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Restauration de Notre-Dame : parution de la loi sur fond de plainte pour carence fautive

Alors que la loi taillée sur mesure pour répondre au défi de reconstruction de la cathédrale incendiée dans le délai controversé de cinq ans vient tout juste d’être publiée, l’Association Robin des bois cible, dans une plainte pénale, la passivité des autorités face à la pollution au plomb consécutive au sinistre. 

La loi pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet vient d’être publiée au Journal officiel, ce 30 juillet, après un parcours chaotique marqué par l’affrontement entre les deux chambres sur les modalités d’y parvenir. Un texte taillé sur mesure pour organiser la souscription nationale dédiée et répondre au défi de reconstruction de l’édifice ravagé par les flammes, il y a à peine plus de trois mois, dans le délai contraint de cinq ans fixé par Emmanuel Macron, devenu pour l'opposition le "symbole d'une loi d’exception" prise dans la précipitation. Au-delà de la volonté unanime de redonner toute sa splendeur à l’édifice pluriséculaire, un bras de fer s’est immédiatement engagé avec le Sénat, à majorité de droite, sur le vaste régime dérogatoire, notamment en matière d’urbanisme, inscrit à l’article 11 pour en accélérer les travaux. Farouchement opposée "aux adaptations s’appliquant à la protection de l’environnement et à l’évacuation et au traitement des déchets ", l’association Robin des bois avait très tôt donné l’alerte sur le risque sanitaire et environnemental en raison de la dispersion de plomb provoquée par l’incendie, avant d’adresser une série de courriers aux différents ministères, à l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France-et à AirParif, le 23 avril, à la veille de la présentation du projet de loi en conseil des ministres. Robin des bois avait alors appelé tous les députés et sénateurs à s’opposer en priorité à cette partie du texte pressentie comme "une incitation à la mise en danger collective d’autrui".

Carence fautive

C’est donc sans surprise que l’association a annoncé avoir déposé, ce 26 juillet, devant le procureur de la République de Paris, une plainte contre X pour carences fautives dans la mise en œuvre des mesures de protection et d’information des populations et des travailleurs ayant pour conséquence la mise en danger délibérée de la personne d’autrui et la non-assistance à personne en danger. La suspension du chantier et la fermeture de deux écoles du 6e arrondissement transformées en centres de loisir pour l’été - et dont les cours extérieures présentaient des taux de pollution au plomb supérieurs à 5.000 ?g/m2 -, le 25 juillet, avaient d’ores et déjà relancé la question de la dangerosité de la pollution au plomb pour la santé des travailleurs et riverains de la cathédrale. Une pollution née de la combustion de plusieurs centaines de tonnes de plomb et autres matières toxiques mises en œuvre dans la flèche érigée par Viollet-le-Duc, la toiture et les œuvres liturgiques dont des vitraux. "Les autorités compétentes, y compris le diocèse (…), ont omis de porter secours aux populations permanentes, temporaires et aux travailleurs et les ont laissé subir les retombées toxiques", épingle l’association dans sa plainte. Selon elle, les autorités auraient dû prendre "les mesures immédiates de confinement de la population riveraine et des travailleurs", "empêcher les attroupements à proximité de l'incendie pendant qu'il faisait rage", "énoncer des recommandations sanitaires immédiatement après le sinistre ou du moins dans des délais raisonnables c'est-à-dire 24/48 heures après". Le défaut de prise en compte dans le plan communal de sauvegarde (PCS) du risque incendie majeur sur Notre-Dame constitue un argument supplémentaire, aux yeux de l’association, de la carence fautive de la maire de Paris dans la mise en œuvre des mesures de police générale prévues par l’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales. 

Information opaque

Robin des bois cible par ailleurs la lenteur fautive des actions d’information de la préfecture de police de Paris et de la mairie de Paris. Le premier communiqué co-signé par l’ARS d’Île-de-France, le préfet de police de Paris et la préfecture d’Île-de-France confirmant la présence de pollution au plomb attribuée à l’incendie est daté du 29 avril, soit environ 15 jours après le sinistre. L’ARS a ensuite communiqué à plusieurs reprises, notamment dans ses avis du 16 mai et du 7 juin, des conseils de prévention pour les riverains, en particulier de nettoyage et d’hygiène des appartements. Les résultats de la première campagne de prélèvements réalisée par le laboratoire central de la préfecture de police de Paris ne seront quant à eux rendus publics que le 18 juillet par l'ARS. Dans ce dernier avis sanitaire, l’agence préconise que soient menés, par précaution, des prélèvements environnementaux dans les lieux accueillant des enfants en condition normale d’utilisation, dès lors qu’ils sont situés dans un rayon de 300 mètres à proximité d’un point où aurait été effectué un prélèvement de poussières en surface extérieure supérieur à 5 000µg/m2. Cette valeur "n’est ni un seuil sanitaire, ni un seuil réglementaire", mais un simple "repère d’aide à la décision", souligne toutefois l’ARS. Une démarche "sous-dimensionnée par rapport à l’ampleur de l’enjeu sanitaire", estime le porte-parole de Robin des bois, Jacky Bonnemains, qui dénonce également le caractère "particulièrement opaque" et " volontairement parcellaire afin d’être rassurantes" des données transmises par l’ARS, par la préfecture de police, la mairie de Paris et les mairies d’arrondissements.  

 

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