Action cœur de ville : les premiers jalons d’un "acte III" sont posés

"Il nous faut repartir au travail pour préparer l’avenir", a affirmé le directeur de la Banque des Territoires, Antoine Saintoyant, à l'occasion de la septième édition des Rencontres coeur de ville qui se tenaient à Chambéry, les 8 et 9 décembre. Alors que le gouvernement a confirmé la poursuite du programme Action coeur de ville (ACV) après les élections municipales, la direction de la Caisse des Dépôts entend agir sur quatre priorités : le logement, la santé et le grand âge, la renaturation et le commerce. Une thématique qui revient en force dans un contexte de concurrence des grandes plateformes asiatiques.

Lancé en 2018, le programme Action cœur de ville (ACV) a enjambé le mandat municipal actuel et va bel et bien se poursuivre au-delà. "Une nouvelle phase d’Action cœur de ville sera lancée après les élections municipales de mars", a déclaré la ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, Françoise Gatel, dans un message diffusé à l’occasion de la septième édition des Rencontres Cœur de villes organisées par la Banque des Territoires, les 8 et 9 décembre à Chambéry (Savoie), confirmant ainsi les annonces du Premier ministre lors du dernier Congrès des maires (lire notre article). Clin d’œil de l’histoire, ce cycle de rencontres entre les 244 maires du programme avait été inauguré à Poitiers en 2018 par… Sébastien Lecornu, alors tout jeune ministre des Collectivités de 32 ans. 

"On est arrivés en 2025 au moment de la livraison de tous les projets, c’est le temps de la moisson", s’est réjoui Antoine Saintoyant, le directeur de la Banque des Territoires. Parmi les principaux financeurs de programme, cette dernière a mobilisé 6,8 milliards d’euros en prêts, subventions d’ingénierie, investissements, "avec une accélération très forte cette année". Au total, 11,5 milliards ont été engagés au profit de 6.500 projets. 280.000 logements ont été rénovés et 518 locaux commerciaux ont été "accompagnés", a détaillé Françoise Gatel, saluant une "alliance rare entre exigence et efficacité". 

Une "nouvelle ambition" sur le commerce

Prévu initialement pour une durée de cinq ans, le programme avait été prolongé une première fois en 2023 jusqu’à la fin 2026, avec de nouvelles priorités sur les quartiers de gare et les entrées de ville, la renaturation en ville, la santé et le grand âge... Le gouvernement entend donc lui donner une "nouvelle ambition", notamment en matière commerciale. Car après avoir connu un regain d’attractivité, les centres des villes moyennes traversent une période difficile avec de nombreuses fermetures d’enseignes, dans l’habillement entre autres, sous les assauts des plateformes en ligne notamment. "La revitalisation commerciale est un enjeu majeur", a ainsi soutenu le ministre du Commerce, Serge Papin, lui aussi en vidéo. "Les rideaux qui se ferment ne sont pas une fatalité", a-t-il dit, quelques semaines après avoir reçu un rapport sur "l’avenir du commerce de proximité dans les centres-villes et les quartiers prioritaires de la politique de la ville" rédigé par Frédérique Macarez, maire LR de Saint-Quentin (Aisne), Dominique Schelcher, PDG de Coopérative U, et Antoine Saintoyant (lire notre article). "Le rapport trace une voie claire. Il constitue ma feuille de route", a assuré l’ancien patron de Système U. Sur les trente propositions formulées par les rapporteurs, le ministre en avait déjà retenu une petite dizaine, le mois dernier (lire notre article), comme l’idée de réformer la taxe sur les friches commerciales. Une revendication qui revient souvent chez les élus. "La taxe sur les logements vacants et la taxe sur les friches commerciales ne sont pas assez coercitives, d'ailleurs cette dernière peut être facilement détournée", pointe ainsi Alde Harmand, le maire de Toul (Meurthe-et-Moselle). À noter que plusieurs amendements ont été adoptés au Sénat pour ajuster la taxe dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026. Comme de nombreuses villes moyennes, Toul a connu la fermeture d’un Camaïeu et la difficulté de trouver repreneur avec des niveaux de loyers déconnectés du marché. Pour remédier à ces situations, la municipalité a eu parfois recours à des sous-locations "à des tarifs plus intéressants, pendant une durée de deux ans", explique-t-il. "Si la mayonnaise prend, le loyer est ensuite réajusté." 

