par le ministère de l’Ecologie, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et AVE, pour soutenir le développement des emplois générés par la croissance verte sur des territoires à fort potentiel en matière d’énergies renouvelables et d’écoconstruction (voir encadré ci-dessous).

Près de 200 maisons de l’emploi prêtes à repartir en 2011

"Ce sont des outils de territoire, de diagnostic, d’ingénierie de projets, ce que ne fait pas Pôle emploi, précise Marie-Pierre Establie. Elles mettent le territoire en mouvement." Au total, 203 maisons de l’emploi existent actuellement, dont certaines, entre cinq et six, devraient disparaître l’an prochain du fait de leur taille trop réduite ou de la volonté politique d’un élu. "Sinon, elles repartent toutes à partir de janvier 2011, précise la responsable d’AVE. Elles ont toutes développé leur plan d’actions mais les négociations étaient en suspens à cause de cette question financière." Les amendements votés à l’Assemblée et au Sénat vont leur permettre de perdurer sans trop de difficultés, mais une question subsiste toutefois, posée par AVE : "Comment fait-on en France pour inscrire une fois pour toutes et définitivement dans le cadre institutionnel et juridique ces politiques territoriales de l’insertion et de l’emploi ? Il y a un vrai travail à mener pour que nous cessions en début de chaque année de devoir faire face aux mêmes difficultés et à la même remise en question de nos structures. On ne peut plus travailler dans ces conditions." Le sujet doit être abordé lors des journées nationales des maisons de l’emploi et des plans locaux d’insertion et d’emploi (Plie), organisées les 9 et 10 décembre à Nancy par AVE, sur les mutations économiques, l’insertion et l’emploi.

Emilie Zapalski

Croissance verte : la maison de l'emploi de Mulhouse en première ligne

A Mulhouse, un pôle "compétence bâtiments basse consommation" vient de voir le jour dans le cadre du plan climat. Il implique collectivités, entreprises, représentants des différents corps d'état, organisations professionnelles et acteurs de la formation et de l'emploi. A cet effet, la maison de l'emploi et de la formation du pays de la région mulhousienne s'est vu confier l'animation des questions de l'emploi et de la formation. L'objectif : adapter les compétences de demandeurs d'emploi à un marché en pleine expansion. Selon une étude menée en 2008, entre 1.150 et 2.400 emplois pourraient être créés sur ce territoire entre 2008 et 2018, dans les domaines de l’isolation, de l’électricité, du chauffage, de la pose de fenêtres. "Le bâtiment est responsable de 28 % des émissions de gaz à effet de serre et de 42 % de la consommation d'énergie, devant le transport, or toute la réglementation se porte sur la question du neuf et jamais de l'existant. Notre souhait a été de travailler au contraire directement sur la rénovation de l'existant", a expliqué Olivier Pihan, directeur adjoint de la maison de l'emploi, lors d'un séminaire sur la croissance verte organisé à la Caisse des Dépôts, avec ETD et l'OCDE, mercredi 8 décembre. Mais pour mener à bien ces rénovations, les métiers traditionnels ont besoin de s'adapter. "Avec les chauffagistes, par exemple, nous sommes à la croisée entre les compétences traditionnelles et émergentes mais l'offre de formation ne correspond pas à ces besoins", a expliqué Olivier Pihan. La maison de l'emploi a ainsi décidé de pallier ce manque en remettant à niveau les compétences traditionnelles des demandeurs d'emploi tout en leur apportant les connaissances nécessaires aux nouveaux impératifs d'efficacité énergétique et autres. "De nouveaux modules sont venus recomposer l'offre de formation. Ils ont été validés par les professionnels qui, en contrepartie, se sont engagés à embaucher."

Michel Tendil