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Comité interministériel des villes : une rallonge de 2 milliards pour la rénovation urbaine

Un comité interministériel des villes s’est tenu ce 29 janvier à Grigny. Le Premier ministre y a annoncé un effort de 3,3 milliards d’euros à destination des quartiers prioritaires de la politique de la ville, dont la déclinaison du plan de relance à hauteur d’au moins 1 milliard d’euros et 2 milliards de crédits supplémentaires pour la rénovation urbaine – le NPNRU passant donc de 10 à 12 milliards d’euros. Ont été par ailleurs lancés 46 nouvelles cités éducatives et sept quartiers de reconquête républicaine, tandis que des moyens supplémentaires sont également dégagés dans les domaines de l’emploi, du sport et de la santé.

Plus de trois ans après "l’appel de Grigny", cri d’alarme de maires et responsables associatifs pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) (voir notre article du 17 octobre 2017), le Premier ministre a réuni ce 29 janvier 2021 un comité interministériel des villes (CIV) dans le quartier de la Grande Borne de la ville populaire de l’Essonne. "Ce comité n’avait pas été réuni depuis 2013", a rappelé le Premier ministre Jean Castex, qui était accompagné d’une partie de son gouvernement – dont les ministres de la Ville, de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, de l’Emploi, du Logement.

Après "l’appel du 14 novembre" dernier et l’engagement du chef du gouvernement de consacrer 1 milliard du plan de relance aux QPV (voir notre article du 23 novembre 2020), les maires de banlieue avaient poursuivi leur mobilisation avec des propositions précises en faveur de leurs quartiers structurellement en difficulté et fragilisés encore davantage par la crise sanitaire (voir nos articles de décembre 2020 et janvier 2021). Avec une préoccupation : que les crédits annoncés parviennent bien aux quartiers prioritaires, avec un fléchage clair vers des mesures concrètes.

Le gouvernement s’est efforcé de répondre à cette exigence avec l’annonce de 15 mesures ciblées et de crédits supplémentaires. En effet, en plus du milliard promis aux quartiers dans le cadre du plan de relance, 2,3 milliards d’euros seront dédiés à la sécurité, au logement, à l’éducation, à l’emploi et l’insertion dans les QPV. Soit 3,3 milliards d’euros au total, pour donner à l’engagement du gouvernement en faveur de ces quartiers "une force nouvelle dans un contexte de crise qui frappe d’abord les territoires où se concentrent les inégalités de santé et les difficultés sociales", a exprimé le Premier ministre Jean Castex à l’issue du CIV. Ainsi, la première mesure annoncée par le chef du gouvernement est l’ouverture de 60 centres et maisons de santé pluri-professionnels et participatifs dans les QPV. Les hôpitaux et établissements de santé desservant ces quartiers devraient en outre bénéficier du volet investissement de 15,5 milliards d’euros du Ségur de la santé.

Rénovation urbaine : le NPNRU porté à 12 milliards d’euros 

En dehors du plan de relance, les crédits annoncés ce jour consistent principalement en une rallonge de 2 milliards pour le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), avec une enveloppe qui passera donc de 10 à 12 milliards d’euros. Apportés par Action logement à hauteur de 1,4 milliard d’euros, par l’État pour 200 millions d’euros et par les bailleurs sociaux vraisemblablement pour le solde de 400 millions, ces 2 milliards supplémentaires réclamés par les maires de banlieue doivent servir à financer de nouveaux projets (notamment à Marseille ou en Île-de-France), à approfondir d’autres projets déjà financés – mais qui avaient été contraints par des enveloppes limitées – ou encore à tirer certaines leçons du confinement, en particulier sur la nécessité pour les habitants d’accéder à un espace extérieur. Cette rallonge doit également permettre d’améliorer l’offre de services et d’équipements publics – scolaires, culturels, sportifs… - autour des logements. 150.000 habitants pourraient bénéficier de ces nouveaux projets, a souligné l’Agence nationale de la rénovation urbaine dans un communiqué.

En matière de mixité sociale, Jean Castex a dit sa détermination à poursuivre l’application de la loi Solidarité et Renouvellement urbains (SRU), mais aussi à "s’attaquer au phénomène inverse dans les communes déjà très dotées de logements sociaux". Le gouvernement entend ainsi limiter ses autorisations pour la production de logements sociaux dans les communes qui en comptent déjà plus de 40%. L’entourage du Premier ministre précise que cette mesure sera mise en œuvre de façon pragmatique en fonction des situations, mais qu’il s’agira de permettre le plus possible la diversification de l’offre (vers des logements sociaux de classe supérieure, du logement accompagné adapté, de l’accession sociale à la propriété…). Sur l’occupation du parc existant, "seul un quart des territoires a adopté une convention intercommunale d’attribution, pourtant rendue obligatoire" par la loi Égalite et citoyenneté de janvier 2017. Il importe donc d'"accélérer la conclusion de ces conventions", qui doivent "devenir en quelque sort le pendant de la loi SRU sur l’occupation du parc existant", a ajouté Jean Castex.

