La Cour des comptes européenne pas emballée par la gestion des déchets municipaux dans l'UE
Dans un rapport publié le 26 novembre, la Cour des comptes européenne déplore "les faibles progrès" accomplis par les États membres dans la gestion des déchets municipaux, relevant qu'un "grand nombre peine à progresser vers la circularité". "Bien que certains États membres aient accompli des progrès substantiels et soient en voie d'atteindre les objectifs, d'autres n'ont réalisé que des avancées modérées [dont la France – lire notre article du 8 juin 2023], et quelques-uns n'ont presque pas progressé", observe-t-elle. Un constat déjà dressé par la Commission, ce qui avait d'ailleurs conduit cette dernière à substituer à la directive sur les déchets d'emballages un règlement plus contraignant (lire notre article du 2 décembre 2022) publié en début d'année (lire notre article du 24 janvier).
En se focalisant sur la situation des quatre États membres qu'elle a auditionnés – Grèce, Pologne, Portugal et Roumanie –, la Cour observe que la collecte séparée des déchets est globalement restée "à un niveau très bas". Elle déplore en outre les "progrès inégaux accomplis en ce qui concerne les instruments économiques", en prenant l'exemple de la mise en œuvre de systèmes de consigne (lire notre article du 11 juin), d'une tarification incitative ou encore du relèvement de la taxe sur la mise en décharge. Autant de sujets qui concernent au premier chef l'Hexagone, en pointe seulement sur le dernier, au grand dam de l'association Amorce (lire notre article du 24 janvier). Plus encore, la Cour déplore par ailleurs que "la production de déchets continue le plus souvent d'augmenter en même temps que le produit intérieur brut, quoique moins vite".
Pour les auteurs du rapport, "le plus grand défi à relever" réside toutefois "dans la viabilité de l'industrie du recyclage", les installations existantes – "en particulier celles qui traitent les plastiques" – étant menacées du fait de la hausse des coûts de production (l'énergie, là encore), d'une demande défaillante et de la concurrence de plastique importé, vierge et recyclé, moins cher. On le sait, celles traitant les textiles ne sont pas non plus épargnées (lire notre article du 19 mai).
In fine, la Cour recommande notamment à la Commission "de faire un meilleur usage des outils de suivi et de contrôle de l'application de la législation", regrettant qu'elle tarde à entamer des procédures d'infraction. Elle lui suggère également d'étudier une possible harmonisation de la taxe sur la mise en décharge et sur l'incinération des déchets.
À la décharge, si l'on peut dire, des États membres, on notera que la Cour concède "qu'un grand nombre [d'entre eux] ont investi dans des incinérateurs", qui "coûtent cher" et "ont une durée de vie de 20 ans", justifiant que cette méthode reste "la principale" pour beaucoup d'Etats. D'autant que "la plupart de ces incinérateurs récupèrent l'énergie, qui peut être vendue pour générer des recettes". Une piste notamment promue par Amorce (lire notre article du 28 mai 2024). La Cour relève également ce que David Lisnard qualifierait "d'injonctions contradictoires", en observant que la règlementation de l'UE n'est pas elle-même sans "restreindre les possibilités d'utilisation des matières plastiques recyclées".
Rappelons encore que si l'Union a imposé à chaque État membre l'obligation de payer une contribution nationale proportionnelle à la quantité d'emballages en plastique qu'il ne recycle pas, la Cour des comptes européenne avait eu précédemment l'occasion de constater que l'UE n'avait guère facilité la tâche de ces derniers en la matière (lire notre article du 18 septembre 2024).