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Logement - L'établissement public foncier régional unique fait grincer des dents

Un amendement du groupe SRC (socialiste, républicain et citoyen) au projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social (voir notre article ci-contre du 26 septembre 2012) suscite déjà des remous. Il s'agit d'un article additionnel (article 3 bis A) prévoyant qu'"il ne peut exister qu'un seul établissement public foncier de l'Etat par région". Ce même article précise que "dans les régions où il existe plusieurs établissements publics fonciers de l'Etat lors de la promulgation de la loi [...], le deuxième alinéa s'applique dix-huit mois après la promulgation de la loi". Pour les auteurs de l'amendement, "dans un souci d'efficacité de l'action publique, il est nécessaire qu'il n'y ait qu'un seul établissement public foncier d'Etat par région. Cela s'inscrit de plus dans une bonne mise en œuvre du dispositif prévu à l'article 6" (la perception des pénalités pour non respect du quota de logements sociaux prévus par la loi SRU).
Cet amendement, qui vise principalement l'Ile-de-France, n'est pas sans lien avec le projet de la région de se doter d'une structure de gouvernance du logement. Il n'a donc pas manqué de faire réagir les départements franciliens tenus par l'opposition. Dès le lendemain du vote de la loi, un communiqué du 27 septembre du conseil général des Yvelines - intitulé "La politique du logement des Yvelines stoppée net ?" - dénonce ainsi "la suppression des trois établissements fonciers départementaux (Yvelines, Val-d'Oise et Hauts-de-Seine) au profit d'un seul établissement régional". Il rappelle aussi que l'établissement public foncier des Yvelines (EPFY), fortement subventionné par le département (106 millions d'euros), a permis de faire progresser de 40% l'offre de logement en 2011. Selon le communiqué, "au terme des 105 conventions qu'il a signées avec plus de 70 collectivités, son action se sera traduite par 35.400 logements dont 40% de locatifs sociaux". Estimant que "les résultats de l'EPFY sont plus du double de ceux de l'établissement dit d'Ile-de-France rapportés à chacun des cinq départements qu'il couvre", le conseil général "déplore ce coup de force parlementaire" et demande au gouvernement "de s'opposer au maintien de cette disposition". Le département des Hauts-de-Seine a publié peu après un communiqué sur le même thème.

Un sort incertain pour l'amendement

Le sort de cet amendement est incertain. Lors de l'examen du texte, la rapporteure et le gouvernement se sont montrés manifestement embarrassés. La rapporteure a ainsi demandé l'avis du gouvernement avant de prendre position. Pour sa part, Cécile Duflot a demandé le retrait de l'amendement en indiquant : "je serai conduite à émettre un avis défavorable, dans la mesure où il convient de bien évaluer le dispositif pour qu'il soit le plus efficace possible". La ministre a notamment fait valoir que "décider aujourd'hui d'une telle modification par voie d'amendement ne permettrait pas l'examen de réalités territoriales qui méritent qu'on les étudie de plus près, et créerait des tensions, voire des blocages politiques entre les EPF existants". Elle s'est en revanche déclarée ouverte à un réexamen de cette disposition "dans le cadre du projet de loi qui vous sera soumis au printemps, c'est-à-dire dans cinq mois - délai raisonnable qui nous permettra de réfléchir à un dispositif valable sur l'ensemble du territoire et adapté à la réalité des EPF". L'amendement ayant été maintenu par son auteur principal, il a finalement été voté contre l'avis du gouvernement. Dans ces conditions, ce dernier devrait logiquement tenter d'en obtenir le retrait lors de l'examen du texte en commission mixte paritaire.
Pour sa part, Benoist Apparu - ancien ministre délégué au Logement et principal porte-parole de l'opposition lors du débat - a reconnu que l'Ile-de-France possède "une multitude d'établissements fonciers, dont certains sont quelque peu atypiques - je pense bien sûr à l'Agence foncière et technique de la région parisienne". Mais il a, lui aussi, estimé que voter la suppression des EPF franciliens au détour d'un amendement serait prendre "le risque de désorganiser l'ensemble des politiques foncières en Ile-de-France, à un moment où la région doit précisément faire face à de grands défis".

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : article 3 bis A du projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social (adopté en première lecture par le Sénat le 13 septembre 2012 et par l'Assemblée nationale le 26 septembre 2012).

 

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