Sécurité : sept nouveaux quartiers de reconquête républicaine

Des moyens ont par ailleurs été annoncés en matière de sécurité, avec le déploiement de 180 policiers et gendarmes supplémentaires dans le cadre de sept nouveaux quartiers de reconquête républicaine (QRR) à La Ricamarie et Le Chambon-Feugerolles (Loire), Vaulx-en-Velin (Rhône), Rillieux-la-Pape (Rhône), Annemasse (Haute-Savoie), Le Havre (Seine-Maritime), Bonneville (Haute-Savoie) et Libourne (Gironde). Les QRR seront ainsi au nombre de 62, avec un total de 1.200 effectifs déployés. Les moyens de prévention sont également renforcés à hauteur de 6 millions d’euros supplémentaires, avec la création de 300 postes de médiateurs et de 300 postes d’éducateurs spécialisés. Selon le dossier de presse du CIV, ces postes bénéficieront "en priorité" aux QRR et cela "en partenariat avec les collectivités". 

Le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) sera aussi abondé de 10 millions d’euros supplémentaires (voir notre article du 5 janvier 2021 sur la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024). Jean Castex a également rappelé que des recrutements étaient en cours pour renforcer la justice de proximité (voir notre article du 17 décembre 2020). 

46 nouvelles cités éducatives désignées et un nouvel appel à projets au printemps 

Dans le domaine de l’éducation, le gouvernement veut accélérer le rythme sur les cités éducatives, en dédiant 15,5 millions d’euros au déploiement du dispositif dans 46 quartiers – soit un peu plus que le nombre de 40 cités déjà annoncé en septembre 2020 et confirmé par instruction ministérielle en novembre 2020 (voir notre article du 26 novembre 2020). L’horizon fixé : "atteindre 200 en 2022 avec un objectif de généralisation à l’occasion de la prochaine génération de contrats de ville". Figurant en annexe du dossier de presse, les 46 nouvelles cités éducatives se situent notamment dans des quartiers de Dunkerque, Grande-Synthe, Metz, Troyes, Châteauroux, Clermont-Ferrand, Béziers, Bastia ou encore en Guyane et à Mayotte. Au total, 126 quartiers vont désormais œuvrer à un meilleur partenariat entre l’ensemble des acteurs éducatifs autour de l’accompagnement des enfants et des jeunes. Pour les 74 qu’il restera à mettre en route, "un appel à projets sera lancé au cours du printemps 2021", a ajouté le Premier ministre.

Concernant la petite enfance, pour faciliter la création de places en crèche dans les QPV, le bonus "territoire" sera revalorisé de 500 euros par place pour réduire le reste à charge des communes et intercommunalités ; le gouvernement fixe ainsi un objectif de 10.000 nouvelles places d’ici la fin du quinquennat.

Autre mesure en direction des enfants et jeunes : la reconduction en 2021 des "vacances apprenantes" et des "quartiers d’été". Ces dispositifs ont concerné 945.000 enfants de 3 à 18 ans en 2020, avec un financement global (État et collectivités) de 200 millions d’euros (voir notre article du 1er septembre 2020). 

36 millions d’euros pour créer 1.000 équipements sportifs de proximité

Sur l’accès aux droits, parmi les quelque 900 maisons France services qui devraient être ouvertes d’ici 2022 (voir notre article du 15 janvier 2021), 400 concerneront des QPV et devront couvrir "100% des QRR et des quartiers NPNRU". Destinées à rassembler différents professionnels sur un même lieu pour faciliter les démarches des jeunes, des "cités de la jeunesse" seront également créées dans une quinzaine de territoires d’ici 2022.

Concernant le sport, en plus des 65 millions d’euros du plan de relance fléchés sur l’emploi et la rénovation énergétique des équipements dans les QPV, une enveloppe de 36 millions d’euros supplémentaires est allouée à l’Agence nationale du sport. Il s’agira de "soutenir la mise en place rapide de 1.000 équipements de proximité dans les quartiers prioritaires, accompagner la réalisation d’équipements structurants" tels que des gymnases, ainsi que des projets associatifs, a détaillé Jean Castex.

Plan "1 jeune 1 solution" : au moins 700 millions d’euros devraient bénéficier aux QPV

Sur le terrain de la formation, de l’insertion et de l’emploi, le gouvernement mise sur le plan "1 jeune 1 solution" avec, selon le chef du gouvernement, "plus de 700 millions d’euros" fléchés vers les quartiers prioritaires. Les effectifs de 66 agences de Pôle emploi implantées dans les QPV seront par ailleurs renforcés, avec le recrutement de 500 conseillers. 

"60 cités de l’emploi verront le jour cette année", a poursuivi le Premier ministre, afin de "mobiliser tous les acteurs, et en particulier les entreprises, de manière concertée pour aller vers les demandeurs d’emploi et leur proposer un accompagnement sur mesure". Le déploiement de cet outil sera poursuivi en 2022. 

Si plusieurs annonces de ce jour répondent ainsi aux attentes exprimées par les maires des villes populaires, les élus entendent désormais veiller à la traduction de ces mots en actes. "On demande un contact tous les mois avec le cabinet du Premier ministre pour s'assurer de la mise en oeuvre" de ces crédits, a plaidé Philippe Rio, maire de Grigny, rapporte l’AFP. Selon l’entourage du Premier ministre, des réunions sur le suivi des crédits du plan de relance dans les QPV seront organisées par les préfets de département, tandis ce que les sous-préfets se rendront auprès des maires des villes concernées pour s’assurer que ces derniers présentent bien des projets. Concernant les revendications purement financières de l’association Ville & Banlieue, elles feront l’objet d’une "discussion générale" sur les finances locales, avec les autres associations du bloc communal.

 

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