Quatre priorités

D’autres mesures retenues par le gouvernement sont entre les mains de la Banque des Territoires qui a décidé d’apporter 200 millions d’euros supplémentaires à son plan Commerce, notamment pour renforcer le soutien aux foncières de redynamisation (100 millions d’euros) et aux managers de commerce (20 millions d’euros).

"Il nous faut repartir au travail pour préparer l’avenir", a martelé Antoine Saintoyant qui se fixe quatre priorités : outre le commerce, le logement, la renaturation et le grand âge et la santé. Dans le cadre d’ACV2, la Banque des Territoires a déjà financé plusieurs projets de modernisation ou de création d'hôpitaux (Caen), de maisons de santé (Forbach) ou d'Ehpad (Cahors, Riom). "Dans quelques semaines", elle présentera "un programme important pour avoir un impact encore plus fort", a annoncé Antoine Saintoyant. Il sera doté de 5 milliards d’euros.

La Banque des Territoires mène actuellement une évaluation du programme pour en mesurer "les effets concrets" et ajuster ses réponses.

"Action cœur de ville est pour nous une très grande chance", s’est félicité Thierry Repentin, le maire de Chambéry, qui a – comme à l’accoutumée, lors de ces rencontres -, animé une déambulation d’élus dans sa ville pour voir les réalisations du programme, avant de signer avec la Banque des Territoires une nouvelle convention de partenariat (voir encadré ci-dessous). "Le taux de vacance commerciale est en constante baisse depuis cinq ans et est substantiellement plus bas que la moyenne nationale", s’est-il félicité, rappelant que sa ville avait été la première à signer pour ACV 2. 

Avancer "rue par rue"

La cité savoyarde affiche un taux de vacance de 8,3% contre 15,8% en 2020. De manière générale, la vacance en centre-ville a "fortement ralenti" lors du mandat en cours, observe la Fédération des acteurs du commerce dans les territoires (Fact), dans une étude qui vient d’être publiée (lire notre article), avant tout dans les villes moyennes. La vacance dans les villes ACV a évolué "au même rythme que les autres", alors qu’elles partaient d’une situation plus défavorable, ce qui avait d’ailleurs justifié la mise en place du programme. La crainte d'un retournement plaide aujourd'hui pour une poursuite des actions.

Pour Antoine Saintoyant, la revitalisation commerciale est "un travail permanent" afin de "lutter contre des tendances extérieures qui viennent perturber le commerce". Il identifie plusieurs clés de réussite : "une détermination politique très forte, penser le commerce plus globalement, en lien avec le logement, la mobilité, le développement économique et avoir des outils tels que les SEM de redynamisation ou de logement, les managers de commerce." Il faut avancer "rue par rue", c’est du "cousu main, de la dentelle", souligne-t-il.

Chambéry saluée pour son "dynamisme" compte aussi se positionner sur le nouveau programme "montagne" de la Banque des Territoires doté de six milliards d'euros d'ici à 2030 (lire notre article). "Nous sommes un territoire alpin qui doit s’adapter au changement climatique pour rester habitable", a appuyé Thierry Repentin. Et de rappeler qu’en bon savoyard "lorsqu’on dit merci, cela veut dire encore".

› Chambéry et la Banque des Territoires approfondissent leur partenariat

La ville de Chambéry et la Banque des Territoires ont signé lundi 8 décembre une convention "site pilote" dans le cadre du programme Action cœur de ville. Elle prévoit de mobiliser 65.000 euros en ingénierie dans la lutte contre les îlots de chaleur, la préfiguration de la transformation de la zone commerciale des Landiers (Localtis y reviendra), la connaissance des continuités écologiques et la lutte contre les logements vacants. Par ailleurs, la Banque des Territoires apporte son soutien financier à quatre grands projets "structurants" de la ville : un nouveau centre d’exploitation de bus décarbonés (20 millions d’euros), la requalification de la friche de l’usine de Rubanox fermée en 2011 et l’augmentation en capital de la foncière commerciale Cristal Habitat (à hauteur de 5,2 millions d’euros). Cette recapitalisation permettra la rénovation et la remise sur le marché de cellules commerciales vacantes et de répondre à de nouveaux besoins : locaux médicaux, petite enfance… En 2021, une première recapitalisation a permis la réalisation de 43 projets, contribuant ainsi à la réduction de la vacance commerciale en centre-ville.

"La Banque des Territoires apporte de l’ingénierie, du cash aussi, en entrant au capital de Cristal Habitat, et des prêts à long terme à des taux qu'aucune banque ne peut concurrencer", s’est félicité Thierry Repentin, maire de Chambéry.

 

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