Sébastien Martin : "L'encadrement de nos recettes n'est pas la solution"
Intercommunalités de France qui, comme les autres associations d'élus, participe aux travaux liés à la conférence financière des territoires et à la préparation du prochain projet de loi de finances, formule un certain nombre de préconisations. Son président, Sébastien Martin, s'est entretenu le 17 juin avec Éric Lombard et Amélie de Montchalin. Il se dit "prêt au dialogue" mais émet d'ores et déjà plusieurs réserves. Il indique par ailleurs qu'une proposition de loi portant décentralisation de MaPrimeRénov' est en préparation.

© Grand Chalon/ Sébastien Martin
Sébastien Martin, le président d'Intercommunalités de France – et qui devrait le rester jusqu'aux municipales malgré sa récente élection comme député de Saône-et-Loire – rencontrait mardi 17 juin les deux ministres en poste à Bercy, Éric Lombard et Amélie de Montchalin. Un rendez-vous de plus en vue de la préparation du prochain projet de loi de finances et des axes que doit fournir François Bayrou d'ici la mi-juillet. Et des rendez-vous entre le gouvernement et les élus locaux, il y en a beaucoup actuellement. Le lendemain se tenait en effet une nouvelle réunion de l'un des groupes de travail mis en place dans le cadre de la conférence financière des territoires du 6 mai. Sachant que la précédente, qui avait eu lieu le 10 juin, avait conduit les représentants de l'État à évoquer la perspective d'un mécanisme de limitation des recettes des collectivités (voir notre article). "Il y a plein d'instances de dialogue", constate Sébastien Martin (conférence financière des territoire, mais aussi comité d'alerte devenu conférence nationale des finances publiques...).
"J'ai dit aux deux ministres que nous sommes prêts au dialogue", a rapporté l'élu à la presse, assurant que l'on peut réfléchir à "une trajectoire de dépenses" mais soulignant en revanche que "l'encadrement de nos recettes n'est pas la solution". Selon lui, le gouvernement "tâtonne" encore, "pose toutes les pistes sur la table" pour "chercher la meilleure option". Et Sébastien Martin d'estimer que de toute façon, "tout le monde va serrer les boulons" : "Il y aura de fait un ralentissement fort de la dépense locale en 2025 et on va le retrouver en 2026", prévoit-il, ne serait-ce que pour des raisons de calendrier électoral. Intercommunalités de France va d'ailleurs fournir à Bercy d'ici fin juin un comparatif des budgets prévisionnels 2024 et 2025, réalisé sur un échantillon d'une trentaine d'intercommunalités, afin de le montrer.
Comme bien d'autres élus, Sébastien Martin souligne dans le même temps combien certaines charges contraintes vont peser sur les budgets : "On va avoir à nouveau la CNRACL, le service public de la petite enfance…". Comme d'autres aussi, il plaide pour "un gel de toute nouvelle norme". Certaines choses ont été amorcées fin avril lors du Roquelaure de la simplification mais il faut poursuivre le chantier. Intercommunalités de France y participe. "Nous avons eu une bonne matinée de travail avec Boris Ravignon, on est en train de tout lister", relate Sébastien Martin, qui verrait d'un bon œil une "proposition de loi de simplification de la vie des collectivités". En tout cas, d'autre mesures gouvernementales devraient émerger - on sait d'ailleurs que François Rebsamen a demandé début juin aux préfets de lui faire parvenir d'ici la mi-juillet des propositions (voir notre article).
Décentraliser MaPrimeRénov'
Intercommunalités de France a rédigé une "Note de positions" de quatre pages sur ces sujets. Dans laquelle l'association développe ses "réserves" quant à un mécanisme de limitation de l'évolution des recettes des collectivités. "Toutes les recettes locales ne sont pas de même nature et ne peuvent rentrer dans un plafonnement global, sans que leur portée n'en soit dévoyée", écrit-elle, mentionnant notamment la TVA. Il faudra donc a minima "identifier celles qui auraient le moins d'impact sur les équilibres financiers locaux".
Intercommunalités de France repose aussi l'enjeu des dépenses contraintes et donc non pilotables, notamment du côté des dépenses liées aux ressources humaines. Elle insiste en outre sur l'enjeu de la "prévisibilité". Là-dessus, lors de la réunion du 10 juin, l'entourage d'Éric Lombard a proposé "l'inscription d'engagements pluriannuels" dans le rapport organique consacré à la situation des finances locales annexé au projet de loi de finances. Si l'idée est jugée "intéressante" par l'association, celle-ci souligne que "cette annexe à la loi de finances reste sans portée juridique contraignante".
Le document met par ailleurs l'accent sur le fait que "rendre un meilleur service à moindre coût" passe aussi par la subsidiarité. Et là-dessus, l'actualité redonne à Sébastien Martin un parfait cas de figure : MaPrimeRénov', qui a fait l'objet de plusieurs annonces et contre-annonces ces dernières semaines (voir entre autres notre article du 17 juin). "Maintenant c'est bon, il faut passer des discours aux actes, les faits ont montré qu'une gestion nationale génère notamment des fraudes", tranche l'élu, pour qui la gestion doit clairement être confiée aux intercommunalités ou aux départements (selon les territoires et selon l'organisation actuelle des plateformes territoriales de la rénovation énergétique). "Qu'on nous laisse nous occuper des changements de fenêtres ! On peut faire mieux avec moins", clame-t-il, soulignant qu'avec une décentralisation du dispositif, "on fera un seul dossier" par bénéficiaire. Et Sébastien Martin de faire savoir qu'une proposition de loi sur cette décentralisation de MaPrimeRénov' est en cours de rédaction et sera prête dès cet été.