PLFSS : l'Assemblée adopte la partie recettes, vote final ce mardi
Un répit pour le gouvernement : l'Assemblée nationale a adopté ce vendredi 5 décembre dans un scrutin à suspense la partie recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, malgré la division du camp gouvernemental. Une issue qui permet aux débats de se poursuivre jusqu'au vote sur l'ensemble du texte prévu mardi 9 décembre.
© @Sylv20CARRIERE
Les députés ont adopté cette partie recettes par 166 voix contre 140 et 32 abstentions, avec le soutien de Renaissance, du MoDem, du PS et des indépendants de Liot. L'alliance RN-UDR, LFI et les écologistes ont voté contre, quand LR et Horizons, membres du camp gouvernemental, se sont majoritairement abstenus. Le scrutin a été marqué par une faible affluence (239 députés sur 577 n'ont pas pris part au scrutin).
Le résultat serré est à la fois un avertissement pour le gouvernement (les groupes RN, LFI et UDR fortement opposés peuvent mobiliser beaucoup plus de troupes au prochain vote), mais aussi une forme de succès, même temporaire, après avoir multiplié les gestes d'ouverture en espérant faire passer le texte sans 49.3. Ce vote sur les recettes n'était "certainement pas un vote sur l'ensemble du texte qui ne laisse rien présager évidemment de l'issue finale du vote" global, avait martelé préventivement le Premier ministre Sébastien Lecornu. Très présent dans l'hémicycle cette semaine, il a rappelé qu'en cas de rejet du volet "recettes" les parlementaires n'auraient pas pu étudier entre autres la "suspension" de la réforme des retraites. Le gouvernement a d'ailleurs annoncé qu'il appelait en priorité certains débats, dont cette suspension et le sensible gel des pensions de retraites et des minima sociaux.
Le gouvernement avait notamment cherché jeudi à concilier les positions du PS d'un côté et des groupes Horizons et LR, membres de sa majorité, sur la question sensible de la hausse de CSG sur le capital proposée par la gauche. L'exécutif a fait voter un amendement cherchant à la fois à "sécuriser des recettes" et "assurer que les classes moyennes ne soient pas impactées". Mais au prix d'un rendement en nette baisse, attendu autour de 1,5 milliard d'euros, au lieu de 2,8 dans la version initiale.
"Ce n'est pas tout à fait ce qu'on avait demandé, mais ça va dans la bonne direction", a estimé le socialiste Jérôme Guedj. "Il faut que nous puissions retirer de la partie relative aux dépenses (...) des mesures injustes", a-t-il ajouté. Les Républicains et Horizons, échaudés par les concessions faites au PS prennent appui sur le niveau de déficit pour expliquer leurs abstentions majoritaires. Paul Christophe (Horizons) a fustigé un "déficit de la sécurité sociale artificiellement réduit", en référence notamment à un transfert prévu de fonds des caisses de l'État vers celles de la sécurité sociale pour lui donner de l'air, mais sans alléger le déficit global du pays.
Le gouvernement espère ramener le déficit de la sécurité sociale à 20 milliards d'euros, et Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics, a estimé jeudi que le compteur prévisionnel virtuel se trouvait autour de 16 milliards d'euros à la fin de l'examen des "recettes". Tout en sachant que celui-ci sera très probablement dégradé après l'examen des dépenses, les députés étant par exemple très opposés au gel des pensions et minima sociaux initialement censé rapporter 3,6 milliards.
La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a également assuré vendredi qu'il n'y aurait aucune augmentation - ni dans le budget ni par décret - des franchises médicales. Le gouvernement envisage aussi de lâcher du lest sur l'objectif des dépenses de l'assurance maladie (l'Ondam) et de les augmenter "jusqu'à +2,5%", contre une hausse d'environ 2% prévue jusqu'ici.
Quelques points à retenir
CSG – Les socialistes avaient remporté une victoire en première lecture avec l'adoption d'une hausse de la CSG prélevée spécifiquement sur les revenus du capital. Mais face à l'opposition de la droite, dénonçant une mesure touchant les "petits épargnants", une version amoindrie a été adoptée en nouvelle lecture. Sont désormais exclus de la hausse les PEL (Plan épargne logement), assurances vie et revenus tirés de la location, entre autres. La mesure doit rapporter 1,5 milliard d'euros.
Gel du barème – L'Assemblée s'est opposée au gel du barème de la CSG sur les revenus de remplacement (pensions, allocations chômage...) qui était proposé par le gouvernement en 2026.
Heures supplémentaires – L'Assemblée a adopté un amendement LR étendant aux entreprises de plus de 250 salariés une déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires. Le coût serait de "moins de 150 millions d'euros", selon Amélie de Montchalin.
Surtaxe sur les mutuelles – Le projet du gouvernement prévoit une taxation exceptionnelle des complémentaires santé, à hauteur d'un milliard d'euros. La mesure avait été repoussée en première lecture par les députés, mais ils l'ont finalement approuvée en nouvelle lecture, après l'adoption d'amendements visant à faire en sorte que cette taxe ne se répercute pas sur les assurés.
Apprentis – Le gouvernement proposait de supprimer l'exonération de cotisations salariales en faveur des apprentis pour les nouveaux contrats à partir de 2026, pour rapporter 320 millions d'euros en 2026. Mais les députés se sont opposés à cette suppression, dénonçant la baisse de rémunération pour les apprentis.
Tickets-restaurants – La création d'une cotisation patronale prélevée sur les tickets-restaurants et les chèques-vacances ne figure plus dans le texte depuis la première lecture. La mesure aurait rapporté 950 millions d'euros en 2026.
Entreprises ultramarines – Après une levée de bouclier des élus ultramarins inquiets pour les entreprises de leurs territoires, Assemblée et Sénat se sont opposés à une réforme des exonérations de cotisations patronales en outre-mer, issues de la loi Lodéom de 2009. Une réforme qui devait représenter 350 millions d'euros d'économies.
Pharmaciens – L'Assemblée a voté pour fixer dans la loi à 40% le plafond des remises commerciales que peuvent accorder les laboratoires sur les médicaments génériques. Un décret avait temporairement abaissé ce plafond à 30% cette année, déclenchant une grève des pharmaciens, pour qui ces ristournes sont une source importante de revenus.
Nutri-score – L'Assemblée a finalement rejeté une proposition de parlementaires de plusieurs groupes pour généraliser l'affichage du Nutriscore sur les emballages des aliments.
Franchises médicales – Le gouvernement s'est engagé vendredi à ne procéder à aucune augmentation des franchises médicales ni dans le budget de la sécurité sociale, ni par décret par la suite.